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Un toit pour toutes et tous

Un lit dans un hébergement d'urgence.
© Olivier Vogelsang/archives

Le nombre de places d’hébergement d’urgence reste insuffisant à Lausanne, et peu adapté aux familles. De surcroît, un logement stable est primordial à l’intégration professionnelle et scolaire.

Alors que la Ville de Lausanne réfléchit à élargir ses mesures d’hébergement d’urgence, l’association Opre Rrom demande une véritable politique d’intégration qui passe par la stabilité du logement

A la suite des occupations et des actions du collectif 43m2 pour le droit au logement, la Ville de Lausanne a organisé une table ronde afin de définir les pistes pour renforcer les dispositifs d’accueil et sortir de la logique saisonnière. Le 14 septembre, à la Maison du peuple, une soixantaine de personnes y ont participé: des autorités de plusieurs communes vaudoises, des chercheurs et des militants, ainsi que le monde associatif dont Caritas, Point d’Appui, Mère Sofia, l’Armée du Salut, la Marmotte, le Sleep-In, les collectifs Jean Dutoit et 43m2… La médiation a été assurée par la Haute Ecole de travail social et de la santé Lausanne (HETSL). Pour mémoire, c’est dans le jardin de cette dernière qu’un campement avait été installé durant le mois de juin par le collectif 43m2. Dans un communiqué, celui-ci souligne que les personnes ayant bénéficié de cet accueil sont, depuis, retournées à la rue et subissent de nouveau «le manque d’hygiène et de confort, les violences policières, les difficultés d’accès aux logements, le manque de lien social, le mauvais accès aux soins de santé; en bref, la survie au quotidien». «Les chances de sortir de la précarité, notamment en trouvant du travail, sont ainsi proches de zéro», dénonce-t-il.

La responsable du dispositif d’aide d’urgence de la Ville de Lausanne, Eliane Belser, se réjouit de cette table ronde comme d’un premier pas: «C’est la première fois que tous les acteurs sont réunis. Nous sommes tous d’accord qu’il manque des places d’hébergement d’urgence et qu’il faut sortir de la logique saisonnière. Maintenant, nous devons construire cela avec les communes alentours et le Canton. C’est un défi de trouver les bâtiments de la bonne taille et les financements. Nous travaillons à court et à moyen terme et sur des solutions adaptées aux différentes situations, par exemple pour les femmes, les seniors ou les personnes en emploi.»

La situation spécifique des Roms

Les besoins sont tout aussi spécifiques concernant les personnes ayant des problèmes d’addictions, ou celles issues de la migration, comme les Roms souvent accompagnés de leurs enfants. Vera Tchérémissinoff, présidente de l’association Opre Rrom, n’a pas été conviée à la table ronde, mais lutte depuis des années pour leur intégration. «Leur situation est spécifique. Ce sont surtout des familles qui, au contraire de ce que l’on pense, ne sont pas nomades. Elles fuient avant tout la misère et la discrimination de l’est de l’Europe – en Roumanie et en Slovaquie, c’est terrifiant! La plupart sont analphabètes et n’ont aucune formation, mais ils sont prêts à se former pour trouver du travail. Ils scolarisent leurs enfants. Mais dans les lieux d’hébergement d’urgence, les enfants dorment trop tard, il y a trop de bruits et pas d’endroits pour faire ses devoirs. Dans ce sens, la problématique du logement pour ces familles est essentielle.» Pour la militante, des lieux transitoires stables pourraient favoriser l’intégration et représentent donc le meilleur remède contre la mendicité. «J’ai hébergé une famille pendant huit ans. Le papa a obtenu un permis B de travail et ensuite un logement. Sa fille continue sa scolarité avec succès. Comme quoi, c’est possible! Or, on continue de faire du bricolage!» Vera Tchérémissinoff évoque également le «plan d’action stratégique sur l’intégration des Roms et des gens du voyage (2020-2025)» du Conseil de l’Europe, auquel a adhéré la Suisse sans l’appliquer: «Tant qu’il n’y aura pas de volonté politique véritable, on n’y arrivera pas!»

«Parce que je touche le revenu d’insertion, je n’ai pas le droit d’aider?»

La solidarité peut ressembler à un chemin de croix. La présidente d’Opre Rrom, Vera Tchérémissinoff, a eu des déboires avec sa régie pour avoir hébergé une famille rom. «J’ai dû me battre deux fois devant le préfet, car la gérance estimait que je sous-louais sans autorisation. Elle voulait donc me mettre à la porte. J’ai toujours gagné, car je n’ai jamais demandé un centime. C’était un geste purement humanitaire.»

A ses côtés, Philippe soutient le travail de l’association depuis longtemps. Touchant un complément du revenu d’insertion (RI) (car sa retraite française n’est pas suffisante), on lui a notifié il y a quelques semaines qu’il ne toucherait plus ce complément, car il hébergeait une famille rom. «Je leur ai expliqué que ce n’était pas le cas, et que je réceptionnais seulement leur courrier. Car, pour de nombreuses démarches, la recherche de boulot par exemple, une adresse est nécessaire. On m’a alors dit que je n’avais pas ce droit non plus.» Dépité, il ajoute: «Parce que je touche le RI, je n’ai pas le droit d’aider? En plus, on m’a fait entendre que je devrais rembourser ce que j’avais touché. J’ai également peur de perdre mon permis C. Je suis en Suisse depuis 17 ans, et j’aime ce pays. Mais là, je suis déçu.»

Malgré son grand cœur, il n’a plus d’autre choix que de demander à cette famille de changer son inscription au Contrôle des habitants. Du côté de la Ville, Judith Bovay, cheffe du Service social Lausanne ne peut donner d’informations sur des cas particuliers pour des raisons de secret de fonction et de protection de la personnalité. Elle souligne toutefois: «De manière générale, le RI (qui est l’aide sociale dans le canton de Vaud) est calculé en fonction de la composition des ménages et s’appuie sur les données figurant au Contrôle des habitants. Le calcul du droit se fait en fonction du nombre de personnes et des types de relations entre elles. Par exemple, les colocataires se partagent les frais de loyer…»

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