Aller au contenu principal
Menu

Thèmes

Rubriques

abonnement

Toujours plus de stress au travail

Travailleur multipliant les tâches.
© Thierry Porchet

La santé des salariés ne s’améliore pas, au contraire. Augmentation du stress, des pressions psychiques ou sociales, gestes répétitifs, manque d’autonomie, risques physiques participent, parmi d’autres éléments, à la détérioration des conditions de travail.

Selon la dernière enquête de l’Office fédéral de la statistique, le stress et les risques psychosociaux ont augmenté dans le monde professionnel. Lignes maîtresses

Plus d’une personne active sur cinq souffre de stress dans son travail, 21% exactement. En 2012, ce chiffre s’élevait à 18%. Près de la moitié des travailleurs concernés par cette problématique se déclarent épuisés émotionnellement et sont menacés de burn-out. Hausse aussi constatée en matière de risques psychosociaux. Seule la fréquence des dangers physiques est demeurée stable. Ces résultats émanent de la dernière enquête menée par l’Office fédéral de la statistique (OFS) en 2017 auprès d’un échantillon représentatif de la population. 22134 personnes âgées de 15 à 64 ans ont répondu à une interview téléphonique et une large proportion d’entre elles également à un questionnaire complémentaire écrit. Cette analyse se déroule chaque cinq ans. Plus en détail...

Peur pour son emploi

Un salarié sur deux est confronté à au moins trois types de risques psychosociaux, soit 50% contre 46% lors du dernier sondage. Entrent par exemple dans cette catégorie des rythmes de travail élevés, un manque d’autonomie et de soutien social, les discriminations et les violences ou encore la peur de perdre son emploi. Selon l’OFS, les personnes âgées de 15 à 29 ans, celles sans formation ou encore les travailleurs de nationalité étrangère – Europe du Nord et de l’Ouest excepté – sont les plus exposés à cette situation. Si, toujours selon cette même source, quasi tous les types de risques psychosociaux connaissent une hausse, les évolutions les plus prononcées concernent le stress et la peur de se retrouver au chômage. Dans le premier cas, la part des personnes stressées croît dans toutes les branches d’activité, l’augmentation est toutefois particulièrement significative dans le secteur de la santé et du social. Dans le second cas, cette crainte frappe indistinctement les hommes et les femmes. Et a augmenté de 13 à 16%. «Cette fréquence n’avait pas varié entre 2007 et 2012», note l’OFS soulignant encore que l’inquiétude est plus récurrente dans les rangs des travailleurs avec un niveau de formation bas et de nationalité étrangère.

Risques physiques toujours importants

Si les risques physiques ne sont pas plus élevés par rapport à la dernière enquête, ils restent importants: 45% des personnes en mentionnent au moins trois sur une liste de neuf. Parmi les contraintes les plus souvent signalées: les mouvements répétitifs et des positions douloureuses et fatigantes. Dans ce dernier cas, les femmes sont davantage concernées, les hommes étant plus souvent sujets à déplacer ou à soulever de lourdes charges. Mais elles sont aussi aujourd’hui plus nombreuses à mentionner des gestes répétés de bras ou de mains – 61% contre 57% en 2012. Leur proportion a aussi augmenté parmi les travailleurs soumis à des températures extrêmes, 22% contre 19%. «L’agriculture, l’industrie, la construction (hommes), le commerce, la restauration, les transports (hommes) ainsi que le domaine santé-social (femmes) sont les branches d’activité avec une fréquence de risques physiques significativement supérieures à la moyenne», relève l’OFS.

Concernant les horaires de travail, la situation a évolué de manière différenciée selon les sexes. «En cinq ans, la part des hommes travaillant au moins 48 heures par semaine a reculé de 23 à 19%... A l’inverse, la part des femmes déclarant des journées de travail de 10 heures ou plus, au moins 5 fois par mois, a crû de 11 à 13%.»

