Aller au contenu principal
Menu

Thèmes

Rubriques

abonnement

L’AVS, bien plus avantageuse que le 3e pilier

Remise de l'initiative pour une 13e rente AVS.
© Olivier Vogelsang

L’Union syndicale préconise de renforcer l’AVS, misant sur l’initiative populaire fédérale pour une 13e rente qu’elle a déposée fin mai à la Chancellerie.

La faîtière des syndicats a réalisé une étude comparative des coûts et des prestations de l’AVS et de ceux de la prévoyance privée. Les résultats sont imparables et appellent à un renforcement du 1er pilier

Haro sur le 3e pilier! Alors que les assureurs et les banques redoublent d’efforts publicitaires pour attirer des souscripteurs à un 3e pilier, soutenus en cela par des élus de droite qui proposent d’augmenter les possibilités de déduction fiscale dans ce pilier (voir encadré), l’Union syndicale suisse a présenté une étude sur les avantages de l’AVS.

Cette recherche montre en quoi notre assurance sociale permet aux jeunes salariés d’aujourd’hui de cotiser beaucoup moins pour toucher la même rente que s’ils disposaient uniquement d’une prévoyance privée telle que celle du 3e pilier. Rappelons que le système des retraites en Suisse repose sur deux piliers obligatoires: l’AVS (1er) et la LPP (prévoyance professionnelle constituant le 2e pilier); et sur un 3e pilier facultatif. Ce dernier est une assurance privée individuelle permettant à ceux qui en ont les moyens d’épargner afin de compléter leur revenu au moment de la retraite.

Hausses de cotisations énormes pour les jeunes actifs

Sur la base des conditions de travail actuelles de jeunes ayant cotisé pour la première fois en 2019 pour les hommes et en 2020 pour les femmes, à l’âge de 21 ans, l’USS a comparé ce que ces salariés devraient payer à l’AVS ou à un 3e pilier durant toute leur vie professionnelle pour obtenir une rente identique. Le résultat est sans appel.

Un vendeur assuré uniquement de manière privée payerait 488 francs de cotisations supplémentaires par mois, ou 257886 francs de plus durant toute sa carrière, pour toucher l’équivalent d’une rente AVS. Une assistante en soins devrait, elle, débourser 571 francs de plus (294580 francs au total). Un constructeur de routes 432 francs supplémentaires tous les mois (228198 francs au total). Même des professionnels au revenu confortable, comme une médecin-cheffe, auraient à payer davantage, soit 475 francs de plus par mois pour cette doctoresse (245000 francs au total).

L’étude montre qu’une femme seule gagnant un revenu médian verse quelque 300000 francs au total à l’AVS pour toucher une rente du 1er pilier. Pour percevoir la même rente selon le seul système de prévoyance privée, elle devrait débourser 250000 francs de plus, soit environ 550000 francs (plus de 80%). Pour les hommes seuls, travaillant un an de plus, ce surcoût serait de 67%.

Trois fois plus cher pour une famille

Ces premiers chiffres concernent des femmes et des hommes seuls et sans enfants. L’étude présente aussi les résultats pour une famille avec deux enfants. Ainsi, un couple formé d’un magasinier et d’une assistante en soins devrait débourser 1006 francs de plus par mois, ce qui représente un supplément de 531116 francs, pour toucher la rente qu’il obtiendrait avec l’AVS. Même topo pour un infirmier et une animatrice qui devraient payer 788 francs de plus par mois (416089 francs au total). Par ailleurs, l’AVS offre des bonifications pour les tâches éducatives permettant de suppléer une diminution ou une interruption de l’activité professionnelle quand la famille s’agrandit. Ce qui n’est pas le cas dans la prévoyance privée. Dès lors, les contributions devraient être plus élevées pour compenser ces périodes. Selon les calculs de l’USS, pour un couple avec deux enfants et un revenu moyen, une rente financée de façon privée serait 350% plus chère qu’avec l’AVS.

