Le comité de soutien aux grévistes a mené une action devant une succursale genevoise du géant orange
«Migros Genève profite de l’exploitation des travailleurs et s’en met plein les poches!» Jeudi dernier, devant la Migros de la rue de Carouge, Pablo Cruchon n’y est pas allé avec le dos de la cuillère. Réunissant des syndicats, des partis et des organisations progressistes, le comité genevois de soutien aux grévistes de Smood, dont le député d’Ensemble à gauche est l’une des chevilles ouvrières, organisait une action pour dénoncer la responsabilité du géant orange.
Migros Genève est en effet le principal partenaire de la société de livraison de repas et de courses. La coopérative y a investi 16,3 millions, en détient 46% des actions et trois des cinq sièges du conseil d’administration. Interpellés par le comité de soutien, le directeur et le président de Migros Genève s’étaient engagés, dans un courrier du 4 mars, à ce qu’une «grande partie des recommandations émises par la CRCT», la Chambre genevoise des relations collectives de travail, soient mises en place. Or, on le sait, la Convention collective de travail (CCT) Smood-Syndicom signée dans le dos des grévistes est bien éloignée des directives de la CRCT. «C’est une CCT de la misère», a résumé Marc, un livreur présent à l’action. Interrogé par L’Evénement syndical, Migros Genève y voit, au contraire, une «base légale, juste et équitable» signée «avec un partenaire social de renom et de référence dans le secteur de la logistique».
Quelle que soit l’interprétation, la CCT ne s’applique pas aux employés de Simple Pay, qui assurent ou assuraient encore récemment une grande partie des livraisons dans la région lémanique en étant payés à la minute. Se retranchant bien facilement derrière sa qualité d’«actionnaire minoritaire», la coopérative refuse de se prononcer sur cette question, nous renvoyant à Smood, qui ne nous répond pas.
Contacté, le porte-parole de Syndicom nous fait remarquer que la durée minimale de travail hebdomadaire de 4 heures, inscrite dans les «Déclarations additionnelles à la CCT», s’appliquera aussi aux collaborateurs des sociétés effectuant des livraisons pour Smood. L’entreprise a jusqu’au 31 décembre pour appliquer cette disposition, qui ne devrait pas empêcher de continuer à rémunérer à la tâche.
Jessica, une autre livreuse présente lors de l’action, assure n’avoir gagné que 247 francs au mois de février «pour trois semaines de travail, 8 heures par jour». «Dès qu’on a livré le sac au client, nous ne sommes plus payés. Ensuite, on peut attendre des heures une commande dans la voiture sans garantie de pouvoir travailler», témoigne cette jeune maman.
Michel Guillot, le secrétaire régional de Syndicom qui a participé aux négociations pour la CCT, se dit conscient du problème, mais il estime que ce statut est appelé à disparaître, d’ailleurs, «une quarantaine d’employés de Simple Pay ont été engagés directement par Smood».
Justement, trois d’entre eux se sont invités à l’action. «Nous n’avons plus besoin d’Unia», répètent-ils en chœur, comme s’ils avaient appris une leçon. «Nous pouvons travailler quatre heures de suite et nous sommes payés», se félicite l’un d’eux, qui est passé de Simple Pay à Smood il y a deux mois. Le jeune homme reconnaît avoir été mandaté par son employeur pour être présent sur les lieux, alors que l’un de ses collègues filme les participants…