Ceva: Non unanime au travail du samedi
Faire travailler les ouvriers le samedi pour rattraper le retard du chantier? Syndicats et patrons ont refusé en bloc la demande de dérogation insufflée par l’Etat
Alors que le Léman Express devrait être sur les rails à la fin de l’année, certains retards pourraient ralentir sa mise en service, notamment celui du parking de la halte de Chêne-Bourg. La faute à qui? Pas aux entreprises, mais en partie à de nombreuses oppositions formulées par des riverains. L’idée est donc de mettre les bouchées doubles. Pour ce faire, l’Etat, à travers la Fondation des parkings, a prié l’entreprise concernée de faire une demande de dérogation auprès de la Commission paritaire du gros œuvre ainsi que de celle de la métallurgie du bâtiment pour qu’elle puisse œuvrer tous les samedis du 9 mars au 13 juillet. En effet, dans un courrier daté du 18 février, le directeur de l’Office cantonal des transports «prend acte» de la décision de l’entreprise «d’augmenter les effectifs travaillant sur le chantier», mais qualifie la mesure d’«insuffisante». Il se rallie à la proposition de la Fondation des parkings de «solliciter», par l’intermédiaire de l’entreprise de construction, «une dérogation permettant de travailler les samedis».
La réponse des commissions paritaires, composées des syndicats et des employeurs du secteur, est sans appel: c’est non, à l’unanimité! Les 19 samedis qui s’étalent sur cette période ne seront donc pas travaillés. «Cette requête n’a pas été motivée pour des raisons de sécurité sur les chantiers mais juste pour des retards, et il est hors de question de les combler au détriment de la santé et de la vie sociale des travailleurs», réagit Yves Mugny, secrétaire syndical responsable du secteur du bâtiment à Unia. «Les partenaires sociaux ne sont pas tombés dans le piège, et nous saluons la clairvoyance du patronat sur ce dossier.»
Et José Sebastiao, responsable de la branche de la construction à Unia, de rajouter: «Ce sont des métiers lourds et pénibles. On demande aux employés de travailler toujours plus, et toujours plus vite. Ils sont mis sous pression avec pour conséquence un risque accru d’accidents sur les chantiers.»
Le chantier du Ceva est sensible. Déjà en 2017, l’Etat avait fait une demande de dérogation à la Loi sur le travail pour autoriser le travail de nuit. Après avoir fait recours, les syndicats avaient obtenu gain de cause auprès du Secrétariat d’Etat à l’économie (Seco). «Après le travail de nuit, l’Etat genevois s’attaque aux dispositifs conventionnels, toujours dans le seul but d’accélérer les travaux, dénonce Yves Mugny. Manifestement, quand il est maître d’ouvrage et que des enjeux financiers sont sur la table, l’Etat se soucie très peu de la protection et de la santé des travailleurs. C’est pourquoi nous dénonçons cette attitude et rappelons Serge Dal Busco, ministre de tutelle, à ses obligations: les règles doivent être les mêmes pour tous.»