Sur les chantiers de l'égalité
Directrice de Pacte, Françoise Piron s'engage pour une plus grande mixité au sein des entreprises
La confiance pour moteur
Formations ciblées où sont notamment évoqués les «freins intérieurs» générés par la pression sociale, mise en place de mentorat, création de réseaux, expertise dans les entreprises, organisation de «Café Emploi»... Françoise Piron entend bien ancrer dans la réalité le slogan de Pacte, «de la parole aux actes». Et offrir aux intéressées non seulement un espace d'écoute et d'enseignement mais de véritables opportunités de débouchés à la clef. Avec une énergie, un optimisme et une force de conviction fédérative. Animée d'une confiance inaltérable en la vie - quand bien même son association s'est parfois retrouvée sans le sou. Et dotée d'une capacité à «jeter des ponts entre les êtres». Une image que la Lausannoise de 50 ans n'a pas choisie au hasard, elle qui s'est formée comme ingénieure en génie civil à l'EPFL. «A l'époque, cette décision a suscité des mines dubitatives. J'étais regardée comme une extraterrestre ou presque», se souvient-elle amusée. Pas de quoi décourager l'étudiante au caractère bien trempé, fascinée par les ouvrages d'art et leur aspect esthétique.
Douche froide
Son diplôme dans le domaine en poche, Françoise Piron décroche un poste dans la géotechnique. Equipée de bottes et d'un casque de chantier, elle se rend alors régulièrement sur le terrain où elle étudie les sols. Un travail qu'elle apprécie énormément même s'il la confronte au froid, à la boue... et qui la sensibilise largement à la condition des ouvriers. «Physiquement très dur... La retraite anticipée doit vraiment être accessible à cette catégorie de personnes» relève-t-elle. Sept ans plus tard, à 29 ans, Françoise Piron fait «un truc de fille». Elle attend son premier enfant. De retour de son congé maternité, c'est la douche froide. L'ingénieure est licenciée. «C'est à ce moment que je suis vraiment devenue féministe», affirme-t-elle. Son premier défi porte alors sur l'instauration du congé maternité payé.
Quelques années plus tard, l'EPFL, qui se souvient de Françoise Piron comme d'une étudiante militante, lui propose de créer dans ses murs un bureau de l'égalité. La proposition, novatrice, séduit l'ingénieure qui occupera ce poste à 30% puis à 60% durant huit ans. Et mettra en place différents outils visant à promouvoir des métiers scientifiques et techniques auprès des étudiantes. «J'ai notamment publié un livre présentant des femmes se réalisant dans plusieurs contextes: au sein de l'entreprise, avec leurs enfants, dans leurs loisirs... avec pour but de donner l'envie aux jeunes filles de concilier, elles aussi, différentes activités.» Parallèlement, Françoise Piron travaille à l'Office fédéral de l'environnement, à la protection des eaux.
Banques et syndicat
En 2002, elle lance l'association Pacte. «J'ai l'âme d'une cheffe d'entreprise. Je souhaitais créer la mienne. Et consacrer tout mon temps à aider les intéressées à mener de front leurs ambitions professionnelles et leurs envies d'enfant.» Briser les stéréotypes, promouvoir la confiance en soi, modifier la mauvaise image du pouvoir qu'ont souvent les femmes, valoriser leurs qualifications... Françoise Piron travaille sur nombre d'aspects. Sa clientèle se compose aussi bien de personnes individuelles que d'entreprises. Parmi ces dernières, principalement des banques, la grande distribution et... Unia. «Je mélange les publics cibles. Si les profils changent, les problématiques restent les mêmes.» Autant dire qu'il reste sur le terrain de l'égalité, quel que soit l'environnement, encore bien des progrès à faire. Avec son charisme et sa faculté à rassembler différentes compétences autour d'un projet, Françoise Piron entend bien y contribuer. Une autre manière pour l'ex-ingénieure en génie civil de concevoir et d'aménager l'espace commun en le conjuguant à une véritable mixité gagnant-gagnante.
Sonya Mermoud