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Camping de Lignières: trouver une solution avec le cœur

Un jour, alors qu’elle participait à un club de lecture à la prison pour femmes de Fleury-Mérogis, la romancière Nancy Huston s’est vue interpellée par une détenue qui lui a dit: «A quoi sert d’inventer des histoires, alors que la réalité est déjà tellement incroyable?» 
Cette dame a raison, on lit quotidiennement, dans notre journal, des choses que l’on n’aurait décemment pas pu imaginer.
Ainsi, ce qui se passe au camping de Lignières.
Avant de lire l’article de Florence Veya dans Arcinfo du 23 octobre, j’étais loin de me douter qu’il y a, dans notre canton (Neuchâtel), en 2021, près de 177 personnes qui n’ont d’autre choix que de vivre dans les 25–40 m2 d’un mobil home et de passer ce qui leur reste à vivre dans un camping, comme les semi-nomades qu’ils sont devenus. Ils sont en quelque sorte des gens du voyage qui ne voyagent pas.
Comme ils ne sont ni locataires, ni propriétaires (ou les deux), ils ne sont protégés par aucune loi et sont à la merci de règlements arbitraires. Ou absurdes.
En matière d’absurdité, ce qui se passe à Lignières mériterait de figurer dans une nouvelle de Borges. En résumé, 37 semi-nomades ont choisi de poser leur misère au camping de Lignières.
La commune a choisi d’appliquer la loi. Ceux qui résident à l’année sur le territoire d’une commune doivent y déposer leurs papiers. Dans le cas de nos 37 semi-migrants, cela est impossible car, selon la convention passée entre la commune et l’exploitant du camping, les «campeurs» ne peuvent pas y résider plus de 150 jours par année.
Qu’à cela ne tienne, rétorquent les autorités, les quasi-roms ont jusqu’au 22 juin 2022 pour trouver une adresse à Lignières qui ne soit pas celle du camping. Sinon…
Sinon quoi, au juste?
Que se passera-t-il, le 23 juin 2022 au matin si Messieurs Henri et Marcel (noms d’emprunt) ainsi que quelques autres refusent de partir et s’enchaînent à leur caravane.
Nul doute que M. Hadorn, le président, sûr de son bon droit fera intervenir la force publique.
On imagine déjà les gendarmes de la République traîner quelques pauvres vieux vers des fourgons pour les emmener… Les emmener où, en fait?
Est-ce qu’on brûlera les caravanes, ces «heimatlos» modernes, pour les empêcher de revenir, comme à Calais?
Evidemment, tout sera abondamment filmé et posté sur YouTube et autres réseaux.
Le monde entier tapera «expulsion lignieres» et verra la face cachée de la Suisse. Toute l’Europe se réjouira de montrer comment, en fait, ces donneurs de leçon de Suisses n’ont rien à envier aux Grecs et aux Hongrois en matière de traitements dégradants d’êtres humains.
Afin d’éviter ce dégât d’image à notre canton (et à notre pays), j’invite «nos» Autorités à se montrer inventives. Je propose que les services de Mme la conseillère d’Etat Nater, en charge de l’Action sociale, créent une sorte d’immeuble virtuel à Lignières, un peu comme ces sociétés boîtes aux lettres à Zoug. Cela permettrait à ces 37 personnes de déposer leurs papiers avec une adresse à Lignières, qui ne serait pas celle du camping. Faisons confiance aux juristes pour que cela ait l’aspect de la légalité. Pour une fois que ce système profiterait aux pauvres.
Quant à la Commune de Lignières, qu’elle déchire le contrat qui la lie avec le gérant et qu’elle en signe un autre sans clause de limite de séjour.
En résumé, trouver une solution à ce désolant problème avec le cœur plutôt qu’avec le droit.
Car parfois, surtout en politique, le ridicule peut tuer.

Christian Weber, La Chaux-de-Fonds.

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