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85% du personnel de vente rejette le travail 24h sur 24

Les résultats d'une enquête commandée par Unia montrent que les employés du secteur sont préoccupés par les horaires de travail

Le 13 août, Unia a convoqué les médias pour leur présenter les résultats d'un sondage réalisé dans le commerce de détail. Le message qui en ressort est clair: le personnel de la branche est massivement contre un élargissement des horaires de travail, déjà jugés trop longs. L'enquête révèle aussi que cette extension des heures d'ouverture ne créera pas d'emploi, contrairement à l'argumentation patronale. Explications.

Alors que le peuple devra se prononcer le 22 septembre prochain sur la libéralisation des heures d'ouverture des shops des stations-service, une enquête révèle que 85% du personnel de vente dans le commerce de détail est contre le travail 24 heures sur 24. Commandée par Unia et réalisée par l'institut GfK Switzerland SA auprès de 300 vendeurs de toute la Suisse, l'enquête porte sur les horaires et les conditions de travail dans la branche. Ses résultats ont été présentés le 13 août à la presse. «Nous faisons régulièrement état de la situation dans la vente pour mesurer l'évolution des conditions de travail et les préoccupations des salariés du secteur, explique Arnaud Bouverat, membre de la direction du secteur tertiaire d'Unia. Cela nous permet aussi de recadrer le débat populaire auquel nous serons confrontés.»

Jusqu'à 12 heures par jour
Plusieurs points sont mis en lumière dans l'enquête. D'abord les horaires de travail, jugés trop longs par 36% des personnes interrogées. En effet, 72% des sondés sont présents sur leur lieu de travail 8 à 12 heures par jour en semaine, dont 37% y sont 10 à 12 heures. «Nous nous attendions à ces résultats, ajoute le syndicaliste. Les horaires sont la principale préoccupation du personnel de vente, avant même les salaires (25% se plaignent des salaires trop bas et 24% du stress et de la pression au travail*, ndr). C'est un signal très fort.» Alors à la question «Seriez-vous prêt à travailler le soir, la nuit ou le dimanche ?», la réponse est claire: non à 85%. «Cela concorde avec des études menées dans les années 2000 où les chiffres étaient du même ordre, complète Arnaud Bouverat. Cela montre une stabilité de l'opposition dans ce domaine.»

Pas d'emploi créé
Par ailleurs, il apparaît que, contrairement à ce que prétendent les partisans de la révision de la Loi fédérale sur le travail, l'élargissement des horaires ne créera pas de postes de travail. Et pour cause, les sondés dont le magasin où ils sont employés a vu ses heures d'ouverture prolongées affirment que ce changement a été compensé dans 46% des cas par un allongement de la durée de travail, à 7% par une intensification des tâches et des responsabilités confiées et à 6% par une flexibilisation du travail (horaires prolongés ou morcelés). «L'élargissement des horaires se fait sur le dos des employés actuels, dénonce Arnaud Bouverat. Et cette enquête démontre que l'extension des heures de travail, si elle est avalisée, aura des conséquences majeures en termes de précarisation de l'emploi au lieu d'en créer. Il s'agit de casser un mythe que les patrons ont lancé sans jamais le justifier.»

Donner un signal fort
En attendant la votation, Unia se montre optimiste. «Au vu des résultats des précédentes votations cantonales, nous devons partir confiants, ose Arnaud Bouverat. Le fait que les consommateurs soient satisfaits des heures actuelles d'ouverture et protègent le dimanche et la soirée en termes de temps libre sont de bons préalables pour gagner le 22 septembre.» Mais pour cela, il faudra une forte mobilisation. «Le travail 24 heures sur 24 est le premier objet d'une longue série de tentatives de démantèlement de la protection des salariés de la vente, il est donc important de donner un signal clair dès le début!»
Manon Todesco

 


L'urgence de régir le secteur
Face à la précarisation du personnel de vente et à la flexibilisation qui leur est toujours plus imposée, la nécessité de négocier une convention collective nationale de travail dans le commerce de détail a été rappelée. «Une CCT devrait aller de soi dans une branche employant 300 000 personnes et dans un pays se vantant de la qualité de son partenariat social», défend Vania Alleva, coprésidente d'Unia. Le syndicat s'est engagé à continuer sa lutte aux niveaux local et national afin de fixer des règles contraignantes dans le secteur, à savoir des salaires minimums, l'égalité salariale, la retraite flexible, la fin du travail sur appel ou encore les horaires.
MT


Provocation patronale
Dans un article paru le 26 juillet dernier, Le Courrier a relevé la présence d'affiches et de prospectus pour le moins interpellants dans une station-service genevoise. Lancée par l'Association des exploitants de stations-service suisses, cette campagne d'affichage avertit de la supposée dégradation de la situation des shops en cas de «non» le 22 septembre. «Menacés de devoir réduire leur assortiment» peut-on lire sur ces affiches, alors que les prospectus ajoutent que les shops seront contraints de licencier du personnel si la modification légale est refusée. Selon les syndicats, qui prennent cette campagne comme une provocation patronale, ces arguments sont sans fondement. «Ils tentent clairement de déplacer le débat: la question des assortiments est totalement hors sujet», regrette Arnaud Bouverat, membre de la direction du secteur tertiaire chez Unia.
MT