Dumping salarial: les branches sans CCT à haut risque!
Mardi 31 octobre 2006
Les paysagistes paient les frais de la libre circulation des personnes, alors que les maçons ou les cuistots d'en sortent bien
L'USS tire la sonnette d'alarme en vue de l'ouverture complète de la libre circulation le 1er juin 2007. La sous-enchère salariale existe bel et bien, et fortement dans certaines branches. Des mesures doivent être prises. Par ailleurs, l'USS se réjouit du succès de son étude sur les salaires et de son calculateur de salaires en ligne, outils nécessaires pour la lutte contre le dumping.
Quelle est l'influence de la libre circulation des personnes sur les salaires? Lundi, l'Union syndicale suisse présentait à la presse les résultats d'une étude de l'Office fédéral de la statistique (OFS) comparant les salaires des travailleurs de l'UE, titulaires d'une autorisation de courte durée, entre octobre 2002 et octobre 2004, soit quelques mois après l'étape du 1er avril 2004. A cette date, le contrôle des salaires et la préférence nationale sont tombés, de même que les contingents pour les séjours de moins de 4 mois. Le 1er juin 2007, les contingents pour les séjours de courte durée - de 4 mois à un an - seront supprimés pour les travailleurs européens, à l'exception de ceux des 10 nouveaux états membres de l'UE.
La libre circulation a conduit à l'arrivée dans notre pays d'un nombre important de travailleurs européens, estimé cette année à 30000, soit environ 1% de l'emploi total en Suisse. L'étude de l'OFS révèle un dumping salarial considérable dans les branches qui ne sont pas couvertes par des conventions collectives de force obligatoire. Ainsi, selon les chiffres de l'OFS, le salaire moyen des paysagistes bénéficiant d'une autorisation de courte durée est passé de 3456 francs à 2570 francs, soit une chute de 25,6%! Dans les services aux entreprises et l'informatique, la baisse est de 10,9%, alors que dans les loisirs, la culture et le sport, elle est de 8,1%. Par contre, dans les secteurs conventionnés étudiés, les salaires ont augmenté, de 4,1% dans la construction et de 8,2% dans l'hôtellerie-restauration où ils passent de 3111 francs à 3365 francs.
Explications avec Daniel Lampart, secrétaire central de l'USS et membre de la commission tripartite nationale.
25% de salaire en moins pour les paysagistes et 10,9% dans les services aux entreprises, c'est énorme... alors que le Seco parle d'un dumping salarial de 2,5%?
Oui, c'est une grave sous-enchère. Le problème est que le Seco ne dispose pas de données pour les paysagistes. Il y a un retard dans l'observation de cette branche. L'USS collecte actuellement des données les concernant afin de pouvoir intervenir au Seco, car ce dernier n'a prévu de le faire que dès la fin juin 2007. Pour contrer cette sous-enchère, l'USS et Unia proposent de rendre obligatoire la partie consacrée aux paysagistes dans la convention nationale du bâtiment.
Les mesures d'accompagnement évoquent la «sous-enchère abusive et répétée». Dans ce cas, le Seco pourrait-il rendre obligatoire cette CCT?
Le Seco ou la commission tripartite nationale en ont le pouvoir. Mais nous devons documenter le cas, prouver qu'il y a sous-enchère abusive et répétée. L'USS essaie de le faire et pour cela nous avons besoin de données, mais il n'est pas sûr que les cantons qui les détiennent nous les fournissent.
Les paysagistes sont-ils les seuls à connaître une sous-enchère abusive?
Il y a différents secteurs où il y a des problèmes, l'agriculture par exemple. Dans ce secteur, il y a actuellement beaucoup de contrôles dans les cantons. Nous espérons qu'à la fin de l'année, le Seco reçoive ces données et puisse agir.
Sous quelle forme?
Les mesures d'accompagnement permettent d'édicter un contrat type pour une branche avec des salaires minimaux ou de rendre obligatoire une CCT. Pour l'agriculture, l'Union suisse des paysans est en train de réfléchir à une éventuelle convention collective qu'elle pourrait signer avec Unia. Un autre secteur est aussi sous contrôle: le nettoyage, surtout en Suisse alémanique où, contrairement à la Suisse romande, il n'existe pas de convention collective de force obligatoire.
Comment expliquer que dans les branches disposant d'une CCT de force obligatoire, les salaires augmentent?
Ce sont des CCT avec un salaire minimum. Elles protègent les salaires et les conditions de travail de tous les travailleurs. Cela veut dire que les mesures d'accompagnement fonctionnent là où existent des CCT de force obligatoire.
L'USS juge-t-elle les mesures d'accompagnement suffisantes ou faudrait-il les améliorer?
Pour l'instant, il s'agit de les appliquer. Après, on verra si elles suffisent ou s'il en faut de nouvelles.
Propos recueillis par Sylviane Herranz
Les salaires à la loupe
L'étude de l'USS sur les salaires, sortie en décembre 2004, et le calculateur de salaire mis en ligne il y a 17 mois ont suscité un énorme intérêt. Le calculateur a déjà reçu la visite de 350000 internautes, soit 1500 par jour ouvrable! Quant à l'étude sur les salaires, réalisée par le professeur Yves Flückiger, elle a permis de mettre au premier plan la notion de salaire usuel, notion importante pour prouver les cas de sous-enchère abusive et répétée. L'USS se réjouit que cette étude, qui vient d'être réactualisée et étendue à six nouvelles branches, et le calculateur en ligne soient devenus une référence pour de nombreux cantons, services du personnel et organisations de défense des frontaliers. Ces deux outils permettent également de briser le tabou qui entoure les salaires dans notre pays.
