Les enfants d’un centre neuchâtelois pour requérants d'asile ne sont pas scolarisés dans un établissement public
Pour l’association neuchâteloise Droit de rester, la nouvelle procédure d’asile accélérée, qui entrera en vigueur le 1ermars, ne justifie pas que les enfants réfugiés soient privés d’une scolarité normale. L’organisation de défense des droits et des conditions de vie des réfugiés pointe le Centre fédéral pour requérants d'asile (CFA) de Boudry-Perreux, sur le Littoral neuchâtelois, qui est un centre pilote du nouveau dispositif. En janvier, il hébergeait 111 personnes, dont 18 enfants et 7 mineurs non accompagnés. Depuis l’automne dernier, une salle de l’établissement est proposée à l’enseignement. Les enfants de 4 à 8 ans y suivent huit périodes de cours par semaine, tandis que de 9 à 15 ans, ils en reçoivent douze. Notons que rien n’est prévu pour les adolescents de plus de 15 ans et que les Neuchâtelois scolarisés normalement bénéficient de 16 à 30 périodes hebdomadaires suivant leur niveau.
Militant de Droit de rester et, par ailleurs, secrétaire syndical d’Unia Neuchâtel, Edy Zihlmann dénonce une «démission de l’Etat»: «Pour nous, il est évident que tous les enfants doivent être scolarisés normalement dans une structure scolaire.» Dans un courrier envoyé en novembre, l’organisation a communiqué le problème à la conseillère d’Etat chargée de l’Education.
Monika Maire-Hefti a mis deux mois pour se fendre d’une réponse. Pour défendre sa politique, la magistrate socialiste use d’arguments pour le moins spécieux. L’instruction dispensée au sein du CFA répondrait «aux attentes de la Confédération» et présenterait également des «avantages au niveau du suivi des élèves»: «Cela permet, à titre d’exemple, de faciliter le contact entre le personnel enseignant et les parents, d’avoir une coordination efficiente entre le personnel enseignant et les collaborateurs du CFA et de gérer de manière optimale les situations où l’horaire de la classe n’est pas respecté.»
«Prison soft»
«C’est bien pour cela que tous les élèves du canton sont scolarisés dans leur immeuble… ironise Edy Zihlmann. C’est absurde. Monika Maire-Hefti élude clairement le problème. On ne peut qu’être outré par cette réponse.» Pour l’activiste, l’enseignement intra-muros n’est pas une obligation – le Conseil municipal de Zurich a ainsi décidé de placer les enfants d’un CFA dans les écoles publiques – et surtout pas une bonne idée. «Le CFA ressemble furieusement à une prison, une prison soft, mais une prison quand même. Ce n’est pas un lieu approprié pour y laisser des enfants. Il faut, au contraire, qu’ils puissent rencontrer d’autres enfants. Je me souviens que lorsque j’étais sur les bancs de l’école, on avait accueilli des enfants venus d’ex-Yougoslavie, ça n’a jamais posé problème. L’école la plus proche du CFA de Perreux est à cinq minutes, il suffirait de mettre à disposition un bus scolaire et d’ouvrir une classe d’accueil.» Ce qui demanderait un peu plus de moyens. Edy Zihlmann suppose que la question financière doit sans doute aussi jouer un rôle au moment où le Canton taille un peu partout dans les dépenses. «Et qu’en est-il des enfants de la communauté des gens du voyage? Avec cette mentalité, on ne risque pas de les scolariser non plus», craint le membre de Droit de rester.
Et de prévenir: «On va continuer à mettre la pression. On a commencé sur le sujet de la scolarisation, mais il y a une multitude de problèmes dans ce centre.»