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«La protection des salaires n’est pas négociable»

Devant le palais fédéral, une longue banderole rouge Unia sur laquelle on peut lire: "Nous défendons les salaires et les conditions de travail"
© Neil Labrador/archives

Vania Alleva, présidente d’Unia, s’est entretenue avec l’ambassadeur de l’Union européenne sur l’accord-cadre. Aucune concession ne sera faite sur la protection des salaires

«Halte à la propagande patronale! Les mesures d’accompagnement protègent tous les salariés, aussi ceux de l’UE.» Vendredi dernier, Vania Alleva, présidente d’Unia, a remis une lettre à Petros Mavromichalis, ambassadeur de l’Union européenne, avant de s’entretenir avec lui. Dans ce pli, le syndicat a réagi à une récente interview donnée par l’émissaire au SonntagsBlick à la suite de propos erronés qu’il a tenu sur les mesures d’accompagnement à la libre circulation. Une question qui fait débat dans l’accord-cadre institutionnel régissant la voie bilatérale développée par la Suisse avec son partenaire européen. Plus précisément, le diplomate a prétendu, dans les colonnes du journal alémanique du 7 février, que seules les entreprises de l’UE devaient fournir un dépôt de garanties financières pour pouvoir travailler dans nos frontières. «Ce n’est pas conforme à la réalité. Les sociétés suisses sont soumises exactement aux mêmes obligations découlant des conventions collectives de travail (CCT) obligatoires. Et doivent aussi déposer une caution» a rectifié la responsable d’Unia dans son courrier et oralement. L’Organisation des travailleurs s’est aussi indignée de la manière dont l’ambassadeur, toujours dans l’article en question, a qualifié les dispositions de protection des salaires en vigueur en Suisse. Ce dernier les a jugées «disproportionnées et incompatibles» avec les accords bilatéraux. «Ce faisant, a dénoncé Unia, il remet en question l’expérience positive que la Suisse et l’UE ont eue avec ce traité depuis 2002.»

Vania Alleva et l'ambassadeur.
Vania Alleva, présidente d’Unia a remis une lettre à Petros Mavromichalis, ambassadeur de l’Union européenne, avant de s’entretenir avec ce dernier. La discussion a porté sur les mesures d’accompagnement, dispositions sur lesquelles le syndicat ne transigera pas. © Lucas Dubuis/Unia

 

Marché helvétique attractif

Plutôt que de critiquer les mesures d’accompagnement qui profitent à tous, résidents ou employés détachés, Vania Alleva a enjoint son interlocuteur à ouvrir les yeux sur «l’intense lobbying mené par des associations patronales allemandes du Bade-Würtemberg  auprès de la Commission européenne. Sociétés qui détachent du personnel dans notre pays et œuvrent au démantèlement de la protection des rémunérations. «Ce sont ces mêmes entreprises qui n’admettent pas les règles en vigueur en Suisse et qui, pour certaines, reçoivent des amendes en raison du non-respect des salaires minimum dans les CCT.» Une situation qui explique la pression qu’elles exercent alors sur Bruxelles depuis des années. Unia a aussi saisi l’occasion pour rappeler combien le marché helvétique restait hautement attractif et, partant, clairement pas sur-réglementé. «Les mesures d’accompagnement à la libre circulation ne sauraient être taxées de “protectionnistes”. Chaque année, plus de 2,5 millions de jours de travail sont effectués en Suisse par des travailleurs détachés et des indépendants issus de l’UE. Ce qui, ramené à la population résidente, est sans commune mesure avec aucun autre pays de l’UE.»

Aucune marge de manœuvre

Au cours de l’entretien qui aura duré près d’une heure et demie, la présidente d’Unia a insisté sur le fait qu’il était hors de question de toucher au filet de sécurité des rémunérations. «La protection des salaires n’est pas négociable et doit rester autonome à l’avenir. Il n’y a aucune marge de manœuvre sur ce point.» Unia a aussi invité l’UE à prêter une oreille attentive aux autres organisations de travailleurs, comme celle allemande, le DGB, ou encore la Confédération européenne des syndicats (IUTC). Qui ont également manifesté leurs inquiétudes face aux attaques perpétrées contre les mesures d’accompagnement. «Il est plus que temps que l’UE prenne enfin en compte le point de vue des salariés qui défendent l’intérêt commun, de bonnes conditions de travail et des salaires suisses en Suisse, sans discriminations.» A la sortie de l’entrevue, Vania Alleva l’a qualifiée de courtoise. «L’ambassadeur de l’UE a pris le temps de discuter. Nous avons exprimé nos divergences et défendu chacun nos positions. Mais il s’est montré à l’écoute.»

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