RSF Façades les travailleurs exigent leur dû
Epaulés par des représentants d'Unia des travailleurs de RSF Façades ont réclamé au nouvel employeur de leur société 839'707 fr.
Branle-bas de combat jeudi dernier à Saint-Prex, devant le domicile de C.R. Sous une pluie battante, une délégation d'une quarantaine de personnes - formée de travailleurs de RSF Façades et de militants d'Unia - est venue réclamer des comptes au nouveau propriétaire de l'entreprise spécialisée dans la plâtrerie, peinture et isolation et mise en faillite le 10 septembre dernier. Plus précisément, les ouvriers - qui n'ont pas été payés pour le travail fourni entre juin et septembre - ont exigé le versement de 839707 francs d'arriérés de salaire. C.R., le récent propriétaire de RSF Façades comptant 43 employés, n'est pas un inconnu du syndicat pour avoir fait des faillites à répétition son fonds de commerce. En six mois, plusieurs sociétés actives dans la construction dans le canton de Vaud lui ont confié «le soin» de liquider leur entreprise.
Une ardoise de 2,1 millions de francs
«L'homme rachète, contre rémunération, des entreprises qui ont des dettes. Dans certains cas comme celui-ci, il continue à faire travailler le personnel sans le payer - personnel qui ignore tout de ce qui se trame jusqu'à la liquidation - puis met la société en faillite», explique Matteo Antonini, secrétaire syndical d'Unia, relevant que c'est la troisième grosse faillite de cet entrepreneur depuis le début de l'année. «Il laisse derrière lui une ardoise de 2,1 millions de francs principalement à la charge des travailleurs et de l'Etat», poursuit le représentant syndical dénonçant le vide juridique permettant cette situation. «Unia demande que la loi en la matière soit changée. Il faut mettre un terme à l'hypocrisie d'un système qui permet des sous-traitances en chaîne, la fixation de prix et de prestations au rabais avec, pour conséquence, l'engagement d'une main-d'œuvre bon marché, sans droits, toujours plus précarisée et exploitée.»
Révoltés...
Deme (prénom d'emprunt), à l'image de ses collègues de RSF Façades, en sait quelque chose. Originaire du Kosovo, cet homme de 39 ans père, de trois enfants de 10, 7 et 3 ans, a travaillé de juillet jusqu'au 20 septembre pour ne toucher qu'un acompte de 1500 francs. «Le patron me doit entre 16000 et 17000 francs», s'énerve le travailleur, résolu à se battre. «Nous sommes là pour ça. Il faut que je puisse nourrir mes gosses restés au Kosovo», poursuit-il indigné. «Nous avons tous fait confiance à l'entreprise et continué à travailler. Nous pensions qu'il allait nous payer. Jamais je n'aurais pensé qu'un patron suisse puisse agir de la sorte. C'est la première fois que j'affronte une situation pareille.» Son collègue Alban (prénom fictif), 24 ans, depuis dix ans en Suisse, a pour sa part débuté le travail à la mi-juin et terminé à la fin du mois dernier. Il n'a touché à ce jour que 1000 francs de l'entreprise. «J'ai dû faire des dettes. Le patron me doit quelque 15'000 francs», raconte le jeune homme acculé de surcroît au remboursement de ses emprunts. «Je suis révolté. Mais nous allons parvenir à récupérer l'argent. On ne veut que la justice.»
Prestations à payer directement aux travailleurs
Une pile de reconnaissances de dettes en main, Matteo Antonini et la délégation Unia sonnent à la porte de R.C. dans l'espoir de lui faire signer ces dernières. Il tente aussi de joindre son interlocuteur par téléphone. En vain. Mais à peine a-t-il tourné les talons que l'homme d'affaires le rappelle sur son portable. Il affirme se trouver à l'étranger et promet de passer la semaine prochaine au secrétariat d'Unia. L'Evénement syndical a aussi tenté de l'atteindre. Et laissé un message sur son portable. Sans succès. A l'heure où nous mettions sous presse, lundi passé, C.R. n'avait pas honoré sa promesse. «Les factures relatives aux prestations fournies par les travailleurs n'ont certainement pas encore été réglées. Nous demandons que cet argent leur soit versé. Ou qu'il leur soit rendu, s'il a déjà été perçu. Au cas où nous n'arrivons pas à récupérer les sommes dues, elles seront, sous certaines conditions, à charge de la collectivité.»
Sonya Mermoud