«Un bon moyen de se vider la tête»
«C’est une occasion de mettre les mains dans la terre, de tester soi-même le procédé. Une démarche collaborative très intéressante.» Ingénieure spécialisée dans les questions de durabilité, Verena Pierret n’a pas hésité à se glisser dans la peau d’une ouvrière du bâtiment. «J’aime l’effort. On devrait disposer de davantage de possibilités d’équilibrer le mental et le physique», ajoute la native d’Allemagne de 39 ans, tout en nettoyant le moule en vue d’un prochain usage, avant de nuancer ses propos. «Le temps, ici, passe quand même moins vite qu’au bureau. Reste que ce travail se révèle moins stressant et permet de se vider la tête.» La trentenaire précise encore se trouver en adéquation avec le concept écologique de la maison de quartier. «Il correspond à mes convictions. Nous devons prendre davantage en considération l’impact des constructions sur l’environnement, limiter les gaz à effet de serre. Je suis persuadée que ce type de marché tenant compte de ces paramètres va se développer.» Mais de là à envisager la fin du béton, il y a un monde de ciment solide... «Ce n’est pas le but. Chaque matériau a sa place. Mais il faut réfléchir dans quelle quantité et à la manière dont on bâtit, à la durée de vie d’une construction», insiste la bénévole, qui sera néanmoins rémunérée par son bureau. «Je participe à ce projet sur mes journées de formation. Dans tous les cas, travailler gratuitement plus d’un jour ne serait pas normal...»
«Le béton, la victime parfaite, mais...»
Alexandre Berset s’est lui aussi laissé tenter par l’expérience. «C’est une opportunité de travailler la terre, une rare occasion de découvrir une méthode oubliée.» L’aspect participatif du projet séduit également l’homme convaincu que la démarche contribuera à «faire vivre l’esprit du lieu». Sur l’avenir du béton, le maçon d’un jour s’oppose «à tout dogme». «Il faut l’utiliser là où il se révèle performant. Opter aussi pour des solutions hybrides. L’excavation de terre sur le lieu même de la construction présente un bon bilan carbone, mais le système se révèle quatre fois plus coûteux.» Travaillant en binôme avec Alexandre, Nicolas de Courten intervient à son tour: «Il faut comparer ce qui est comparable. Le béton sert de victime parfaite. Mais si on opte par exemple pour le bois, on va déforester la planète entière. Il faut choisir le matériau le plus adéquat à l’endroit.» Son collègue rappelle également le prix élevé de la main-d’œuvre employée à des démarches différentes comme celles poursuivies à la maison de quartier. Sans oublier le manque de compétences en la matière. Mais il concède: «Les entreprises en maçonnerie doivent se diversifier.» Dans tous les cas, renchérit Nicolas de Courten, «il est nécessaire que ces types de projets soient testés. Celui des Plaines-du-Loup offre une bonne opportunité. C’est le système le plus vertueux en termes d’émissions grises.»