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Le personnel de vente dénonce des conditions de travail de plus en plus dégradantes

Unia a organisé un colloque national à Berne réunissant vendeurs, syndicat, employeurs et chercheurs

Les conditions de travail du personnel de vente sont de plus en plus alarmantes. Pour en débattre, Unia a convoqué tous les acteurs du secteur lors d'un colloque national le 3 juillet dernier. Alors que le syndicat lutte pour mettre en place une CCT de branche, le patronat souligne son inutilité.

Le colloque national sur les conditions de travail du personnel de vente intitulé «Branche à bas salaires sous pression: est-ce au personnel d'en faire les frais?», organisé par Unia à Berne le 3 juillet dernier, a réuni une cinquantaine de personnes. Vendeurs, syndiqués, chercheurs mais aussi un représentant patronal étaient présents pour défendre leur point de vue.
Rappelons que le commerce de détail est la deuxième plus grande branche économique en Suisse et emploie plus de 320000 personnes. Nombre de ces travailleurs dénoncent une dégradation de leurs conditions de travail due notamment à la concurrence accrue entre les différentes enseignes.

Produire plus avec moins de personnel
Les critiques sont récurrentes: des salaires trop bas, des journées trop longues, le travail à temps partiel ou sur appel, l'absence de plan de carrière, une hausse du stress et de la pression subie en raison d'effectifs réduits, et au final, une santé qui se dégrade. «Une vendeuse n'a pas de vie sociale!» relève une employée de commerce retraitée et membre de la section syndicale de Vevey. «Nous sommes soumis à des conditions de travail éprouvantes, à une pression grandissante. J'ai moi-même vu mon état de santé se détériorer en l'espace de trois ans», confie-t-elle.
Dans sa nouvelle brochure*, Unia rapporte que la productivité des employés dans le commerce de détail a explosé de 23% entre 2000 et 2009, alors que, en parallèle, 10% des salariés à plein temps gagnent moins de 3673 francs par mois.
«Le marché est saturé. Les entreprises se battent pour gagner des parts de marché, et cette concurrence s'exerce toujours plus au détriment des employés», déplore Vania Alleva, responsable du secteur tertiaire et membre du comité directeur d'Unia.
Différents témoignages filmés de vendeuses ont ensuite été diffusés à l'assemblée. L'une d'entre elles a évoqué la difficulté de concilier vie professionnelle et vie familiale: «Je vois rarement mon conjoint. Souvent, on n'a même pas la possibilité de passer un jour ensemble.»
Le problème du temps partiel, en majorité féminin, a aussi été abordé. Présenté par les patrons comme un moyen de concilier travail et famille, il est en réalité une spécificité féminine et «la solution pour l'employeur de flexibiliser l'emploi», selon Magdalena Rosende, sociologue du travail à l'Université de Lausanne.

Une CCT de branche jugée inutile par les patrons
Enfin, une table ronde a conclu cette journée et permis la confrontation des revendications syndicales et patronales.
Vania Alleva a rappelé l'urgence du besoin exprimé par les travailleurs d'être protégés par une convention collective de travail (CCT) de branche, inexistante pour le moment. De son côté, Bruno Frick, président de Swiss Retail, association patronale, a soutenu le caractère inutile d'un tel pacte. «Une CCT n'est ni nécessaire ni demandée par nos collaborateurs; ils n'en veulent pas. Le partenariat social se déroule à merveille, il n'y a qu'une minorité qui est mécontente», a-t-il déclaré, en rappelant que les salaires de la branche étaient nettement meilleurs en Suisse que dans les pays voisins. Les réactions ont été vives dans l'auditoire (voir ci-dessous). Bruno Frick a ensuite expliqué que le franc fort était à l'origine des problèmes de la branche et notamment des suppressions de postes: à cause de la perte en matière de bénéfices, il faut faire des économies sur le personnel. Pour contrer le «tourisme des achats», Bruno Frick propose d'ailleurs l'extension des heures d'ouverture des magasins. «Il y a une forte demande de la population qui se replie sur les pays voisins pour aller faire ses courses le soir. C'est un besoin sociétal que l'on ressent aussi à travers le succès des magasins dans les aéroports et les gares ouverts le dimanche.» Un argument jugé invalide par les autres parties présentes qui ont mis en avant le rejet de la prolongation des ouvertures lors de plusieurs votations. «A partir de 19h, il n'y a plus de client, les gens flânent dans les rayons mais n'achètent rien», témoigne un travailleur de la Migros.


Manon Todesco

* La brochure peut être commandée à tertiaire@unia.ch