La gauche et les syndicats jugent injustifiée et malvenue une augmentation des primes maladie en période de crise et alors que les caisses ont accumulé de grosses cagnottes
Encore une fois et peut-être plus que d’habitude, l’annonce des nouveaux montants des primes maladie ne passe pas. A l’exception de Neuchâtel, où une baisse moyenne de 0,2% est attendue, tous les cantons romands verront les primes progresser de 0,6% à 2% en 2021. Même qualifiée de «très modérée» par le conseiller fédéral Alain Berset, cette énième hausse est jugée injustifiée et malvenue par la gauche et les syndicats. «Des centaines de milliers de personnes ont été durement touchées par la crise du coronavirus, indépendamment de leur volonté. Dans cette situation, il est quasi impossible pour beaucoup de gens de devoir faire face à des primes encore plus élevées», constate le président de l’Union syndicale suisse (USS), Pierre-Yves Maillard. Le conseiller national et ancien responsable de la Santé du canton de Vaud estime que «les réserves excessives des caisses maladie devraient être utilisées pour éviter les augmentations».
Deux fois plus de réserves que prévu
Entre 2017 et 2020, les primes ont augmenté de 5,4% alors que les coûts, eux, ne progressaient que de 2,7%. Les recettes excédant les dépenses, les assureurs ont mis chaque année de l’argent de côté – 1,5 milliard en 2019 –, portant la somme de cette cagnotte à 11 milliards en tout. Ces réserves doivent théoriquement garantir aux caisses un taux de solvabilité, mais celui-ci dépasse en moyenne les 200%. Pour inciter les assureurs à réduire ce trop-plein, le Conseil fédéral a ouvert le 18 septembre une consultation sur un projet de modification de l’Ordonnance sur la surveillance de l’assurance maladie. Avec cette révision, les caisses pourraient restituer aux assurés les réserves excédentaires dès que le taux de solvabilité atteint 100%, sans attendre comme maintenant les 150%. Le problème est que ces remboursements resteront facultatifs et on voit mal pourquoi les assureurs consentiraient demain à ce qu’ils refusent aujourd’hui… «Si rien ne change sur une base volontaire, nous pourrons alors penser à une révision de la loi», a dit Berset. La disposition n’entrera en vigueur qu’en 2022 et, soyons réalistes, le temps de constater qu’on s’est encore fait rouler dans la farine par les caisses, de «penser à une révision» et de la mettre en route, on aura déjà passé 2025… Sans attendre, sur change.org, le Parti socialiste vaudois a lancé une pétition au titre bien trouvé: «Rendez-nous les primes payées en trop!»
10% du revenu au maximum
Indépendamment des réserves, un autre cheval de bataille de la gauche et des syndicats est la réduction des primes pour les travailleurs et les familles aux revenus modestes. «L’assurance de base est principalement financée par des primes par tête, tout le monde doit payer le même montant, cela impose une charge supérieure à la moyenne aux personnes qui ont peu d’argent», explique Pierre-Yves Maillard, en plaidant pour un «financement plus équitable». Déposée en janvier par le Parti socialiste, l’initiative fédérale «Maximum 10% du revenu pour les primes d'assurance maladie (initiative d'allègement des primes)» poursuit cet objectif. Soutenu par l’USS et Unia, le texte propose qu’aucun ménage n’utilise plus de 10% de son revenu disponible dans les cotisations maladie. La réduction des primes étant financée aux deux tiers par la Confédération, le reste par les cantons.