Plus d'infos: www.uss.ch
Quelle est l'influence de la libre circulation des personnes sur les salaires? Lundi, l'Union syndicale suisse présentait à la presse les résultats d'une étude de l'Office fédéral de la statistique (OFS) comparant les salaires des travailleurs de l'UE, titulaires d'une autorisation de courte durée, entre octobre 2002 et octobre 2004, soit quelques mois après l'étape du 1er avril 2004. A cette date, le contrôle des salaires et la préférence nationale sont tombés, de même que les contingents pour les séjours de moins de 4 mois. Le 1er juin 2007, les contingents pour les séjours de courte durée - de 4 mois à un an - seront supprimés pour les travailleurs européens, à l'exception de ceux des 10 nouveaux états membres de l'UE.
La libre circulation a conduit à l'arrivée dans notre pays d'un nombre important de travailleurs européens, estimé cette année à 30000, soit environ 1% de l'emploi total en Suisse. L'étude de l'OFS révèle un dumping salarial considérable dans les branches qui ne sont pas couvertes par des conventions collectives de force obligatoire. Ainsi, selon les chiffres de l'OFS, le salaire moyen des paysagistes bénéficiant d'une autorisation de courte durée est passé de 3456 francs à 2570 francs, soit une chute de 25,6%! Dans les services aux entreprises et l'informatique, la baisse est de 10,9%, alors que dans les loisirs, la culture et le sport, elle est de 8,1%. Par contre, dans les secteurs conventionnés étudiés, les salaires ont augmenté, de 4,1% dans la construction et de 8,2% dans l'hôtellerie-restauration où ils passent de 3111 francs à 3365 francs.
Explications avec Daniel Lampart, secrétaire central de l'USS et membre de la commission tripartite nationale.
25% de salaire en moins pour les paysagistes et 10,9% dans les services aux entreprises, c'est énorme... alors que le Seco parle d'un dumping salarial de 2,5%?
Oui, c'est une grave sous-enchère. Le problème est que le Seco ne dispose pas de données pour les paysagistes. Il y a un retard dans l'observation de cette branche. L'USS collecte actuellement des données les concernant afin de pouvoir intervenir au Seco, car ce dernier n'a prévu de le faire que dès la fin juin 2007. Pour contrer cette sous-enchère, l'USS et Unia proposent de rendre obligatoire la partie consacrée aux paysagistes dans la convention nationale du bâtiment.
Les mesures d'accompagnement évoquent la «sous-enchère abusive et répétée». Dans ce cas, le Seco pourrait-il rendre obligatoire cette CCT?
Le Seco ou la commission tripartite nationale en ont le pouvoir. Mais nous devons documenter le cas, prouver qu'il y a sous-enchère abusive et répétée. L'USS essaie de le faire et pour cela nous avons besoin de données, mais il n'est pas sûr que les cantons qui les détiennent nous les fournissent.
Les paysagistes sont-ils les seuls à connaître une sous-enchère abusive?
Il y a différents secteurs où il y a des problèmes, l'agriculture par exemple. Dans ce secteur, il y a actuellement beaucoup de contrôles dans les cantons. Nous espérons qu'à la fin de l'année, le Seco reçoive ces données et puisse agir.
Sous quelle forme?
Les mesures d'accompagnement permettent d'édicter un contrat type pour une branche avec des salaires minimaux ou de rendre obligatoire une CCT. Pour l'agriculture, l'Union suisse des paysans est en train de réfléchir à une éventuelle convention collective qu'elle pourrait signer avec Unia. Un autre secteur est aussi sous contrôle: le nettoyage, surtout en Suisse alémanique où, contrairement à la Suisse romande, il n'existe pas de convention collective de force obligatoire.
Comment expliquer que dans les branches disposant d'une CCT de force obligatoire, les salaires augmentent?
Ce sont des CCT avec un salaire minimum. Elles protègent les salaires et les conditions de travail de tous les travailleurs. Cela veut dire que les mesures d'accompagnement fonctionnent là où existent des CCT de force obligatoire.
L'USS juge-t-elle les mesures d'accompagnement suffisantes ou faudrait-il les améliorer?
Pour l'instant, il s'agit de les appliquer. Après, on verra si elles suffisent ou s'il en faut de nouvelles.
Propos recueillis par Sylviane Herranz
Les salaires à la loupe
L'étude de l'USS sur les salaires, sortie en décembre 2004, et le calculateur de salaire mis en ligne il y a 17 mois ont suscité un énorme intérêt. Le calculateur a déjà reçu la visite de 350000 internautes, soit 1500 par jour ouvrable! Quant à l'étude sur les salaires, réalisée par le professeur Yves Flückiger, elle a permis de mettre au premier plan la notion de salaire usuel, notion importante pour prouver les cas de sous-enchère abusive et répétée. L'USS se réjouit que cette étude, qui vient d'être réactualisée et étendue à six nouvelles branches, et le calculateur en ligne soient devenus une référence pour de nombreux cantons, services du personnel et organisations de défense des frontaliers. Ces deux outils permettent également de briser le tabou qui entoure les salaires dans notre pays.
Plus d'infos: www.uss.ch