Solidarité, oui, mais pas trop!
L’initiative genevoise «Pour une contribution temporaire de solidarité sur les grandes fortunes» se voit opposer un contre-projet «surprenant et incompréhensible», selon les syndicats
La pandémie de Covid-19 et, depuis cinq mois, la guerre en Ukraine et la montée de l’inflation ont plongé la plupart des pays dans une crise sans précédent. Genève n’y échappe pas. Afin de renflouer les caisses des collectivités publiques et, ainsi, de permettre le maintien du financement des prestations sociales de qualité, les partis de gauche et les syndicats ont déposé l’hiver dernier une initiative populaire dotée de 7000 signatures, «Pour une contribution temporaire de solidarité sur les grandes fortunes». Pour rappel, celle-ci propose de demander aux plus riches des riches un effort temporaire de solidarité sur une période de dix ans durant laquelle les fortunes dépassant les 3 millions de francs se verront prélever 0,5%. Le texte prévoit par ailleurs de tripler les déductions sociales sur la fortune afin de réduire l’imposition qui pèse sur les petits épargnants, les petits propriétaires et l’outil de travail des artisans.
Le 8 juillet, le Conseil d’Etat a validé juridiquement l’initiative en question, mais invite le Grand Conseil à rejeter le texte en l’état en faveur de son contre-projet. Ce dernier propose de modifier la durée de dix ans, jugée trop longue, à cinq ans.
Compromis incompréhensible
«Nous sommes ravis de la validation juridique de notre initiative, réagit Davide De Filippo, président de la CGAS. Sur le positionnement du Conseil d’Etat, nous sommes évidemment surpris. Soit il juge que la politique fiscale actuelle du canton est satisfaisante et il rejette notre initiative, soit il partage notre constat et, dans ce cas, la majorité de gauche qui le compose n’est pas allée jusqu’au bout de son positionnement.» Pour les initiants, réduire la durée de dix à cinq ans est une demi-mesure. «Pourquoi se passer de la moitié des recettes que cette initiative pourrait rapporter? On ne comprend pas le sens de ce contre-projet», souligne le syndicaliste.
Les auteurs de l’initiative rappellent que les très grandes fortunes du canton du bout du lac ont triplé ces sept dernières années, un record inédit en Suisse, alors que la population a largement vu salaires et retraites stagner. Pour eux, hors de question de faire l’impasse sur ces centaines de millions de francs supplémentaires qui pourraient mettre du beurre dans les épinards dans les domaines de la santé, des transports, du logement, de la formation et dans la transition écologique! «Nous maintenons le cap des dix ans», soutient Davide De Filippo, qui alerte sur de nouveaux projets concoctés par la droite: «La guerre fiscale continue!»