Pour la justice genevoise, Uber est bel et bien un employeur
La Chambre administrative de la Cour de justice de Genève rejette le recours d’Uber contre l’interdiction d’exercer une activité de transport de personnes prise par le Canton il y a une année, a annoncé 20 Minutes la semaine dernière. Le tribunal considère que la société étasunienne est bel et bien une exploitante d’une entreprise de transport et, à ce titre, doit se soumettre aux obligations légales qui l’encadrent, en particulier aux dispositions relatives au travail et à la protection sociale des travailleurs, si elle veut continuer à exercer cette activité.
«Ce jugement prouve bien que les Cantons ont les moyens d’agir et de rétablir l’Etat de droit. S’il y a quelques années encore, on pouvait se demander si un canton était en droit d’agir, il n’y a désormais plus d’excuse. Il faut espérer que cette décision servira d’exemple non seulement en Suisse, mais aussi dans d’autres pays, car c’est un peu une première internationale, commente Umberto Bandiera. Ce jugement est d’autant plus important dans une ville comme Genève qui dénombre un millier de chauffeurs d’Uber et d’autres plateformes. Ils ont été durement frappés par la crise et, faute de statut, n’ont pu s’adresser au chômage ni même à l’Hospice général et se sont retrouvés dans une situation d’extrême précarité. J’ai discuté avec certains d’entre eux et ils sont clairement très satisfaits de cette décision. Uber et toutes les sociétés qui ont adopté ce modèle doivent tirer les conséquences de ce jugement et faire en sorte que les chauffeurs soient désormais au bénéfice d’un contrat de travail, d’un salaire et de cotisations sociales payées.»
Uber a la possibilité de recourir au Tribunal fédéral, mais le jugement est exécutoire sur-le-champ. «Rien ne va changer dans l’immédiat, a toutefois mis en garde le bras droit de Mauro Poggia, interrogé par le quotidien gratuit. Nous voulons une décision définitive de la justice et attendons donc de voir si l’entreprise fera recours.» Pour le service Uber Eats, le Canton avait pourtant exigé une mise en conformité immédiate et un jugement définitif est encore attendu du Tribunal administratif fédéral. Avocat de plusieurs sociétés et d’associations de taxis, Me Jacques Roulet a écrit au conseiller d’Etat pour le prévenir que «l’attentisme serait préjudiciable à tous les chauffeurs travaillant à Genève dans le transport de personnes, aux chauffeurs de taxi et aux chauffeurs VTC (pour voiture de transport avec chauffeur, ndlr), y compris aux chauffeurs Uber». Même son de cloche du côté d’Umberto Bandiera et d’Unia: «Je ne comprends pas sur quelle base légale le jugement ne serait pas exécuté. Nous demandons son application immédiate comme cela avait été le cas pour Uber Eats.»
DERNIERE MINUTE: Au moment où ce journal était mis sous presse, lundi, nous apprenions que le jugement de la Cour d’appel du canton de Vaud reconnaissant à un chauffeur d’Uber le statut de salarié est entré en force. Uber a renoncé à recourir. Nous y reviendrons dans notre prochaine édition.