Vétérinaire à la retraite, Olivier Glardon reste actif dans plusieurs domaines en lien avec sa profession. Question d’engagement et de passion
A poils, à plumes ou à écailles. De rente ou domestiques. D’ici ou d’ailleurs. Les animaux ont balisé l’existence d’Olivier Glardon. Et continuent à enchanter son quotidien. Ce vétérinaire de 67 ans, à la retraite, en couple et père de quatre enfants, partage son domicile avec un labrador, deux chats, une couleuvre des blés et des Pogonas, une sorte d’iguane. Régulièrement, il travaille pour le compte du Papiliorama à Chiètres, qui abrite des papillons et différentes espèces d’oiseaux, de poissons ou de mammifères comme le Coendou. Un rongeur ressemblant à un porc-épic qu’il affectionne particulièrement, «avec son gros nez, sa queue qui lui permet de se suspendre aux branches et son calme». Le sexagénaire intervient également comme consultant dans les domaines de la cardiologie, l’acupuncture et le comportementalisme au sein du cabinet qu’il a créé à Yverdon en 1988. Il s’occupe aussi de chevaux de particuliers et, ponctuellement, offre gratuitement ses services pour soigner les «compagnons de galère» de gens souffrant d’addictions dans le cadre de l’association «Zone bleue» qui leur vient en aide. «Ces personnes, note avec beaucoup d’empathie Olivier Glardon, se montrent plus soucieuses de la bonne santé de leur animal que de la leur. Elles nous manifestent une grande reconnaissance.»
Esprit d’ouverture
A ces activités s’ajoute le mandat de président de la Société des vétérinaires suisses. Une fonction que le retraité occupe depuis le 1er janvier 2019 à 50%, mais qui représente plutôt un engagement à 70% pour ce passionné soucieux de bien faire les choses et œuvrant à une cohabitation plus harmonieuse entre les animaux et les humains dans la société. «Les hommes ont dépassé les limites. Par rapport à la nature. Au vivant. Nous devons changer notre comportement et nous montrer plus raisonnables», déclare Olivier Glardon qui, résolument optimiste, veut encore croire à la bonté des êtres. Et se définit davantage comme un humaniste qu’un scientifique. Dans ce sens, il a une forte notion de l’engagement. Une qualité doublée d’un esprit d’ouverture qui l’a conduit à parcourir le monde. Saisissant des opportunités professionnelles ou poussé par son intérêt pour l’autre, sa soif de rencontres. Le vétérinaire, aussi connu sur les ondes de la RTS pour ses conseils avisés et ses interventions sur des thèmes particuliers, s’est ainsi également formé à Paris, aux Etats-Unis et en Chine. Dans ce dernier pays, en prolongement de sa thèse, il s’est familiarisé en 1981 avec la pratique de l’acupuncture. Il se souvient encore du poids du régime qui a téléguidé la visite et ses échanges en catimini avec certains de ses interlocuteurs.
«Nous nous cachions dans une chambre pour parler de littérature française. Même des auteurs comme Emile Zola étaient interdits», sourit Olivier Glardon, qualifiant l’expérience dans l’Empire du Milieu de très enrichissante. En 1979, dans l’Etat américain de Géorgie, le Vaudois fait l’apprentissage du racisme ouvert: «Que des vétérinaires blancs!» Il rentrera de Turquie particulièrement ému par sa population pour laquelle il ressentira un véritable coup de cœur. L’Europe, ce bourlingueur l’a découverte en auto-stop, toujours animé par cette curiosité pour ce voisin habitant ailleurs...
Suicides répandus
Tout au long de sa carrière, Olivier Glardon va développer ses compétences, travaillant avec les grands puis les petits animaux, œuvrant au sein de l’hôpital de Berne, puis de celui de Zurich. Il évoque la nécessité de communiquer avec ses protégés, de chercher à verbaliser leur ressenti. Il s’agit aussi de se montrer réceptif aux vibrations et à l’écoute de ses sensations, émotions. En mode expérimental... Touché par la cause défendue par les antispécistes sans la cautionner pour autant, cet homme sensible plaide plutôt en faveur d’une réduction de la consommation de viande. Et, jamais, ne banalise l’euthanasie. «Il s’agit toujours d’un moment spécial. Le geste est particulièrement lourd quand on se trouve en porte-à-faux avec la décision du propriétaire. On se trouve alors dans une zone d’inconfort qui frise le stress. On fait son travail, mais on traverse ensuite de grands moments de solitude.» Et le vétérinaire de préciser que la profession figure parmi celles où l’on dénombre le plus de suicides. Cette situation mériterait, estime-t-il, la mise sur pied d’un accompagnement psychologique. Pas de quoi toutefois générer de regrets dans le choix de son métier qui plante ses racines dans l’enfance.
L’importance des liens
Gamin, le Vaudois consacre en effet ses vacances à travailler dans une ferme à Maracon et s’occupe de vaches et de chevaux. «J’ai su alors ce que je voulais faire de ma vie. Si j’en avais été empêché, ça aurait été une catastrophe», affirme Olivier Glardon, confiant encore que les animaux lui ont beaucoup apporté. «Ils m’ont appris à relativiser beaucoup de choses. A différencier les problèmes existentiels des autres. Ils ont été un révélateur de l’importance des liens mutuels. Et de l’évolution de la société quant à la place qu’elle leur accorde.» Heureux dans son existence, l’homme trouve encore matière à s’épanouir dans ses loisirs. Comme la brocante et la réparation d’anciens meubles. «J’aime les vieux objets, ceux qui ont une âme, et l’idée de prolonger leur vie», souligne le bricoleur, qui pratique aussi le tir à l’arc japonais, le kyudo. Un art martial mâtiné de zen, basé sur la maîtrise intuitive du geste parfait, «une manifestation de la vie autre que celle perçue par la science». Révolté par la maltraitance animale et la mauvaise foi, Olivier Glardon veut encore rêver à une société qui ne se fonde pas seulement sur le principe «du pain et des jeux». «Un monde plus objectif, plus humaniste et plus écologique, sans tomber dans le dogme.»