Aller au contenu principal
Menu

Thèmes

Rubriques

abonnement

La parole à quelques déléguées et délégués

Délégués lors du congrès.
© Thierry Porchet

Retour à un congrès rassembleur après l’organisation décentralisée, en juin 2021, des deux premières journées de la rencontre en raison de la pandémie.

Le congrès s’est tenu dans un contexte particulier, deux ans après le début de la pandémie, deux jours après l’agression russe contre l’Ukraine. Quel est le sentiment des militantes et des militants sur ces questions? Face aux défis à venir, quelle devrait être la priorité d’Unia et comment renforcer le syndicat?

Carlos Dos Santos, opérateur laser CNC, président d’Unia Fribourg

Portrait.«Mon sentiment sur la guerre en Ukraine? Toute guerre nous amène des inquiétudes, pour le peuple ukrainien et pour nous qui allons aussi devoir payer la facture.

Concernant Unia, je pense que la priorité doit être le maintien des emplois. Il faut arrêter ces licenciements. L’économie veut payer davantage de dividendes, pour cela, les patrons baissent les salaires, licencient des gens juste avant la fin de leur vie professionnelle. J’ai été au chômage une année. Je viens d’être réengagé et ils sont bien contents d’avoir trouvé quelqu’un ayant de l’expérience! Nous devons aussi nous battre pour des retraites dignes. Je soutiens l’initiative pour la protection des délégués syndicaux. Ça fait des années qu’on parle de ça dans les comités, mais rien ne bouge! L’initiative est un bon combat pour le syndicat dont le but est de défendre les travailleurs. Je m’inquiète bien sûr pour le climat, mais la priorité doit être les droits des salariés.

Pour renforcer Unia, nous devons commencer par gagner toutes les batailles dans lesquelles on s’engage. Si on les remporte, on deviendra plus forts. Aujourd’hui, nous sommes attaqués de toutes parts, et l’on a de plus en plus de peine à se défendre. Tout dépendra de l’énergie que nous mettrons cet automne pour préserver la CCT du bâtiment. Si on n’obtient rien, toutes les autres CCT vont commencer à sauter!»


Alexandrina Farinha, administratrice, Genève, Groupe d’intérêts femmes et vice-présidente nationale du Groupe migration

Portrait.«Je suis très impliquée dans la question des migrations et très préoccupée de voir ce qu’il se passe dans les pays en guerre. La question des réfugiés va se poser avec l’Ukraine, la Suisse doit s’engager pour toutes les personnes qui cherchent un refuge chez nous.

Au sujet d’Unia, et après la pandémie où l’on a vu que les questions centrales sont celles du travail et des conditions sociales, la priorité devrait être à une grande amélioration dans ces deux domaines. On a vu des gens demander de la nourriture au début de la crise à Genève. Ça ne devrait pas exister dans un pays riche comme la Suisse. Une autre chose me choque aussi, c’est la question des licenciements. C’est scandaleux qu’on puisse licencier une femme après un accouchement. Nous devons protéger l’ensemble des travailleuses et des travailleurs contre les congés, sauf en cas de faute grave.

Pour moi qui suis Portugaise, j’ai le sentiment que le syndicat est illégal en Suisse. La loi doit être revue pour permettre aux gens qui travaillent de s’affilier sans avoir peur. Les syndicats sont faits de personnes. Sans syndiqués, ils sont faibles.»


Valentin, installateur électricien, Groupe d’intérêts Jeunesse de Transjurane

Portrait.«Je suis content que la pandémie soit finie, qu’on reprenne une vie normale. Tous ces morts, c’est triste, terrible, mais il y a d’autres maladies aussi. Ce qui m’a surpris, c’est que, dans le monde entier, on a perdu des libertés, on ne pouvait pas bouger sans le pass. Demain, vont-ils introduire un pass pour certains malades, les empêchant par exemple d’entrer dans un McDo? Ce contrôle des gens avec le numérique me fait peur. Quant à la guerre, il y en aura toujours, il y a aussi eu celle en Yougoslavie il n’y a pas très longtemps. Et quel est mon pouvoir contre des pays dotés d’armes atomiques?

La priorité d’Unia? Durant la pandémie, on a beaucoup parlé de stress, de burn-out, de maladies professionnelles. Mais rien n’est fait aujourd’hui sur ces questions. On repart comme si on n’avait rien appris. Dans d’autres pays, il existe une médecine du travail. Je pense que c’est le combat de demain pour tous les employés.

Le syndicat est un rassemblement de salariés, qui a pour but d’améliorer les conditions de vie des gens. Nous devons aller dans ce sens plutôt que dans le politique. Lancer une initiative, c’est faire de la politique. C’est se couper de beaucoup de personnes. Nous devons dire aux politiciens quelles sont les attentes des ouvriers, mais ensuite, c’est à eux de faire leur boulot. Le syndicat doit se concentrer sur le quotidien de tous les travailleurs.»


