Licenciements déguisés. La RTS vient de présenter son plan d’économies de 14,3 millions de francs lié à la baisse des recettes publicitaires et de la redevance. L’équivalent de 22,8 postes de travail sont supprimés. Le syndicat de journalistes Impressum dénonce des «licenciements déguisés» dans la mesure où plus de la moitié de ces postes concernent des retraites anticipées. Le groupe audiovisuel public avait déjà annoncé la disparition d’émissions télé – telles qu’«Au cœur du sport», «En ce temps-là», «Mauvaise langue» et «Toute une vie» – et radio – «Futur antérieur» et le «5h-6h30» –, tandis que «Mise au point» et «Couleurs d’été» réduiront leur voilure. La RTS entend «s’adapter à l’évolution des usages du public» et «lancer des nouveaux programmes, notamment dans les domaines de la culture, de l’information et à destination du jeune public».
L’«e-sport» plutôt que la littérature. Ce jeune public est la cible de la chaîne consacrée aux jeux vidéo et à l’«e-sport» (compétitions en réseau) ouverte récemment par la RTS sur la plateforme Twitch. Dix heures de programmes quotidiens permettant, selon le commentaire du «19h30», «de parler des jeux vidéo avec la même considération que s’il s’agissait de cinéma et de littérature»… La chaîne est lancée à l’essai pour trois mois. D’ici là, l’objectif est, d’après 20 Minutes, d’obtenir… 1000 «followers» (abonnés). Puisqu’on parle de littérature, relevons que les émissions qui lui sont consacrées ont quasi toutes été biffées des programmes ces dernières années. Diffusées sur Espace 2, «Quartier livres», «Entre les lignes», «Zone critique», «Versus-lire» et «Versus-penser» ne sont ainsi plus qu’un souvenir pour leurs «followers».. euh, pardon, leurs auditeurs. Désormais, la vieille radio romande diffuse ses programmes sous forme de «podcasts». Et, pour écouter les dernières nouvelles, il suffit aux utilisateurs de l'assistant vocal de Google qui ont téléchargé l’«app» de souffler: «Connecte-moi avec RTS Info.» A la télé, on met aussi à la porte les vieux schnocks. Exit Alain Morisod et ses «Coups de cœur», place au jeu «Cash», aux films et aux séries US.
Fuite en avant. La télé de papa n’intéresse plus les jeunes, aller les chercher sur les réseaux sociaux et les plateformes n’est pas une mauvaise idée. A la place de la diversité attendue, on assiste toutefois à un appauvrissement de l’offre culturelle et à un éloignement de la mission de service public. A l’instar des employés envoyés en préretraite forcée, la direction, atteinte de jeunisme aigu, fait peu de cas des auditeurs et des spectateurs les plus anciens. A ses yeux, 1000 «followers» pèsent plus que les quelque 90000 fidèles de Morisod. On peut râler un peu car c’est quand même nous qui finançons ce grand machin et, plutôt qu’une fuite en avant dans le tout-numérique, nous sommes en droit d’attendre des membres de la direction du groupe, mieux payés que des conseillers fédéraux, l’élaboration d’une stratégie crédible et d’un véritable projet de service public en concertation avec le personnel et la population.