En Arabie saoudite, la liberté d’expression ne fait visiblement pas partie des traditions. Mohammed al-Qahtani ne dira pas le contraire: après avoir purgé une peine de 10 ans de prison, il est encore derrière les barreaux pour son activité en faveur des droits humains. L’enseignant à la retraite Mohammed bin Nasser al-Ghamdi a, lui, été condamné à mort pour avoir critiqué les autorités sur X alors qu’il n’avait que...dix followers. Salma al-Shehab, doctorante et mère de deux enfants, purge une peine de 27 ans de prison pour avoir défendu les droits des femmes sur les réseaux sociaux. Tout comme Manahel al-Otaibi, entraîneuse de fitness de 29 ans, qui après avoir passé un an en prison, a disparu. Ces noms, mis en lumière par Amnesty International, ne sont que la pointe de l’iceberg. «Critiquer le Gouvernement saoudien, c'est risquer gros. Les autorités saoudiennes sont sans pitié lorsqu'il s'agit de faire taire les voix critiques», commente l’ONG, dans un rapport qu’elle a récemment publié.
Ces derniers temps, l’Arabie saoudite a fait parler d’elle pour tout un tas d’autres raisons. Les centaines de millions de dollars injectés dans le football, qui ont attiré des stars internationales du ballon rond comme Cristiano Ronaldo, Neymar ou Karim Benzema pour n’en citer que quelques-unes. Mais aussi le fait que le royaume wahhabite organisera les Jeux asiatiques d’hiver (oui, on a bien dit d’hiver) à Neom en 2029, et peut-être bien la Coupe du monde de foot en 2034. A plus de 500 milliards de dollars le projet, on arrivera bien à semer un peu de neige artificielle ici et là. Sans oublier son architecture futuriste proche de celle des Emirats arabes. En fait, tout cela participe d’une stratégie très bien ficelée par le prince héritier Mohammed Ben Salmane (rappelons que l’Arabie saoudite est une monarchie absolue islamique dirigée par la même famille depuis presque un siècle). Ce dernier a dévoilé en 2016 «Vision 2030», qui tend à «créer une nation diversifiée, innovante et à la pointe du progrès» via des investissements massifs dans des domaines comme les nouvelles technologies, le tourisme, mais aussi les sports. Ben oui, en tant que premier exportateur de pétrole brut du monde, il ne fallait pas s’attendre à un plan climat!
L’objectif est clair: redorer l’image du pays et attirer les foules. «A grand renfort de paillettes et de glamour, le prince a mis en place toute une machinerie de relations publiques pour masquer la terrible situation des droits humains dans le pays», dénonce Amnesty International, qui appelle les autorités saoudiennes à mettre fin à cette politique de tolérance zéro et à libérer toutes les personnes injustement détenues pour avoir exprimé pacifiquement leur opinion. Une pétition* en ligne est aussi disponible pour agir à son échelle. Pour que le progrès soit synonyme de démocratie, de liberté et de droits.