L’hôtellerie-restauration crie famine
Face à la situation dramatique dans laquelle se trouve la branche, les faîtières d’employeurs et les syndicats exigent des mesures de soutien immédiates
«Nous réclamons au Conseil fédéral et au Parlement une mise en place immédiate de mesures de soutien à l’hôtellerie-restauration. Dans le cas contraire, le secteur se verra confronté à un nombre sans précédent de mises au chômage et de faillites», prévient Vania Alleva, la présidente d’Unia. Le 3 novembre, les faîtières d’employeurs de l’hôtellerie-restauration et les syndicats Unia et Syna se sont rassemblés pour une action rare et forte, une prise de position et des revendications communes face à la «situation dramatique» dans laquelle se retrouvent les cafés, restaurants et hôtels. Selon les partenaires sociaux, deux établissements sur cinq envisagent de mettre la clé sous la porte dans les prochains mois et 100000 emplois sont directement menacés. Le reconfinement en cours ne peut qu’alourdir cette tendance.
GastroSuisse, HotellerieSuisse et Swiss Catering Association, côté employeurs, Hotel & Gastro Union, Syna et Unia, côté employés, réclament d’abord que le Conseil fédéral promulgue rapidement la réglementation pour les cas de rigueur. Il s’agit, selon la Loi Covid-19 entrée en vigueur à la fin du mois de septembre, d’un soutien aux entreprises particulièrement touchées par les conséquences de l’épidémie. Le message semble avoir été entendu par le Conseil fédéral, qui a mis en consultation le 4 novembre une nouvelle ordonnance. La Confédération prendra en charge la moitié des dépenses incombant aux cantons au titre des cas de rigueur, ce qui devrait les inciter à intervenir.
La deuxième demande de l’hôtellerie-restauration concerne les exonérations de loyer. Si jusqu’ici le Conseil fédéral s’est montré défavorable à une mesure en ce domaine, fin octobre, le Conseil national a, d’une courte majorité, décidé d’entrer en matière sur un projet de loi qui ferait participer les bailleurs commerciaux à l’effort qu’exige la situation. La balle est maintenant dans les mains du Parlement, qui devra trouver une majorité entre les deux Chambres.
RHT indemnisée à 100%
La troisième requête des partenaires sociaux concerne l’extension du chômage partiel. Il est demandé que l’indemnité de réduction de l’horaire de travail (RHT) soit compensée à hauteur de 100% du salaire et non de seulement 80%. «Le point concernant l’extension du chômage partiel nous tient très à cœur et il est assez important que les employeurs le soutiennent aussi. Ils reconnaissent ainsi le gros problème que constitue pour leurs collaborateurs l’imputation de 20% de salaires déjà modestes. Surtout qu’il ne s’agit plus de tenir un mois ou deux, le chômage partiel risque de se prolonger et les salariés de se tourner vers l’aide sociale. Il est tout de même préférable que la caisse de chômage supplée à la perte de salaire plutôt que d’envoyer des travailleurs à l’aide sociale», indique Mauro Moretto, responsable national de l’hôtellerie-restauration chez Unia. La revendication n’est pas si utopique puisque le Canton de Vaud a annoncé la semaine dernière qu’il complétera l’indemnisation de 10% au mois de novembre des employés des entreprises dont il a ordonné la fermeture.
«Nous demandons aussi que l’indemnité couvre toutes les composantes du salaire, comme les indemnités de vacances et les jours fériés, et tous les types de contrats, soit également le travail à durée limitée et sur appel. La branche compte en effet un grand nombre d’emplois à durée limitée, par exemple en saison dans les stations touristiques», explique le responsable syndical. Un certain nombre de mesures extraordinaires, comme l’extension du groupe des ayants droit à la RHT, a malheureusement pris fin au 1er septembre. Les procédures simplifiées d’annonce et de décompte de RHT sont, elles, maintenues jusqu’à 31 décembre, mais l’hôtellerie-restauration veut les voir appliquer au moins jusqu’à fin 2021.
«Nous sommes dans l’urgence d’agir et nous espérons que notre appel lancé en commun avec les employeurs renforce notre message et la prise de conscience, conclut Mauro Moretto. C’est aussi un message à l’attention des élus et des idéologues des partis bourgeois qui vont à l’encontre des intérêts non seulement des salariés, mais aussi des employeurs, si l’on prend la question de l’exonération des loyers, sur laquelle bloquent le PLR et l’UDC.»