Suisse-UE: l’USS demande au Conseil fédéral de revoir sa copie

L’Union syndicale suisse estime qu’en l’état, l’accord avec l’Union européenne n’offre pas assez de garanties sur le respect, par les entreprises étrangères, des salaires et des conditions de travail en vigueur en Suisse, notamment sur les chantiers.
Le résultat des négociations sur les Bilatérales III ne satisfait pas la faîtière syndicale, qui a adopté une résolution exigeant une meilleure protection des salaires et du service public.
Pour l’Union syndicale suisse (USS), l’accord annoncé fin décembre entre la Suisse et l’Union européenne sur les Bilatérales III n’est pas acceptable en l’état. Dans une résolution adoptée lors d’une assemblée extraordinaire des délégués le 31 janvier, la faîtière demande au Conseil fédéral de revoir sa copie, soit dans le cadre de négociations de politique intérieure avec les partenaires sociaux, soit en renégociant certains points avec la Commission européenne. «Les informations disponibles montrent malheureusement que la protection des salaires et le service public seraient menacés par l'accord», souligne cette résolution.
Les détails n’ont pas encore été divulgués, la Confédération et l’UE devant rédiger le texte final de l’accord d’ici au printemps. Mais d’ores et déjà, l’USS demande de nouvelles mesures. Elle dit soutenir «l'ouverture vers l'UE, pour autant que cette ouverture profite aux travailleurs et aux travailleuses et ne leur porte pas préjudice. La fin du statut indigne de saisonnier et l'introduction de la libre circulation des personnes avec des mesures d'accompagnement efficaces ont été de grandes avancées pour de meilleurs salaires et conditions de travail, pour lesquelles les syndicats se sont battus. L'accord négocié met en péril ce modèle de réussite.»
Garde-fous
Les principaux points de friction ont déjà été indiqués en décembre, lors de l’annonce de l’accord. Il s’agit entre autres de la caution destinée à garantir le paiement d’amendes en cas de non-respect des conventions collectives, dont le versement ne serait plus exigé systématiquement, mais seulement imposé aux entreprises ayant déjà commis des infractions. De plus, la possibilité d’interdire à celles-ci l’accès au marché suisse est remise en cause. La question des frais d’hébergement et de nourriture remboursés aux travailleurs détachés en Suisse pose aussi problème, la règle de l’UE stipulant que c’est le tarif en vigueur dans le pays d’origine qui s’applique, alors que le coût de la vie est bien plus élevé en Suisse. «Si les travailleurs n'ont pas assez d'argent, ils devront dormir et manger dans des camionnettes ou sur des chantiers», prévient l’USS. Par ailleurs, la réduction du délai d’annonce pour l’envoi de travailleurs détachés, qui passerait de huit à quatre jours, rendra plus difficiles les contrôles préalables. Enfin, l’USS ne veut pas d’une libéralisation totale du marché suisse de l’électricité, et elle craint que l’ouverture du trafic ferroviaire international de voyageurs à longue distance ne mette sous pression le délicat équilibre du système suisse de transports publics.
Liste de revendications
La résolution approuvée par les délégués de l’USS établit une liste de revendications. Cela va de l’introduction d’une responsabilité du maître d'ouvrage sur le respect des salaires en vigueur par ses sous-traitants à l’interruption des travaux en cas d’infraction, en passant par une meilleure protection des travailleurs temporaires, des critères moins exigeants pour l’extension des conventions collectives et une meilleure protection contre les licenciements. L’USS veut en outre que le Conseil fédéral renégocie la question des frais avec l’UE ou qu’à défaut, la législation suisse impose les tarifs en vigueur dans notre pays. Enfin, l’USS soutient la proposition du Conseil fédéral de soumettre le dossier de l'électricité à une décision séparée et défend une plus grande souveraineté dans le domaine ferroviaire. La position définitive de la faîtière syndicale sur l'accord sera toutefois fixée lors d'une assemblée des délégués qui aura lieu après les négociations de politique intérieure et après les décisions du Parlement.