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Cinq milliards d’économies, le programme thatchérien de KKS

pancarte avec le texte: les riches toujours plus riches, les pauvres toujours plus pauvres.
© Pierre Noverraz/Archives

Pour la gauche et les syndicats, le programme d'économies du groupe d'experts mandaté par le Conseil fédéral constitue une «attaque frontale contre la Suisse solidaire».

Le rapport mandaté par le Conseil fédéral préconisant des coupes dans le social, les transports publics et l’environnement provoque une levée de boucliers à gauche et dans les syndicats.

Soixante mesures pour 4 à 5 milliards de francs d'économies, c’est le programme – que l’on pourrait qualifier par son radicalisme de thatchérien – élaboré par cinq «experts» conduit par l’ancien responsable de l’Administration fédérales des finances, Serge Gaillard. Sur mandat du Conseil fédéral, ce groupe vient de procéder à un réexamen des tâches et des subventions de la Confédération. Si l’armée et l’agriculture doivent rester des domaines réservés, cette commission préconise des coupes dans l’AVS, dans la réduction des primes maladie, l’accueil extrafamilial, les prestations transitoires, les subventions à l’assainissement des bâtiments, les transports publics, la culture ou encore l’encouragement indirect à la presse. Pour près de 5 milliards donc, ce qui n’est pas rien pour un budget de 85 milliards. Proposition néolibérale encore, celle de lier désormais les charges en personnel de l’administration fédérale non plus en fonction des tâches, mais de l’inflation. 

Ce rapport Gaillard provoque une levée de boucliers à gauche et dans les syndicats. Pour l’Union syndicale suisse (USS), il s’agit d’une mauvaise réponse à une mauvaise question, les déficits structurels de la Confédération étant bien moins élevés que ne le prétend la conseillère fédérale Karin Keller-Sutter (KKS). Selon le plan financier établi pour les exercices 2026 à 2028 par le Département des finances (DFF), des déficits pouvant atteindre 2,6 milliards sont à prévoir. Or, comme le rappelle l’USS dans une prise de position, le frein à l’endettement génère des excédents compris entre 1 et 1,5 milliard de francs par an, auxquels s’ajoute la sous-estimation régulière des recettes par le DFF. La Confédération, les cantons et les communes ont amassé, en outre, des fonds propres excédant 100 milliards. «En parlant de freiner la croissance des contributions de la Confédération à l’AVS, le groupe d’experts vise en fait à accroître la pression aux réformes sur cette assurance sociale, afin que l’âge de la retraite et les cotisations soient revus à la hausse», dénonce l’USS.

Défendre la sécurité sociale

La faîtière syndicale prévient qu’elle s’opposera à toute détérioration de la sécurité sociale et, en premier lieu, de la rente-pont. «La suppression préconisée des prestations transitoires est inacceptable, alors que la situation des travailleuses et des travailleurs âgés n’a fait qu’empirer. Il faudrait au contraire les améliorer, aujourd’hui où les conditions d’octroi sont bien trop restrictives.» Les syndicats contesteront aussi la suppression du modeste encouragement indirect à la presse, «car il n’y a pas de réelle démocratie sans un paysage médiatique diversifié», et les coupes dans les transports publics, qui aboutiraient «à une détérioration de l’offre et provoqueraient à court terme un renchérissement massif du prix des titres de transport, grevant encore plus le budget des ménages». Le Parti socialiste, pour sa part, évoque dans un communiqué une «attaque frontale contre la Suisse solidaire». Même son de cloche du côté des Verts, qui pointe un «rapport sur commande».

Pour la gauche et les syndicats, l’alternative réside dans la réforme du frein à l’endettement et dans l’introduction de nouvelles recettes fiscales. «Au lieu de procéder à des coupes idéologiques sur le dos de la population, les entreprises et les milliardaires doivent de nouveau contribuer davantage. Le frein à l’endettement, qui est utilisé de manière restrictive et qui n’est pas remis en cause dans le rapport, doit enfin être interprété de manière intelligente. Si les dettes sont stabilisées par rapport à la croissance économique au lieu d’être réduites, nous pourrons maintenir le taux d’endettement à un niveau bas tout en réalisant les investissements nécessaires pour l’avenir», souligne Samuel Bendahan, économiste et coprésident du Groupe socialiste aux Chambres fédérales. Le rapport Gaillard a été approuvé par le Conseil fédéral. Une procédure de consultation devrait être lancée en janvier 2025.

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