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On n’est pas sorti de l’auberge...

Compromis «historique» pour certains, coquille vide pour d’autres: l’accord trouvé à l’issue de la 28e Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques (Cop28), clôturée la semaine passée, a suscité des commentaires mitigés. Pas de quoi se montrer optimiste toutefois. Si la convention mentionne pour la première fois la nécessité de s’éloigner du pétrole, du gaz et du charbon, elle n’exige pas clairement leur abandon et ne fixe aucun calendrier dans ce sens. Le document mise sur une transition «juste, ordonnée et équitable». Notion pour le moins vague, permettant à chaque Etat d’interpréter comme il l’entend la proposition et d’avancer à son propre rythme. Comme si nous ne jouions pas la montre. L’arrangement n’écarte pas non plus, dans le mixte énergétique, le recours au nucléaire, passant outre la grave problématique des déchets. Et intègre, au rang des solutions potentielles, des technologies controversées de captation et de stockage de carbone. Satisfaction pour le moins modérée également en ce qui concerne l’aide aux pays du Sud, subissant déjà de plein fouet les conséquences du dérèglement climatique, avec un financement bien en-deçà des attentes. Une situation d’autant plus injuste que leur responsabilité dans la crise environnementale s’avère nettement moins engagée. Enfin et surtout, le document, bien qu’arraché au forceps, n’est pas contraignant. Quoi qu’il en soit, au regard des grands-messes pour le climat qui l’ont précédée, on n’espérait pas davantage de cette Cop28 organisée dans une pétromonarchie et qui a fédéré pas moins de 2500 lobbyistes des combustibles fossiles. Un nombre pulvérisant tous les records. Et cela alors que cette année a aussi atteint des sommets de température, d’émissions de gaz à effet de serre, de consommation de charbon et de vente de brut. Autant dire que les alarmes répétées des scientifiques sont à ce jour restées des cris dans le désert. Et les progrès que certains préfèrent retenir de cette réunion, des pas certes bienvenus, mais en parfait décalage avec l’urgence d’agir.

La Suisse, par la voix de l’Office fédéral de l’environnement, a jugé de son côté le résultat de la conférence onusienne «positif». Et a souligné que, en tant que petit pays, elle dépendait des efforts conjoints de tous. Une réalité qui ne la dispense pas pour autant d’en faire davantage. Bien au contraire. Et ce d’autant plus que, si la population mondiale consommait autant que ses habitants, il faudrait recourir aux ressources de 2,8 planètes. Dans ce sens, on est à même d’attendre des autorités qu’elles se mobilisent nettement plus en faveur de la sortie des combustibles fossiles. Qu’elles mettent les bouchées doubles pour exploiter le potentiel des énergies vertes. L’examen au Parlement de la Loi sur le CO2 portant sur la période après 2024 doit clairement témoigner de cette volonté. Et, dans ce sens, exclure la solution de facilité qui consiste à acheter des droits de polluer à l’étranger pour atteindre les objectifs de réduction des gaz à effet de serre fixés à 2030. Un mécanisme de compensation indigne d’un pays aussi riche que le nôtre qui nous permet de poursuivre notre mode de vie en misant sur les efforts d’Etats aux moyens bien plus limités. Une aberration comme la poursuite d’investissements de banques suisses dans des entreprises actives dans les énergies fossiles, le Conseil fédéral comptant sur leur engagement volontaire. Et sachant encore que la Banque nationale suisse vient d’être interpellée par ses actionnaires et via une pétition signée par 60000 personnes, sous l’impulsion de l’Alliance climatique suisse, pour qu’elle renonce à soutenir des sociétés actives dans la fracturation hydraulique. Une méthode d’extraction ultrapolluante de pétrole et de gaz qu’elle cautionne à hauteur de 9 milliards de dollars...