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«Un gigantesque programme de compression salariale est en cours»

Partout en Suisse la grogne monte. Les salaires sont à la traîne face à la hausse des prix. Une juste répartition des richesses est exigée par les syndicats qui appellent à participer massivement à la manifestation de samedi à Berne.
© Thierry Porchet

Partout en Suisse la grogne monte. Les salaires sont à la traîne face à la hausse des prix. Une juste répartition des richesses est exigée par les syndicats qui appellent à participer massivement à la manifestation de samedi à Berne.

Vendredi dernier, l’USS a rappelé l’importance de la manifestation du 16 septembre pour le pouvoir d’achat

«La Suisse traverse une crise sociale qu’il faudrait être aveugle et sourd pour l’ignorer.» C’est avec ce constat que Pierre-Yves Maillard, président de l’Union syndicale suisse (USS), a débuté son intervention, vendredi passé, lors d’une conférence de presse rappelant les enjeux de la manifestation pour le pouvoir d’achat du 16 septembre à Berne*. Revenant sur la «situation tristement simple» vécue par la population laborieuse et les retraités ayant des fins de mois de plus en plus difficiles, il a expliqué que l’idée d’une amélioration des conditions d’existence de chacun au cours de sa vie laborieuse appartient désormais au passé. «Nous voyons aujourd’hui en Suisse se mettre en place une baisse du niveau de vie des gens qui travaillent, des classes populaires aux classes moyennes. Un gigantesque programme de compression salariale, de baisses d’impôts pour les hauts revenus et de réduction des dépenses publiques est en cours», a-t-il indiqué, avant d’ajouter que ceux qui défendent ce programme «n’osent pas le nommer». Ces défenseurs, ce sont les responsables et les profiteurs de la situation: employeurs, entreprises, hauts cadres, Parlement et Gouvernement. Parmi eux, personne ne prend ses responsabilités que ce soit en matière de rémunérations, de meilleure répartition des bénéfices ou de mesures politiques pour limiter ou plafonner les hausses des primes maladie, des transports et des loyers. «En résumé, a souligné le président de l’USS, tous les coûts supplémentaires sont à la charge des ménages, et pendant ce temps on ne compense même pas l’inflation sur les revenus. Quatre ans de baisse des salaires réels à la suite: on se croirait en plein crise économique mais il n’en est rien!»

«Ça ne peut pas continuer comme ça»

Pierre-Yves Maillard a encore dénoncé «une formidable mécanique de redistribution des richesses vers le haut», vers les actionnaires et les managers. «L’argent est là, la Suisse produit grâce à ses travailleuses et ses travailleurs une quantité de richesses toujours plus grande, mais elle est plus injustement répartie que jamais.» Dans ce contexte, la manifestation pour le pouvoir d’achat du 16 septembre permettra d’élever la voix pour faire tomber les masques et nommer les responsables. «Ça ne peut pas continuer comme ça», a-t-il scandé, affirmant qu’il est possible de faire autrement et invitant la population à le dire haut et fort samedi à Berne puis dans les urnes lors des prochaines votations sur les retraites et les primes d’assurance maladie. «C’est cette séquence que nous ouvrons aujourd’hui. Et si elle est bruyante, c’est parce que le silence face au déclassement social généralisé n’est pas une option.»

Perte de 3000 francs en deux ans

Vice-présidente de l’USS et présidente d’Unia, Vania Alleva a, elle aussi, dressé le tableau de l’impact de la diminution des revenus, des hausses des primes, des prix de l’électricité, des transports, des denrées alimentaires et plus récemment des loyers sur la population active. Le tout alors qu’en 2022, 37 grandes entreprises ont versé à leurs actionnaires des gains en capital de près de 76 milliards, soit le montant du budget de la Confédération, alors qu’à l’autre bout de l’échelle, les salaires baissent (voir L’ES du 6 septembre). «Au cours de ces deux dernières années, une famille de quatre personnes a subi une perte du pouvoir d’achat de 3000 francs en termes réels», a-t-elle chiffré, plaidant pour une augmentation des salaires à hauteur de 5%. «Les employeurs doivent enfin comprendre qu’il n’y a plus d’échappatoire.»

Natascha Wey, secrétaire générale du Syndicat des services publics et vice-présidente de l’USS a évoqué le ras-le-bol des employés de la fonction publique, qui le font savoir avec des protestations dans plusieurs villes et cantons de Suisse. Ainsi, à Dübendorf par exemple, 120 employés ont mené une action devant le législatif communal. A Lucerne, une mobilisation se prépare contre une baisse des rémunérations alors que le canton réalise des excédents record. A Berne et en Suisse romande la colère gronde aussi. «Cette inquiétude qui concerne toutes les branches doit être prise au sérieux et les employeurs doivent réagir», a conclu Natascha Wey.

Outre les hausses générales de salaires, l’USS exige que la compensation du renchérissement redevienne la règle dans les CCT et dans tous les contrats de travail. La faîtière réaffirme également qu’«il y a suffisamment d’argent pour permettre aux travailleurs et aux travailleuses de boucler leurs fins de mois sans devoir s’inquiéter.»


* Rassemblement à 13h30 à la place Schützenmatte à Berne puis manifestation jusqu’à la Place fédérale. Transports gratuits voir uss.ch/actuel/pouvoir-achat

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