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Construction: les syndicats sur le pied de guerre

La préparation de la mobilisation contre la dénonciation de la convention collective par les patrons a débuté sur le terrain

Les travailleurs genevois du gros œuvre sont appelés à se rassembler en masse le 18 juin à Genève. La lutte contre la résiliation de la convention collective qui a démarré à Genève, comme dans toute la Suisse, sera décisive pour l'ensemble des travailleurs du pays.

Plus de cent ans de luttes rayées d'un trait de plume? Unia a décidé de mettre le paquet contre la résiliation par les patrons de la convention collective nationale de travail dans la construction qui garantit les droits des travailleurs des chantiers. Une convention dont la base date de 60 ans! Salaires minimaux, retraite anticipée, 13e salaire, régulation des horaires de travail sont autant d'acquis qui ne seront plus assurés à partir de fin septembre. «Et cette décision concerne tous les travailleurs. Car si on ne se mobilise pas, on peut être sûr que viendra le tour des autres secteurs», explique Antonio Pinto, secrétaire syndical à Unia Genève.
Dans la ville du bout du lac, les trois quarts des collaborateurs d'Unia sont mobilisés sur le terrain toutes les matinées depuis la fin mai. Dès 8h15, la petite fourmilière équipée de T-shirts rouges Unia, casques et tracts en plusieurs langues se met en route: «Nous avons déjà parcouru environ 70 chantiers afin d'informer et de sensibiliser les travailleurs», assure Antonio Pinto au matin du mardi 5 juin.

«A quand la grève?»
D'ici le 18 juin, date du rassemblement massif prévu à Genève, c'est l'ensemble des chantiers qui sera parcouru. Ceci en étroite collaboration avec le Syndicat interprofessionnel de travailleuses et de travailleurs (SIT) et Syna, chaque organisation s'étant vu attribuer une zone du canton. «On ne se fait pas trop de souci pour arriver à mobiliser les gens. La décision des patrons préoccupe tout le monde», témoigne Alessandro Pelizzari, secrétaire syndical à Unia. Les autres syndicats font un constat semblable: «Nous recevons un bon accueil. Certains nous demandent pourquoi nous n'entamons pas 3 ou 4 jours de grève d'entrée», raconte Thierry Horner, du SIT.
Mais la tâche s'avère parfois ardue. Sur une baraque du chantier du tramway à la rue de la Servette, les cinq ouvriers portugais présents ce mardi à l'heure de la pause ne se montrent pas très bavards. Antonio détaille dans leur langue les conséquences de la décision patronale et les encourage à manifester. Certains demandent si cela les concerne vraiment. Venus travailler depuis le canton de Vaud, ils sont informés qu'il s'agit bien d'une convention nationale. «C'est la difficulté avec les ouvriers d'autres cantons. Ils ne se sentent pas nécessairement touchés et ils ne connaissent pas bien notre travail à travers les précédentes mobilisations», explique Antonio. «A nous de les convaincre, nous repasserons la semaine prochaine.» Un travail de longue haleine...

Prêts à se mobiliser
A midi, une vingtaine d'ouvriers avalent en vitesse quelques saucisses sur le chantier de la station d'épuration du Bois-de-bay à Vernier. Antonio en profite pour les informer avec verve et conviction, toujours en portugais. Le militant sera vite interrompu: «Il est bien temps de faire quelque chose. Ces dernières années, le syndicat se laisse aller», tranche un travailleur. Un sentiment partagé par une partie des ouvriers, confient les syndicalistes, en raison de l'échec des négociations salariales de cet hiver, notamment. Mais aussi parce que le compromis sur la flexibilité du travail fait par Unia en 2005 dans le cadre du paquet sur les bilatérales - en échange d'une revalorisation de 106 francs - a été mal perçu par une partie des travailleurs. D'où la valeur de test que relève la prochaine mobilisation du 18 juin...
Alessandro s'approche ensuite des rares ouvriers non portugais: «Vous allez perdre jusqu'à 10000 francs par année. Malgré les promesses des patrons, dès que vous changerez d'employeur, ils en profiteront pour revoir vos salaires à la baisse.» Convaincus, deux jeunes frontaliers se disent prêts à se mobiliser. Mais pas seuls: «En France on ne peut pas te virer comme ça. Mais ici j'ai peur. Je viens de passer à un contrat fixe. J'ai beaucoup à perdre si on me sanctionne», témoigne le jeune Nadir. Son collègue Mohamed prévient: «J'espère que les syndicats feront tout pour fermer le chantier ce matin-là. Sinon, beaucoup continueront à bosser.»

Ce n'est qu'un début
Remigiousz, l'un des quatre polonais du chantier, nous confie: «De toute façon, cela ne me concerne pas. Je gagne 25 francs de l'heure et n'ai aucun espoir d'obtenir davantage.» Remigiousz se trompe. Il est soumis à la convention collective et sera d'autant plus touché qu'en raison de sa situation précaire de nouvel arrivant, avec permis L, il sera plus enclin à accepter des conditions de travail à la baisse, une fois la convention devenue caduque, le 1er octobre. Au Bois-de-bay aussi, il faudra revenir, estiment Antonio et Alessandro.
Si 2000 ouvriers sont attendus le 18 juin, la date ne fait qu'inaugurer la lutte, qui promet d'être longue. Unia pense très sérieusement à la grève au niveau suisse: «Pas de convention, pas de travail!» Mais la mobilisation devra aller crescendo. Le plan d'action sera discuté le 16 juin par les délégués d'Unia à la Conférence de la construction à Berne.

Christophe Koessler



Tous mobilisés le 18 juin à Genève!

Les syndicats Unia, Sit et Syna appellent tous les travailleurs de la construction à une manifestation de protestation le lundi 18 juin dès 7h du matin, et jusqu'à 11h, à la place des Vingt-Deux-Cantons à Genève (à côté de la gare). Une assemblée générale s'y tiendra. Premier rendez-vous avant la mobilisation au niveau suisse!