Questionnés sur l’intrusion du sujet du travail durant leur temps libre, 21% des hommes et 16% des femmes ont indiqué que cela leur arrivait au moins plusieurs fois par semaine. «Les personnes avec une formation de niveau tertiaire (25%) de même que celles travaillant dans l’enseignement et dans l’agriculture (37% dans les deux cas) déclarent nettement plus souvent travailler durant leur temps libre.»

Répercussions sur la santé

Au final, les interviewés mentionnant au moins trois risques psychosociaux ou physiques sont plus nombreux à juger leur état de santé général moyen ou (très) mauvais que les autres travailleurs. Sont associés à ce diagnostic autoévalué: les positions douloureuses et fatigantes, la confrontation à des exigences émotionnelles, le stress et la peur de perdre son emploi. Enfin, l’épuisement émotionnel est considéré comme une indication d’un risque accru de burn-out. «En 2017, 20% des personnes ont déclaré éprouver ce sentiment.» Cette situation conduit les personnes qui en souffrent à estimer dès lors leur santé moyenne ou médiocre deux fois plus souvent que les autres. La détresse psychologique et la dépression sont aussi mentionnées nettement plus fréquemment dans les cas d’épuisement professionnel.


Unia demande notamment de réduire la pression sur les délais

«Les résultats de cette enquête ne sont pas une surprise. Ils confirment les conclusions de nos propres sondages.» Spécialiste d’Unia pour la santé au travail, Christine Michel n’en trouve pas moins alarmantes les dernières informations de l’Office fédéral de la statistique (OFS). «Elles montrent clairement qu’une forte pression est exercée sur les salariés. Une charge de temps élevée liée à une diminution de l’autonomie constituent un risque pour la santé.» Pour la collaboratrice syndicale, il est nécessaire de mettre en place des mesures de prévention et de tenir compte de l’évolution du monde du travail vers les professions de services. «Il ne s’agit plus de penser seulement aux risques d’accident mais aussi psychosociaux. Il faut se soucier de l’ergonomie et de l’organisation du travail: réduire la pression sur les délais, pallier le manque de personnel, créer un climat professionnel agréable en offrant davantage de marge de manœuvre aux salariés. Le manque de participation nuit à la santé.» La syndicaliste préconise également une plus grande attention aux dangers physiques. «Dans le domaine de la vente par exemple, on ne saurait oublier la pénibilité de la fonction de caissière, contrainte à des mouvements répétitifs. Il faut envisager suffisamment de pauses, de rotations dans les activités. Et aussi former le personnel à de nouvelles tâches avec l’extension de la numérisation.» Pour le syndicat, l’état préoccupant de la situation rend d’autant plus incompréhensibles les attaques actuelles à l’encontre de la protection de la santé des salariés. «L’enregistrement des heures de travail, sa durée maximale, le respect des périodes de repos et l’interdiction de travailler le dimanche sont actuellement menacés par des interventions parlementaires. Unia fera tout ce qui est en son pouvoir pour les repousser. Au besoin, les syndicats lanceront le référendum.»

Pour aller plus loin

Plus de temps pour vivre !

photo de la salle depuis en haut

Près de cent personnes se sont réunies à Berne le 26 octobre sur l’invitation d’Unia pour échanger et réfléchir au sujet de la nécessaire réduction du temps de travail en Suisse.

Des conditions dignes pour les cueilleuses de thé du Sri Lanka

cueilleuses de thé au sri-lankais

Extrêmement précarisées, les travailleuses et leur syndicat ont partagé leurs conditions de travail et de vie lors d’un tribunal populaire. Une pétition a été lancée avec le soutien de Solifonds.

Les nettoyeuses de l’Etat de Genève doivent réintégrer la fonction publique

Une pétition des syndicats Unia et SIT dénonce la précarisation du personnel induite par la sous-traitance de ce travail à des privés.

La réduction du temps de travail, on en parle?

Unia organise, à Berne le 26 octobre prochain, une journée de réflexion et d’ateliers sur la thématique de la baisse du temps de travail. Baptisée «Plus de temps pour vivre...