Sarah, responsable jeunes et projets chez IndustriAll à Genève, membre du Groupe d’intérêts femmes et du collectif de la grève féministe

Portrait«Sur la guerre en Ukraine, j’ai été outrée de la position du Conseil fédéral concernant les sanctions (qui n’étaient pas décidées le jour du congrès, ndlr). Bien sûr, nous tenons à notre neutralité, mais là il est question de vies humaines, de familles. Genève est une place financière, où s’échangent le pétrole, les matières premières. Il serait malhonnête de ne pas protéger la vie des citoyens ukrainiens.

Pour Unia, une priorité serait d’avoir un syndicat représentatif de ses membres, d’aller vers une féminisation, avec plus de jeunes, plus de migrants. Lancer une initiative me fait un peu sourire. Toutes ces personnes affiliées qui n’ont pas le droit de vote ne pourront pas se prononcer… Il y a aussi l’égalité, la diminution de l’âge de la retraite et du temps de travail. J’y crois fortement. Avec l’industrie 4.0, les robots et les développements des processus de production numériques remplaceront de nombreux emplois. On doit négocier une réduction et une redistribution du temps de travail ainsi qu’une redistribution égalitaire des profits. Il faut voir cette révolution comme une opportunité pour réfléchir à quel système, quelle planète nous voulons, et mettre fin à la logique capitaliste.

Comment renforcer Unia? Les personnes ne se reconnaissent pas dans le syndicat. Il y a peu de jeunes, de personnes racisées. Unia devrait être aussi présent dans les écoles, s’intéresser aux apprentis. Beaucoup n’ont pas conscience que les syndicats les représentent.»


Doris Schmidhalter-Näfen, éducatrice, présidente d’Unia Valais et députée PS au Grand Conseil

Portrait«Nous ne devrions jamais avoir de guerre. Ce n’est que tristesse et morts… Je ne suis pas sûre que Poutine soit le seul à avoir fait des erreurs. Les USA et l’Europe n’ont pas non plus trouvé de compromis pour éviter cette guerre.

Concernant le congrès, l’essentiel sont les papiers de position et le lancement d’une initiative. Je suis déçue qu’elle ne portera pas sur la réduction du temps de travail, qui est un objectif concernant tout le monde. Et qui améliore les conditions des femmes, de leur santé et leur permet de mieux concilier vie privée et vie professionnelle. La protection contre les licenciements touche moins de personnes. Ce sera plus compliqué d’argumenter lors des récoltes de signatures. Le congrès a rejeté l’initiative sur la durée du travail, mais j’ai l’espoir que l’assemblée des délégués de l’USS rectifiera.

Comment renforcer le syndicat? Le travail syndical ne se fait pas par e-mail, mais par les rencontres, les visites aux salariés, dans les entreprises, dans la rue et à travers une visibilité dans les médias, avec des conférences de presse. Par e-mail, on ne peut pas gagner des membres, ni faire un bon boulot syndical.»


Vanessa, spécialiste en restauration, Groupe d’intérêts femmes de Neuchâtel

Portrait.«Je n’ai aucune inquiétude face au Covid. Je suis vaccinée. Ni sur la guerre, les obus ne nous tombent pas sur la tête. Par contre, il est clair qu’on va vers une hausse des prix de l’essence, du chauffage, vers une nouvelle crise financière. Je reste attentive à ce qu’il se passe, mais sans paniquer. J’ai assez confiance en la neutralité de notre pays. Bien sûr, le peuple suisse va subir les dommages collatéraux, mais nos besoins seront assurés.

La priorité du syndicat? Unia ne doit pas oublier son objectif principal: la défense des travailleurs, des emplois, des salaires. Il ne doit pas s’éparpiller sur d’autres choses, comme cette discussion sur la guerre. La réduction du temps de travail est très importante. D’autres pays l’ont fait. Pourquoi pas nous? Travailler moins, c’est aussi avoir une meilleure santé. Dans mon métier et dans la vente, beaucoup de collègues ont dû se faire opérer ou souffrent du dos. Les salaires doivent être augmentés, à 25 francs l’heure au moins. Avec 20 francs brut, il ne reste rien une fois les déductions faites. Unia doit aussi se battre pour la qualité du travail, le respect. Combien de patrons parlent mal au personnel?

Il y a d’énormes combats à mener. Mais c’est très difficile de recruter et d’inciter les membres à s’investir. J’ai adhéré par besoin face à un employeur, puis je me suis engagée. Je suis une personne qui déteste l’injustice et qui défend les autres. Ça me tient à cœur.»

Pour aller plus loin

Pause café militante avec Didier Zumbach

Pause café militante avec Cesar

La protection contre les licenciements antisyndicaux de nouveau sur la table

militants syndicaux devant le Palais fédéral

L’Union syndicale suisse exprime sa satisfaction à la suite de la décision du Conseil fédéral de reprendre la médiation sur la question des licenciements de représentants du personnel.

Pause café militante avec Cyprien Baba

Cyprien Baba, coprésident du groupe d’intérêts Migration d’Unia, multiplie les engagements, au niveau politique, associatif et syndical.