Entre victoire et défaite pour les salariés genevois
Votations en demi-teinte à Genève. Les subsides pour les primes maladie seront augmentés et la Caisse de pension du personnel de l’Etat assainie. En revanche, le personnel de la vente verra ses conditions de travail se dégrader
Week-end de votations aux enjeux importants pour les salariés genevois. Mais les résultats sont mitigés, les victoires se mêlant à une péjoration des conditions de travail dans la vente. Le succès le plus éclatant a été remporté par la hausse des aides au paiement de l’assurance maladie. L’initiative de la gauche pour le plafonnement des primes à 10% du revenu a recueilli 50,9% des voix. Elle a cependant dû céder le pas au contre-projet du Conseil d’Etat, moins ambitieux, qui l’a emporté au final avec un score historique de 75,4% des voix. Ce plébiscite permettra d’augmenter le nombre de bénéficiaires de subsides de 53000 à 120000 personnes dès le 1er janvier 2020. L’initiative proposait une aide estimée à quelque 400 millions, alors que le contre-projet du Conseil d’Etat allouera une somme de 186 millions. Pour le gouvernement, ce geste représentait une contrepartie à la réforme cantonale de la fiscalité des entreprises. Cette dernière abaissera le taux d’imposition sur le bénéfice de 24,2% à 13,99%, alors que les multinationales verront leur taux actuel de 11,6% s’aligner sur le nouveau taux. Gauche et syndicats étaient opposés à cette réforme qui engendrera d’importantes pertes fiscales. Elle a néanmoins été approuvée par 58,2% des votants, alors que son pendant fédéral, la Loi relative à la réforme fiscale et au financement de l’AVS (RFFA), obtenait 62,1% des suffrages genevois et 66,4% des voix au niveau suisse.
Autre victoire à relever à Genève: plus de 52% des votants ont adopté la loi présentée par la gauche pour l’assainissement de la caisse de pension du personnel de la fonction publique. Ce projet de loi l’a emporté sur celui du Conseil d’Etat prévoyant de passer au système de primauté des cotisations. La loi adoptée permettra de recapitaliser la Caisse de prévoyance de l’Etat de Genève à hauteur d’environ 4,4 milliards de francs, sans baisser les prestations et en favorisant la construction de logements à loyer abordable. Ce qui réjouit l’Asloca, association des locataires ayant soutenu le projet.
Ouvertures des magasins trois dimanches
Le scrutin du 19 mai est moins heureux pour le personnel de la vente. Les votants ont adopté, par 52,5% des voix, la loi «expérimentale» autorisant l’ouverture des commerces trois dimanches par année, cela en contradiction avec le vote de 2016 permettant une telle extension seulement en cas de signature d’une convention collective de travail (CCT) offrant des compensations à cette dérégulation. Une CCT devant être négociée par les syndicats actifs dans la vente à Genève, Unia et Sit, et non, comme cela a été le cas, avec une association inexistante dans le secteur. Bien que la loi adoptée dimanche soit temporaire et qu’elle doive faire l’objet, d’ici au 31 décembre 2020, d’une étude sur ses effets en matière de chiffres d’affaires et d’emplois, il s’agit-là d’une «victoire à l’usure pour les milieux patronaux», notent les syndicats Unia et Sit, engagés dans le comité unitaire contre la loi. Une victoire «menée avec les arguments catastrophistes habituels sur la situation du tourisme d’achat et de belles promesses de création d’emploi», relève le comité, rappelant qu’à deux reprises, la population s’était prononcée en faveur de meilleures conditions de travail pour les vendeuses et vendeurs. Les syndicats et le personnel revendiquent des améliorations en matière de jours de congé fixes, de samedis libres et de plannings annoncés plus de deux semaines à l’avance. Dans le cadre de la consultation sur les effets des ouvertures dominicales, ils veilleront à ce que des données claires soient fournies, en particulier sur les chiffres d’affaires des commerces.
Nouvelle bataille en perspective
Les syndicats avertissent également qu’une nouvelle bataille s’annonce ces prochains mois. Le Grand Conseil étant appelé à se prononcer sur un projet prévoyant l’ouverture des magasins tous les jours, du lundi au samedi, jusqu’à 20 heures… «Nous poursuivrons notre combat avec le personnel de vente contre toute tentative de déréglementer les horaires sans contrepartie et pour l’amélioration des conditions de travail du secteur», notent les syndicats, appelant le patronat à entendre les 47% de votants ayant refusé la loi, et l’enjoignant à négocier une nouvelle CCT avec les syndicats représentatifs du secteur.