Emploi: Alcan ne répond de rien
Mardi 07 août 2007
Les syndicats européens ont rencontré la future direction de Rio Tinto Alcan sans obtenir de garanties
Absorbé par Rio Tinto dès le mois d'octobre, Alcan va vendre sa division «emballage». Ce genre de transactions entraîne généralement des restructurations qui font redouter des pertes d'emploi en Suisse, même si le futur dirigeant du groupe a indiqué qu'il sera attentif au caractère «socialement responsable» du repreneur. Aucune garantie n'a été donnée non plus quant aux autres divisions de la société.
La valse des milliards n'assure aucun avenir aux travailleurs. Bien au contraire. Le futur dirigeant de Rio Tinto Alcan, le canadien Dick Evans, n'a pris aucun engagement quant à la pérennité des emplois de l'entreprise en Suisse, lors de sa rencontre avec les syndicats européens le 25 juillet. Racheté pour 38 milliards de dollars par le géant anglo-australien Rio Tinto en octobre prochain, Alcan n'a pas précisé à quelle sauce il sera mangé.
Le PDG du groupe a pourtant tenté de rassurer le comité d'entreprise européen d'Alcan. Il a confirmé la vente de la division «emballage», mais a annoncé qu'elle devrait être cédée à un acteur «industriel». Atténuant ainsi la crainte des syndicats d'une reprise par un groupe financier, plus enclin à liquider les sites de production en vue de profits immédiats, ou d'une mise en bourse, comme cela avait été le cas pour Novelis (Spinoff). Dick Evans a aussi déclaré qu'il serait «attentif» au caractère socialement responsable du projet du repreneur. Mais rien n'est fait: «Tant que nous ne connaissons pas le nouveau propriétaire, on ne peut être sûr de rien», explique Alfred Eger, expert syndical d'Unia chargé des questions européennes. Ce rachat met clairement en danger les deux sites suisses produisant des emballages alimentaires, à Kreuzlingen et Rorschach, où respectivement 360 et 300 emplois sont concernés. «On n'a jamais vu un rachat sans perte d'emplois», prévient Charles-Henri Rudaz, secrétaire syndical d'Unia Valais.
Le Valais préservé?
Aucune garantie non plus quant au maintien des «produits usinés» au sein du groupe Rio Tinto Alcan. Environ 1000 travailleurs sont employés dans la transformation de l'aluminium en Valais. Mais les syndicats craignent moins pour leur avenir. Car, d'une part, Rio Tinto ne dispose pas d'unités de production similaires ailleurs dans le monde, selon Alfred Eger. Des doublons auraient laissé présager le pire. D'autre part, les sites valaisans tournent à plein régime, ils sont même en sous-effectif, explique Jean-Pierre Salamin, président de la Commission d'entreprise d'Alcan en Valais. La demande est forte, et le secteur reste intéressant financièrement. Ainsi, dans la région de Sierre, «la plupart des travailleurs d'Alcan se montrent peu inquiets. Ils sont aussi trop occupés à bosser», assure le militant.
Rio Tinto a pourtant prévu de réaliser 600 millions de dollars d'économies à la suite de l'absorption. En vertu des «synergies» - jargon utilisé dans ce type d'opération - dégagées par le rachat. Si l'on calculait cette somme en termes de postes de travail, cela représenterait 5000 à 6000 emplois à supprimer à l'échelle de la planète, expliquait récemment Jeanny Morard, secrétaire régional d'Unia en Valais. Mais la direction d'Alcan assure que les 600 millions correspondent aux gains obtenus par l'«optimisation fiscale» que le groupe pourra désormais réaliser en Australie et au travers de l'optimisation des achats. Une affirmation qui ne semble à priori pas absurde aux yeux des syndicalistes. Mais ceux-ci se voient à demi-rassurés seulement. En effet, au stade actuel et au vu du manque de transparence de la direction du groupe, «tout ceci n'est que pure spéculation», résume Alfred Eger.
A travers le comité d'entreprise européen d'Alcan, les syndicats continuent à exiger des garanties. Ils rencontreront prochainement les autorités nationales et européennes et auditionneront aussi les dirigeants de Rio Tinto dans la semaine du 17 au 21 septembre, quelques semaines avant que la phase concrète d'intégration soit mise en route.
