Témoignages
Riham, Erythréenne, 44 ans: «Bien plus que des mots»
«Ces robes s’inspirent des coutumes de deux ethnies de mon pays. Comme, par exemple, du canton du Valais et l’autre de Vaud», image Riham en montrant fièrement ses créations, l’une aux motifs géométriques colorés, l’autre blanche. Mère de six enfants, la réfugiée ne manque pas d’expérience, elle qui travaillait déjà dans sa patrie comme styliste-modéliste. «J’ai étudié six ans à Asmara dans une école italienne. La méthode était identique à celle d’ici. J’ai obtenu mon diplôme en 2005», précise l’Erythréenne, autrefois propriétaire avec son mari d’une grande entreprise d’import-export de textiles. «Je créais des vêtements, costumes, du linge de maison. Je faisais également de la broderie. Le Gouvernement nous a tout pris. Mon époux a été emprisonné. Il est décédé. J’ai tout perdu», raconte Riham soulignant encore les dangers auxquels elle a été confrontée avant d’arriver en octobre 2011 dans nos frontières. «Ce projet m’aide beaucoup à m’intégrer. Je suis très contente. Pourvu qu’il dure», poursuit la quadragénaire qui a par ailleurs travaillé comme couturière bénévole à l’Eper, pour l’atelier «Femmes et migrations». Et rêve, à terme, d’une activité à 100%: «Je souhaite gagner ma vie, être autonome, les enfants ont grandi...» Dans l’intervalle, celle qui relève adorer le bleu, note encore, tout sourire: «Amitiés à tisser m’a tendu la main. Moralement aussi. On travaille ensemble. Le nom de l’association est bien plus que des mots.»
Habibullah, Afghan, 28 ans: «Ce projet m’aide beaucoup»
Si la couture est le plus souvent pratiquée par des femmes dans nos frontières, ce n’est pas le cas dans la patrie de Habibullah, arrivé en Suisse en 2015 de Kunduz, en Afghanistan. «Chez moi, beaucoup d’hommes travaillent dans ce domaine. J’ai appris le métier avec mon oncle, dans son atelier. Puis, je suis devenu indépendant. Je confectionnais surtout des vêtements pour des femmes, mais aussi du linge de maison, des rideaux, des couvre-lits, etc.» Des méthodes différentes de celles suisses? «Pas vraiment. Il s’agit toujours de couture. Mais, ici, les tissus coûtent plus cher. Quant à l’influence de mes origines dans mes créations actuelles, elle s’exprime surtout dans les décorations à travers l’usage, par exemple, de rubans», relève Habibullah qui travaille également à 35% dans un autre atelier à Lausanne où il s’occupe alors uniquement des retouches. «Le projet Amitiés à tisser m’aide beaucoup. J’espère qu’il continuera», poursuit le bénéficiaire qui rêverait, à terme, d’avoir son propre commerce et des employés. «Mais ce n’est pas simple», note le jeune homme mentionnant, parmi les plus grosses difficultés rencontrées en Suisse, l’administration. «En Afghanistan, on a davantage de liberté à ce niveau-là. Ici, il y a beaucoup de papiers. J’ai quatre classeurs chez moi. Compliqué de comprendre comment ça marche. Heureusement que ma mère adoptive m’aide», relève encore le jeune homme avant de montrer une robe mi-longue, manches courtes, de sa confection. «Mais, pour ma femme, je lui préfèrerai un manteau, plus proche de ma culture.»