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Le Mouton: un loup pour les vendeuses?

Action d'Unia devant l'enseigne.
© Thierry Porchet

Unia a mené une action devant l’enseigne fustigeant sa manière de traiter le personnel. Le syndicat prévoit de saisir les prud’hommes.

Unia Genève dénonce des licenciements abusifs et des pratiques illicites à l’actif du commerce de vêtements

«Ici on tond les droits du personnel de vente», s’est indigné Unia Genève qui a mené, mercredi dernier, une action devant le magasin Le Mouton de la rue du Rhône. Ce n’est pas la première fois que le syndicat a maille à partir avec cette enseigne à l’ovin, qui exploite quatre boutiques de vêtements à Genève, deux à Lausanne et encore trois autres ailleurs en Suisse en se présentant comme un «Multibrand Outlet». En 2007, Unia avait déjà manifesté sur cette artère commerçante de la cité du bout du lac pour dénoncer des conditions de travail déplorables, du harcèlement sexuel, des salaires non payés ou encore l’engagement de travailleurs détachés non déclarés au sein de ce commerce – qui se nommait Le Mouton à 5 Pattes à l’époque. Rebelote.

«En mai et en juin, six licenciements ont été prononcés pour des motifs fantaisistes, une restructuration et, dans deux cas, des accusations de vol sans preuve. En réalité, ces personnes licenciées ont été remplacées par des travailleuses avec des contrats sur appel», explique Pablo Guscetti, secrétaire syndical d’Unia Genève, entouré de trois vendeuses congédiées, qui n’ont rien de «brebis galeuses».

Huit jours de congé en deux ans

Employées durant deux ans, celles-ci se plaignent en outre d’avoir souffert de conditions de travail très difficiles pour un salaire d’à peine 4000 francs par mois. «Au début, nous étions deux dans le magasin, ensuite, je me suis retrouvée deux à trois fois par semaine toute seule. Je devais tout gérer, décharger les 900 pièces du camion, étiqueter, mettre en rayon, faire les vitrines, encaisser et tenir à l’œil les voleurs. Je ne pouvais même pas descendre aux toilettes. Lorsque je rentrais le soir, j’étais tellement fatiguée que je n’avais plus la force de me faire à manger. Quand j’ai demandé de l’aide, on m’a répondu que je n’avais qu’à venir plus tôt. En deux ans, je n’ai pris que huit jours de congé, ça m’a causé stress et fatigue. Aujourd’hui, je suis malade, j’ai un problème à l’œil», témoigne l’une d’elles, employée alors dans la boutique de la rue du Mont-Blanc.

Surveillance vidéo omniprésente

Les vendeuses dénoncent aussi une surveillance vidéo omniprésente. «Les caméras ne sont pas là pour nous protéger, mais pour nous surveiller. Si je restais derrière la caisse, on me téléphonait pour me dire de bouger. Dans ma vie, j’en ai vu des choses, mais ça jamais. C’est comme si j’étais entrée dans une secte. Après le licenciement, quand je marchais dans la rue, j’avais l’impression d’être suivie, ça a duré un mois, c’est un sentiment qu’on a toutes eu.»

Une autre vendeuse ajoute: «Alors que j’étais engagée à mi-temps, on m’appelait régulièrement pour que je vienne travailler dans telle ou telle boutique, ce qui me posait de sérieux soucis pour faire garder mon fils de 8 ans. Durant les vacances, on m’a demandé de travailler trois semaines d’affilée sans prendre de congé ni de pause. Je ne pouvais guère me plaindre, la responsable des magasins à Genève ne parle qu’italien, tous les courriels que nous recevions étaient dans cette langue, je devais les lire à l’aide de Google Traduction et j’étais menacée d’être remplacée par une fille venue d’Italie.» Selon nos interlocutrices, les vendeuses qui les ont remplacées ont justement été recrutées directement dans la Botte.

Forcées de travailler le dimanche

Enfin, les vendeuses licenciées affirment avoir été obligées de trimer toute une journée un dimanche d’octobre 2018 pour remplir les rayons et n’avoir perçu pour ce travail que 100 francs payés de main à la main. «C’est particulièrement choquant. On voit bien que le travail le dimanche sur une base volontaire est illusoire. Il y a absence totale de contrôle dans la branche, cela se répercute sur le personnel, qui n’a aucune marge de manœuvre, commente Pablo Guscetti. On ne peut tolérer les pratiques scandaleuses de ces magasins et il est important que les clients soient informés de cette précarisation des conditions de travail.»

Des discussions avec le conseil de l’employeur ayant tourné court, Unia devrait donc saisir prochainement les prud’hommes entre autres sur le caractère abusif de ces licenciements. Invité par L’Evénement syndical à exposer la position de l’entreprise, l’avocat en question n’a pas retourné notre appel.

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