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Le travail temporaire doit rester une exception

Unia Genève dénonce une nouvelle fois l'entreprise Gestrag qui ne recense aucun travailleur fixe

L'entreprise de démolition et de terrassement Gestrag a encore remporté un gros chantier public, celui du chemin de l'Etang, à Vernier. Sur le terrain, pourtant, aucun ouvrier n'est salarié directement par la société, qui recourt quasi exclusivement à des intérimaires. Naïveté ou complaisance de la part des élus? Unia pose la question et prie ces derniers, mais aussi l'Etat et les employeurs du secteur de se mobiliser pour faire cesser cette pratique «inadmissible».

Le 14 septembre, Unia Genève a donné rendez-vous aux médias à Vernier, au chemin de l'Etang, un quartier en pleine mutation. Sur ce chantier, l'un des plus importants du canton actuellement, opère l'entreprise Gestrag SA, active dans la démolition et le terrassement. Le hic, c'est qu'elle ne recense, à la connaissance d'Unia, aucun salarié... «Aujourd'hui, il y a six travailleurs, informe José Sebastiao, coresponsable du gros œuvre chez Unia. Cinq temporaires et un fixe employé par PRO TP SA.» La méthode est la suivante: Gestrag SA remporte le marché et fait aussitôt sous-traiter son travail par une autre entreprise aux mains des mêmes administrateurs, PRO TP SA. Cette dernière n'a qu'une vingtaine d'employés à Genève mais prend tous les chantiers de Gestrag SA en engageant, pour ces derniers, exclusivement des travailleurs temporaires. Selon les sources d'Unia, ils seraient entre 50 et 70. «Ce n'est pas illégal, mais moralement c'est inadmissible» tempête José Sebastiao.
L'entreprise n'en est pas à son coup d'essai. En avril 2016, les syndicats genevois l'avaient déjà épinglée sur le colossal chantier des Vergers à Meyrin. «Elle recourait déjà massivement au travail temporaire avec plus de 60% de maçons intérimaires, rappelle Yves Mugny, responsable du bâtiment chez Unia. On espérait que des mesures soient prises entre-temps mais au contraire, la situation empire chez Gestrag, et elle continue à remporter les gros marchés publics.»

Revendications
En 2015, les maçons s'étaient mobilisés notamment sur la question du recours de plus en plus fréquent aux temporaires, engendrant la précarisation des travailleurs du secteur. «Les intérimaires n'ont aucune garantie d'emploi, ils sont jetables du jour au lendemain et employés au minimum de la convention bien que souvent qualifiés», insiste Yves Mugny. Et d'ajouter: «Deux autres problèmes se posent: le risque de perdre une partie ou l'entier de la retraite anticipée, et le fait que les entreprises reportent le risque entrepreneurial sur la collectivité publique, à savoir le chômage.»
Dans ce contexte, Unia demande que tous les acteurs du canton, à savoir les politiques et les employeurs, aient une prise de conscience afin de changer la donne. D'abord, que la commune de Vernier exige de Gestrag qu'elle engage de la main-d'œuvre fixe sur son chantier. «Nous avons proposé à Vernier mais aussi à Meyrin de conclure des accords communaux avec le syndicat, informe Yves Mugny. Mais à part de belles intentions, aucun accord n'a été finalisé à ce jour. Comment peut-on accorder un chantier à une entreprise qui n'a pas de travailleur pour assumer les travaux? Est-ce de la naïveté ou de la complaisance de la part de nos élus? Nous posons la question...»
De même, Unia prie le Conseil d'Etat de revenir sur son Règlement sur la passation des marchés publics afin de limiter à 10% le taux d'intérimaires sur les chantiers, comme au Tessin. «Le travail temporaire doit rester l'exception, et non pas la règle, reprend le syndicaliste. Ce règlement est bidon, il n'empêche en rien les entreprises à limiter l'emploi de travailleurs intérimaires.»
Enfin, le syndicat appelle les maçons genevois à se mobiliser massivement le 19 et le 21 octobre pour améliorer les protections et les salaires de la profession. «Un protocole d'accord a été signé en 2016 avec les patrons genevois pour améliorer la protection des travailleurs âgés contre les licenciements, mais il n'est toujours pas appliqué car la centrale de la SSE bloque le processus», s'indigne Yves Mugny.

Manon Todesco



Swissstaffing recourt contre le nouveau règlement
Alors qu'Unia se bat pour que le règlement cantonal soit plus restrictif au niveau du travail temporaire sur les chantiers de la construction à Genève, pour Swissstaffing, association nationale des entreprises de travail intérimaire, la législation est loin d'être suffisante. Celle-ci a formulé un recours contre ledit règlement, qui selon elle «porte atteinte à la liberté économique des entreprises de travail temporaire», afin qu'il soit invalidé et que la clause qui limite le travail temporaire soit retirée. L'affaire est entre les mains du Tribunal cantonal.

MT