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Syndicats bannis de chantiers

Action d'Unia à l'entrée d'un chantier. Sur une banderole on peut lire: Protection.
© Neil Labrador

L’interdiction faite aux syndicats d’accéder à des chantiers revient à violer une des libertés fondamentales inscrites dans la Constitution. Une situation d’autant plus grave dans le contexte de crise sanitaire et en l’absence de contrôles suffisants des mesures de protection.

A Genève, Unia accuse les entreprises générales de porter atteinte à la liberté syndicale mais aussi de mettre en danger les travailleurs de la construction en cette période de crise sanitaire

Le 28 avril, travailleurs et syndicalistes d’Unia ont décidé de mener une action de dénonciation en réponse à l’attitude antisyndicale de certaines entreprises générales. Devant le chantier du Quartet, aux Charmilles, où HRS a installé des agents de sécurité à tous les accès et donné l’ordre de bannir les syndicats, Unia a déplié une immense banderole: «Les syndicats exigent l’accès aux travailleurs.»

Alessandro Pelizzari, secrétaire régional, rappelle la situation: «Les syndicats craignent depuis le début que les chantiers deviennent des lieux majeurs de la propagation du Covid-19, c’est pourquoi nous avons réussi, avec les faîtières patronales à nos côtés, à obtenir la fermeture des chantiers il y a plus de six semaines. A la suite du rétropédalage du Conseil d’Etat contraint par les autorités fédérales, nous avions réussi à contenir la réouverture des chantiers, mais depuis deux semaines, les vannes sont totalement ouvertes.» En effet, depuis le 27 avril, les chantiers peuvent reprendre sans être obligés de s’annoncer et l’inspection des chantiers a été assignée à d’autres tâches que le contrôle des mesures de sécurité dictées par l’OFSP (lire ci-dessous). D’après Unia, la quasi-totalité des 3000 chantiers ont repris ou sont sur le point de le faire.

Journée symbolique

La date de cette action n’est pas anodine, le 28 avril étant la Journée mondiale de la sécurité et de la santé au travail. «En cette période de crise sanitaire, cette journée à une importance particulière, reprend le responsable syndical. Interdire l’accès des syndicats sur les chantiers revient à violer une des libertés fondamentales inscrites dans la Constitution, et aujourd’hui, c’est particulièrement scandaleux car, en l’absence de contrôles suffisants, ce sont les syndicats qui ont fait un énorme travail pour garantir la santé et la sécurité des travailleurs sur les chantiers, et ailleurs. En nous empêchant de visiter les baraques, HRS, tout comme Implenia et d’autres entreprises générales, portent atteinte à la liberté syndicale, et mettent ainsi indirectement en danger la santé et la sécurité de leurs travailleurs.» Ce jour-là, la presse n’aura eu qu’à lever les yeux pour se rendre compte que, sur les échafaudages, les travailleurs – souvent en équipes de deux – étaient parfaitement incapables de respecter les mesures de distance sociale…

Témoignage

Fernando*, maçon

«Le syndicat doit pouvoir avoir accès aux chantiers pour conseiller les travailleurs et s’assurer que les normes sont bien respectées. Sur notre chantier, l’accès a été interdit, et ce n’est pas normal! Nous n’avons plus personne pour nous défendre, c’est scandaleux. Pour moi, cette attitude est clairement un moyen d’exercer des représailles contre nous, travailleurs, et contre les syndicats, qui sont là pour nous soutenir dans ce contexte difficile. Il faut le dire et le répéter, sur un grand chantier comme celui du Quartet, où le travail en équipes est courant, il n’est clairement pas possible de tenir la distance avec ses collègues.»

*Prénom d’emprunt.


Reprise à plein régime

Par arrêté entrant en vigueur le 27 avril, le Conseil d’Etat genevois a aboli l’obligation d’annonce de réouverture des chantiers dans le canton. Par la même occasion, il a supprimé les pouvoirs de l’Inspection des chantiers, dotée de 14 contrôleurs, qui veillait jusqu’à présent au respect des mesures de l’OFSP par les entreprises, laissant le flou sur le dispositif de contrôle qui devrait assurer le relais. «Ce sont les inspecteurs de la Suva qui vont sans doute reprendre le flambeau, réagit Alessandro Pelizzari. Nous devrons donc compter sur deux personnes pour contrôler les 3000 chantiers du canton.» C’est pourquoi les syndicats du bâtiment ont lancé cette semaine une pétition sur les chantiers pour faire revenir le Conseil d’Etat sur sa décision.

Par ailleurs, les autorités du bout du lac ont annoncé la reprise progressive des chantiers publics depuis le 27 avril, sans donner plus de précisions quant aux mesures d’hygiène et d’inspections. «Une attitude pour le moins désinvolte concernant le canton qui a le nombre d’occurrences de la maladie le plus élevé de Suisse», s’indigne la Communauté genevoise d’action syndicale.

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