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Travailler à la tâche ou prendre la porte

Unia Genève dénonce des licenciements abusifs chez Schaub SA où dix travailleurs ont été congédiés

Unia Genève a été mandaté par le personnel de Schaub SA, un fabricant de tableaux électriques pour le secteur du bâtiment. La vingtaine de collaborateurs employés à la production s'est vu imposer une modification de leur contrat de travail.

Unia Genève a dénoncé lundi dernier au cours d'une conférence de presse des licenciements abusifs chez Schaub SA. Active depuis les années 1990, cette société qui emploie quarante collaborateurs à Collonge-Bellerive et Meyrin est spécialisée dans la fabrication et la pose de tableaux électriques pour le secteur du bâtiment. «Fin mai, chaque travailleur employé à la production a été convoqué à un entretien individuel et placé face à un choix. On leur a dit: ‘soit vous devenez indépendant et travaillez comme sous-traitant, soit vous êtes employé à la tâche; et si vous refusez l'une ou l'autre de ces solutions, vous êtes licencié'», a expliqué devant le site de Collonge-Bellerive Blaise Ortega, secrétaire syndical d'Unia, entouré de salariés licenciés. «La vingtaine d'employés concernés n'a donc eu comme seules options que de se muer en ce que l'on désigne comme faux indépendant ou de travailler à la tâche, ce qui est interdit par la Convention collective de travail de la métallurgie du bâtiment. Trois salariés ayant refusé ces propositions ont été licenciés», indique encore le syndicaliste responsable de la métallurgie du bâtiment à Unia Genève. «Un mois plus tard, un nouveau contrat de travail a été présenté aux collaborateurs qui ont dû le signer sur le champ sans pouvoir l'étudier sous peine de licenciement. Le salaire mensuel a été transformé en salaire à l'heure et les horaires de travail sont très détaillés. La direction définit le temps nécessaire à chaque opération. En cas de dépassement, un rapport doit lui être soumis. Elle décide alors de rétribuer ou non le temps supplémentaire.» Au final, selon le secrétaire syndical, une dizaine d'employés ont été licenciés. Unia défend sept d'entre eux et a reçu mandat par une assemblée des travailleurs de représenter le personnel.

Virés comme des malpropres
«Mon chef m'a convoqué à huit clos pour me dire que la société n'était pas dans une bonne situation économique. Il m'a parlé d'un contrat à la tâche, je lui ai répondu que nous n'étions pas maître des dossiers, qu'on ne maîtrisait rien et que je n'étais pas d'accord», témoigne un salarié qui affiche treize ans d'ancienneté au compteur. «J'ai dit à mes collègues de faire attention et de ne pas signer, mais j'ai été dénoncé par quelqu'un et licencié sur le champ avec trois autres personnes. Le directeur et le chef nous ont accusés de ne pas vouloir nous retrousser les manches pour l'entreprise, ils nous ont accompagnés à la porte, on a pris nos voitures et on est rentré. J'ai appelé ma femme pour lui dire que j'étais viré. C'est épouvantable. Ça a été un choc, l'un de mes collègues pleurait et moi j'ai dû aller voir mon médecin», confesse ce père de deux enfants. «On a été amené à la sortie comme des malpropres», atteste un autre travailleur. «On a pourtant rien fait de mal, on a fait notre boulot, on était sérieux et on est fier de ce qu'on a accompli.» Les lettres de licenciement ne stipulaient aucun motif, mais, après demande, la direction de l'entreprise a fini par préciser ses griefs: un «rendement de travail ne correspondant pas aux attentes» et un «non-respect de certaines consignes» ont été signifié aux personnes licenciées. «C'est proprement hallucinant de qualifier d'improductif des salariés qui ont en moyenne dix ans d'ancienneté», commente Blaise Ortega. «En outre, les certificats de travail qui ne contiennent même pas le minimum sont une véritable insulte.»

Limiter la casse sociale
Lundi, Unia a contesté formellement les licenciements. «Ces licenciements sont abusifs, un congé-modification des contrats de travail nécessitant un respect du délai de congé. De plus, du simple fait que plus de dix personnes sont concernées, il s'agit d'un licenciement collectif, qui implique une annonce à l'Office cantonal de l'emploi et une procédure de consultation du personnel», précise Fabrice Berney, juriste d'Unia Genève. «L'employeur doit accepter de rencontrer les représentants du personnel et consulter les travailleurs. Il s'agit de limiter la casse ou, à défaut, de mettre en œuvre un plan social. Plusieurs salariés sont à deux ou trois ans de la préretraite et celle-ci n'est possible dans la métallurgie du bâtiment que si les dix dernières années sont pleines. Et l'on sait qu'à partir d'un certain âge, il devient difficile de retrouver un emploi», ajoute Blaise Ortega.
L'employeur n'a pour l'heure pas répondu aux sollicitations du syndicat, qui prévoit de saisir la Chambre des relations collectives de travail.

Jérôme Béguin