«Saint Nicolas» intervient pour les exilés
Le collectif fribourgeois Poya Solidaire a profité de la Journée internationale des droits humains pour appeler le Conseil d’Etat à agir en faveur des requérants d’asile déboutés du canton
C’est une tradition à Fribourg: saint Nicolas, le saint patron de la ville, est mis à l’honneur tous les 6 décembre pour le plus grand bonheur des petits et des grands. Et cette année, il a décidé de prolonger son séjour. Journée internationale des droits humains du 10 décembre oblige, le collectif Poya Solidaire a tenu à faire revenir le saint patron des naufragés, qui a connu lui aussi les tourments de l’exil, pour demander aux conseillers d’Etat d’agir en faveur des personnes exilées. Alors que le Foyer de la Poya recense près de 70 personnes, exclusivement des requérants d’asile déboutés à l’aide d’urgence, toutes privées de titre de séjour, de droit au travail ou à la formation, de droit de circuler librement ou encore d’accès à des biens de consommation, le collectif Poya Solidaire se bat pour mettre fin aux conditions dégradantes dépendant de ce régime.
Lors de cette action symbolique, qui a réuni une trentaine de personnes, «saint Nicolas» a été reçu par la chancelière d’Etat et l’huissier à qui il a prononcé son discours: «Je suis venu vous rencontrer pour vous rappeler que le canton de Fribourg a longtemps été une terre d’émigration […] et que les hommes et les femmes qui ont connu les souffrances de l’exil ne quittent pas leur pays, au péril de leur vie, de gaîté de cœur.»
Le collectif a indiqué, à travers ce «saint Nicolas», que l’exécutif était tenu de respecter les principes de la Déclaration internationale des droits humains, notamment ses articles 5, 22 et 23, qui, entre autres, stipulent que «nul ne sera soumis à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants» et que «toute personne a droit au travail».
Revendications
Pour rappel, Poya Solidaire avait déposé, il y a une année, une pétition auprès du Gouvernement fribourgeois. La réponse, lacunaire, exprimait le refus d’une rencontre avec le collectif. Cette action surprise était donc une manière de remettre la pression, à travers le symbole de saint Nicolas. «Notre but est de pouvoir rencontrer le Conseil d’Etat et d’avoir un échange et des changements concrets sur la situation invivable que subissent ces personnes», informe Célestine Waeber, membre du collectif. Les revendications sont plurielles. Le collectif demande la régularisation des personnes soumises à l’aide d’urgence de longue durée, sachant qu’à la Poya, certains y sont depuis dix ans, l’accès au travail et, enfin, l’amélioration des conditions de vie au foyer. «Ces personnes exilées n’ont pas été régularisées mais le renvoi vers leur pays est impossible, elles sont donc coincées dans cette zone grise, forcées à l’inactivité, en marge du reste de la société et souvent poussées à la clandestinité, dénonce la militante. Quant à l’aide d’urgence, elle correspond à un tiers du montant de l’aide sociale, soit largement pas assez pour vivre dignement en Suisse.»
A la suite de cette action, la chancelière a invité Poya Solidaire à formuler une demande écrite de rencontre avec le Conseil d’Etat, dont la réponse devrait être positive. Le collectif s’est exécuté dès le lendemain.