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Chronique d’une faillite annoncée

On assiste à une médiatisation sans précédent des violences exercées sur les requérants et les requérantes d’asile dans les centres fédéraux. Les journaux et la télévision en donnent ces jours une information soutenue, et non pas anecdotique, et le rapport d’Amnesty International en reçoit un écho rarement atteint dans l’espace public. Le directeur du Secrétariat d’Etat aux migrations (SEM), Mario Gattiker, a été forcé de sortir de sa réserve et de répondre publiquement aux questions de plus en plus pressantes que posent les faits gravissimes révélés.

Malheureusement, ce qui se produit était prévisible. Quand l’annonce a été faite d’ouvrir ces centres, les organisations citoyennes de défense des requérants d’asile comme les milieux des Eglises protestante et catholique ont émis leurs inquiétudes: ces centres allaient soustraire la présence des requérants à la vue de la population, ils allaient les rendre invisibles, faire obstacle aux ONG qui leur apportent aide, écoute et une présence humanisante. Leur fonctionnement et l’encadrement des requérants d’asile laissaient craindre le pire. En un mot, ces centres allaient contribuer à la politique d’isolement des requérants d’asile.

La fonction des centres fédéraux d’asile est la même que celle de Frontex. Si Frontex vise à «externaliser» le contrôle migratoire aux frontières de l’Europe via le financement de camps aux conditions sanitaires déplorables et livrés aux violences policières ou à celles de leurs substituts privés, les centres fédéraux, eux, «internalisent» la gestion migratoire en gardant les migrants dans ce qui n’est autre que des camps inaccessibles au public, des espaces clos propices au non-droit.

Les requérants d’asile doivent vivre presque cinq mois dans les centres fédéraux. C’est long. La souffrance que cela génère pour des femmes, des hommes, des enfants, des personnes âgées est indigne de notre Etat de droit et des valeurs judéo-chrétiennes dont il se réclame. Alors qu'ils et elles espéraient enfin vivre hors de l'enfer en arrivant dans notre pays, cette souffrance les atteint comme une ultime et insoutenable épreuve après les douleurs et les dangers mortels qu'ils et elles ont dû affronter sur les chemins improbables de leur exil.

Il est temps de faire autrement: davantage d’accompagnement social et moins de politique sécuritaire; construire la vie quotidienne dans les centres avec les requérants d’asile, acteurs de leur existence. La violence en serait désamorcée.

Commission protestante romande Suisses-Immigrés

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