En Valais, le Conseil d'Etat a été interpellé dernièrement, mais il n'a pour l'heure donné aucune réponse. Le Gouvernement pourrait pourtant se prévaloir des rabais fiscaux accordés à Alcan pour exiger des politiques sociales responsables de la part de l'entreprise, estiment les syndicalistes.
Christophe Koessler
La valse des milliards n'assure aucun avenir aux travailleurs. Bien au contraire. Le futur dirigeant de Rio Tinto Alcan, le canadien Dick Evans, n'a pris aucun engagement quant à la pérennité des emplois de l'entreprise en Suisse, lors de sa rencontre avec les syndicats européens le 25 juillet. Racheté pour 38 milliards de dollars par le géant anglo-australien Rio Tinto en octobre prochain, Alcan n'a pas précisé à quelle sauce il sera mangé.
Le PDG du groupe a pourtant tenté de rassurer le comité d'entreprise européen d'Alcan. Il a confirmé la vente de la division «emballage», mais a annoncé qu'elle devrait être cédée à un acteur «industriel». Atténuant ainsi la crainte des syndicats d'une reprise par un groupe financier, plus enclin à liquider les sites de production en vue de profits immédiats, ou d'une mise en bourse, comme cela avait été le cas pour Novelis (Spinoff). Dick Evans a aussi déclaré qu'il serait «attentif» au caractère socialement responsable du projet du repreneur. Mais rien n'est fait: «Tant que nous ne connaissons pas le nouveau propriétaire, on ne peut être sûr de rien», explique Alfred Eger, expert syndical d'Unia chargé des questions européennes. Ce rachat met clairement en danger les deux sites suisses produisant des emballages alimentaires, à Kreuzlingen et Rorschach, où respectivement 360 et 300 emplois sont concernés. «On n'a jamais vu un rachat sans perte d'emplois», prévient Charles-Henri Rudaz, secrétaire syndical d'Unia Valais.
Le Valais préservé?
Aucune garantie non plus quant au maintien des «produits usinés» au sein du groupe Rio Tinto Alcan. Environ 1000 travailleurs sont employés dans la transformation de l'aluminium en Valais. Mais les syndicats craignent moins pour leur avenir. Car, d'une part, Rio Tinto ne dispose pas d'unités de production similaires ailleurs dans le monde, selon Alfred Eger. Des doublons auraient laissé présager le pire. D'autre part, les sites valaisans tournent à plein régime, ils sont même en sous-effectif, explique Jean-Pierre Salamin, président de la Commission d'entreprise d'Alcan en Valais. La demande est forte, et le secteur reste intéressant financièrement. Ainsi, dans la région de Sierre, «la plupart des travailleurs d'Alcan se montrent peu inquiets. Ils sont aussi trop occupés à bosser», assure le militant.
Rio Tinto a pourtant prévu de réaliser 600 millions de dollars d'économies à la suite de l'absorption. En vertu des «synergies» - jargon utilisé dans ce type d'opération - dégagées par le rachat. Si l'on calculait cette somme en termes de postes de travail, cela représenterait 5000 à 6000 emplois à supprimer à l'échelle de la planète, expliquait récemment Jeanny Morard, secrétaire régional d'Unia en Valais. Mais la direction d'Alcan assure que les 600 millions correspondent aux gains obtenus par l'«optimisation fiscale» que le groupe pourra désormais réaliser en Australie et au travers de l'optimisation des achats. Une affirmation qui ne semble à priori pas absurde aux yeux des syndicalistes. Mais ceux-ci se voient à demi-rassurés seulement. En effet, au stade actuel et au vu du manque de transparence de la direction du groupe, «tout ceci n'est que pure spéculation», résume Alfred Eger.
A travers le comité d'entreprise européen d'Alcan, les syndicats continuent à exiger des garanties. Ils rencontreront prochainement les autorités nationales et européennes et auditionneront aussi les dirigeants de Rio Tinto dans la semaine du 17 au 21 septembre, quelques semaines avant que la phase concrète d'intégration soit mise en route.
En Valais, le Conseil d'Etat a été interpellé dernièrement, mais il n'a pour l'heure donné aucune réponse. Le Gouvernement pourrait pourtant se prévaloir des rabais fiscaux accordés à Alcan pour exiger des politiques sociales responsables de la part de l'entreprise, estiment les syndicalistes.
Christophe Koessler