Renforcer l’AVS avec une 13e rente

Le point de départ de l’USS pour la réalisation de cette étude est le sombre avenir annoncé dans la prévoyance vieillesse, avec des rentes du 2e pilier «en chute libre depuis plus d’une décennie» et des rentes AVS qui ne suffisent pas pour vivre. «Un problème socioéconomique majeur pour les gens qui travaillent, et qui doit impérativement être résolu», note la faîtière dans son rapport. Forte des résultats de la recherche, l’USS préconise de renforcer l’AVS et de couper court à la volonté des assureurs vie et des banques de proposer aux salariés un 3e pilier, très cher, pour compenser les baisses de rente. Pour cela, la faîtière des syndicats compte sur l’initiative populaire fédérale pour une 13e rente AVS qu’elle a déposée fin mai à la Chancellerie. Cette initiative permettrait d’augmenter la rente annuelle de tous les retraités de 8,3%. Le financement de cette 13e rente coûterait, pour une personne seule ayant un revenu moyen, 45 francs par mois. Si l’équivalent de cette 13e rente était financé par le 3e pilier, il en coûterait 176 francs par mois pour une femme et 144 francs pour un homme. Soit trois à quatre fois plus!

«La Commission du National laisse tomber les femmes»

Le 29 octobre dernier, l’Union syndicale suisse protestait contre la position prise par la Commission de la sécurité sociale et de la santé publique du Conseil national (CSSS-N) au sujet de la réforme du 2e pilier, LPP 21. La majorité de droite du Parlement a torpillé le projet présenté par les partenaires sociaux (syndicats et Union patronale suisse) qui prévoyait une réforme comportant notamment une revalorisation des rentes des femmes, ainsi qu’une compensation de la diminution des retraites qui résultera de la baisse du taux de conversion de 6,8 à 6% prévue dans le projet LPP 21. Une baisse des rentes allant jusqu’à 12% pour les futurs retraités.

La commission a décidé d’appuyer le «modèle de Courten» qui prévoit de ne compenser cette perte que pour 35 à 40% des assurés. Autre décision: l’augmentation des cotisations au 3e pilier qu’il sera possible de déduire fiscalement. Soit un allégement d’impôts représentant un demi-milliard de francs. L’USS dénonce le modèle adopté par la commission, qui sera synonyme de coûts supplémentaires pour les travailleurs. «Il faudra payer plus cher pour toucher encore moins de rente», note-t-elle dans un communiqué. Elle s’indigne également que la droite de la commission «préfère suivre les aspirations des assureurs et des banques», plutôt que le compromis des partenaires sociaux.

La faîtière syndicale déplore des décisions lourdes de conséquences pour les femmes. Et fustige le retournement de certains parlementaires de droite qui avaient prétendu vouloir s’attaquer au fort écart de rentes qu’elles subissent: «Deux ans après la Grève des femmes, ils les laissent doublement tomber: d’abord en proposant le relèvement de leur âge de la retraite à 65 ans dans AVS 21, et maintenant aussi avec cette réforme du 2e pilier.»

Pour aller plus loin

Que faire maintenant avec le 2e pilier?

Personnes qui applaudissent à l'annonce des résultats de la votation sur le 2e pilier.

Après leur victoire dans les urnes, les syndicats veulent de meilleures rentes et un contrôle accru des caisses. Mais dans l’immédiat, la priorité, c’est le financement de la 13e rente AVS.

La réforme du 2e pilier est balayée dans les urnes

Banderole contre la réforme du 2e pilier.

Plus de deux tiers des Suisses et Suissesses ont refusé le projet LPP 21. Une victoire de plus pour les syndicats, après la 13e rente AVS.

Désaccord sur le financement de la 13e rente AVS

L’Union syndicale suisse déplore que le Conseil fédéral semble ne pas avoir compris le message envoyé par la population lors de la votation sur la 13e rente.

La réforme de la 13e rente AVS approuvée par le peuple devra entrer en vigueur en 2026. Une mesure qui coûtera quelque 4,2 milliards de francs selon le Conseil fédéral, qui propose...

«On assiste à une privatisation rampante de la prévoyance vieillesse»

«On a trop diminué les rentes et rien ne justifie de le faire encore en réduisant le taux de conversion», estime Pierre-Yves Maillard, président de l’Union syndicale suisse.

Le président de l’Union syndicale suisse, Pierre-Yves Maillard, appelle à rejeter la réforme du 2e pilier pour défendre le principe de la solidarité sociale et contrer l’essor des extrêmes en politique. Interview.