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Le dimanche, c’est congé, point barre!

Nouvel affront au personnel de vente, nouvelle attaque contre ses conditions d’emploi, nouvelle tentative de dérégulation du travail: la majorité bourgeoise du Conseil national a accepté le 12 mars une motion du vice-président du PLR suisse, Philippe Nantermod. La proposition demande une modification de la législation sur le travail afin de permettre l’ouverture dominicale des commerces de proximité. Il s’agirait, plus précisément, de magasins «d’une petite taille, qui n’emploient qu’un nombre limité de collaborateurs et dont l’assortiment est celui d’une épicerie». Une formulation suffisamment vague propre à favoriser une extension massive du travail du dimanche et à entraîner, dans un effet boule de neige, d’autres secteurs d’activité dans cette dérive. Une démarche qui menace de dégrader encore la situation déjà mauvaise des travailleuses et des travailleurs de la branche. Bas salaires, changements de planning de dernière minute et exigences de flexibilisation, plages de travail morcelées, horaires régulièrement remis en cause... font partie du quotidien de nombre d’employés du domaine. Aujourd’hui déjà, des dérogations existent permettant à des enseignes d’ouvrir tardivement sept jours sur sept, comme celles situées dans des gares, les aéroports, les zones touristiques. Les stations-services bénéficient, elles aussi, de cette possibilité. Sans oublier les entreprises familiales qui peuvent également garder leurs portes ouvertes le dimanche si elles emploient des membres de leur famille.

La droite, en dépit des résultats de votations cantonales témoignant le plus souvent de la forte opposition des citoyens d’élargir les horaires des magasins et la brèche des exceptions, ramène encore et encore le sujet sur le tapis. Au mépris de la protection de la santé des employés concernés. Faisant fi des difficultés que ceux-ci rencontrent déjà à concilier vie professionnelle et vie privée. Indifférente à l’absence de compensations, et en particulier d’une convention collective de travail étendue de branche. Et cela alors que le secteur peine à recruter du personnel.

A l’heure où la lutte contre la surconsommation des ressources et le gaspillage devrait servir de boussole, où nous devrions tous prendre en compte les enjeux écologiques et agir en faveur de la durabilité, la question se révèle aussi sociétale. Dans quel monde souhaitons-nous vivre? Désire-t-on vraiment valoriser l’idée de courses non-stop, la vacuité du shopping-loisir? Sommes-nous prêts à supprimer un jour de congé hebdomadaire commun au plus grand nombre? Préférons-nous défendre la permanence du travail au détriment de liens sociaux et du bien-être? Les arguments économiques ne tiennent pas davantage la route. Le pouvoir d’achat des consommateurs n’est pas extensible quand bien même tout et tout le temps serait à portée. Les horaires d’ouverture n’influent pas sur la masse des courses modulée par le revenu. Les chantres de la libéralisation tous azimuts de la Chambre du peuple n’ont pourtant pas hésité à prendre le contre-pied. Et espèrent capitaliser sur les mauvais aspects du télétravail piégeant insidieusement une classe laborieuse dans ses droits à la déconnexion et à son temps libre. 

Dans ce contexte, le Conseil des Etats, qui devra à son tour se prononcer sur la motion, serait bien inspiré de changer de cap. Et de respecter la volonté populaire qui s’est encore exprimée en Valais, le 3 mars dernier, contre un allongement des horaires d’ouverture dans ce canton. Et cela après que Berne et Zoug – pour ne citer que des exemples récents – ont fait le même choix. Quant au Valaisan Philippe Nantermod, il devrait tirer les leçons de la position claire et sans appel de ses concitoyens. Le dimanche, c’est congé. Point barre.