La belle victoire des vendeuses et des vendeurs de Nyon
Les citoyens ont tranché, les commerces ne seront pas ouverts une heure de plus le samedi
Les commerces nyonnais ne seront pas ouverts une heure supplémentaire le samedi. Par 52,28%, les citoyens ont refusé une prolongation à 19h combattue par un référendum lancé par le personnel de vente, Unia et les partis de gauche. A l’annonce du résultat, peu avant 13h ce dimanche sur la place du Château, la quinzaine de membres du comité référendaire présents ont laissé éclater leur joie. «C’est une grande victoire, j’en ai des frissons. Ça me touche en particulier comme jeune maman. J’hésitais à changer d’emploi car le samedi on finit déjà tardivement. Je suis vraiment contente», réagit à chaud Célia, vendeuse. «Le résultat montre que la population est attachée aux conditions de travail du personnel et aux petits commerces qui auraient peiné à s’adapter», commente le secrétaire régional d’Unia Vaud, Yves Defferrard, qui se félicite aussi de la réussite du travail collectif et de la collaboration entre les travailleurs, le syndicat et les partis.
Un problème politique
Le 1eravril dernier, la majorité de droite du Conseil communal avait accepté d’autoriser les magasins à ne tirer leurs rideaux qu’à 19h le samedi à la demande de la Société industrielle et commerciale de Nyon (SIC) et de la Municipalité. Objectif de la mesure: «réduire un désavantage concurrentiel» vis-à-vis des centres commerciaux des communes avoisinantes qui ferment à cette heure-là. Pour Bruno, salarié de la grande distribution à Nyon et militant du comité référendaire, les horaires sont toutefois moins déterminants que les accès: «Au centre commercial de Signy, le parking est gratuit, alors qu’il est payant au centre-ville de Nyon, qui connaît des difficultés de circulation. Ce problème existe depuis fort longtemps et ce n’est pas en changeant les horaires qu’on va le résoudre, mais plutôt en développant l’attractivité de la ville et la diversité des commerces. Il s’agit d’un problème politique.» Le jeune homme déplore que «les parts de marché à prendre sur Signy» soient «plus importantes que le bien être des vendeurs». «L’argent prime sur l’humain.» Pour Patricia, active dans la vente depuis une trentaine d’années ainsi que dans le comité référendaire, «ce que les gens recherchent dans le centre de Nyon, ce sont des commerces de proximité, l’accueil, le service, la qualité, soit autre chose qu’une borne pour scanner des articles… Pour moi, le changement ne se justifiait pas, on voit bien qu’à 18h il n’y a plus un chat dans le vieux Nyon. Et si on ouvre une heure supplémentaire, on ne va pas engager plus de personnel alors qu’aujourd’hui on tend plutôt à réduire les postes de travail.»
Les employeurs ont bien proposé des compensations à cet allongement des horaires: la généralisation des cinq semaines de vacances annuelles, l’introduction d’un congé de maternité de seize semaines payé à 80% et d’un congé de naissance ou d’adoption de cinq jours. Ces mesures n’ont cependant pas emporté l’adhésion d’une assemblée d’une septantaine d’employés qui ont préféré ne pas sacrifier leur soirée du samedi. «Ce n’est pas que les vendeuses et les vendeurs ne veulent pas travailler, ils veulent juste avoir des conditions de travail correctes. Et ce n’est pas de leur faute si le commerce souffre. On ne peut pas exiger du personnel de travailler plus sans réelle compensation», explique Clotilde Pinto présidente de la conférence de branche du commerce de détail d’Unia, employée d’une grande enseigne à Vevey et venue à Nyon soutenir ses collègues. «Il faut cesser ce saucissonnage des horaires dans chaque ville et trouver une solution cantonale. Nous sommes prêts, qu’on le sache, à ouvrir des négociations», lance Yves Defferrard.
L’union fait la force
Prenant acte du résultat de la votation, la Municipalité a, dans un communiqué, exhorté Unia et la SIC à renouer le dialogue. Faute d’accord sur les horaires, la Convention collective de travail du commerce de détail de Nyon n’a ainsi pas pu être renouvelée. «Notre victoire ne signifie pas la fin du partenariat social, au contraire, la population nous y renvoie. Il va falloir reprendre langue avec la SIC», estime Komla Kpogli. Même si le secrétaire syndical d’Unia, qui a porté le référendum, regrette les attaques qui ont émaillé la campagne et, surtout, «les pressions et les menaces envers le personnel» engagé en faveur du non. «Nous le déplorons vivement, surtout provenant de grands groupes.»
Autour d’une verrée de la victoire, Alexandre Démétriadès, député socialiste actif dans cette campagne, a mis en garde les camarades: «Ils ne vont pas s’arrêter là et, de votre côté, il ne faudra pas non plus vous arrêter.» Conclusion de Célia: «Nous allons continuer à nous battre, nous avons montré que tous ensemble on peut défendre nos conditions de travail et que l’union fait la force.»