Le dirigeant genevois de la FTMH Pierre Schmid nous a quittés
Une grande figure du syndicalisme vient de disparaître. Responsable de la FTMH à Genève de 1974 à 1985, puis secrétaire central du syndicat jusqu’en 1995, Pierre Schmid s’est éteint le 12 juillet dans sa 86eannée. Ce mécanicien avait réussi dans les années 1980 à faire de sa section la plus grande de Suisse, il a aussi posé des jalons sur le chemin de la création d’Unia.
Ouvrier monteur optique à la Société genevoise des instruments de physique (SIP), Pierre Schmid n’a pas 20 ans en 1951 lorsqu’il adhère à la Fédération suisse des ouvriers sur métaux et horlogers (la FOMH, qui deviendra la FTMH en 1972 avant de se fondre en 2004 dans Unia). Il va alors gravir un à un les échelons syndicaux. En 1962, il est élu président du groupe des métallos genevois, l’année suivante engagé permanent au syndicat et, en 1974, nommé responsable de la section. Il conserve une attitude modérée dans la tourmente autour du «Manifeste 77», qui pointait notamment l’absence de démocratie interne, et se battra pour empêcher le licenciement de certains de ses collègues. Contesté par les jeunes militants gauchistes, le «bonze Schmid» inscrit pourtant son action dans les grandes lignes affichées par le manifeste. L’impulsion de dynamiques militantes permettra à la section genevoise d’atteindre les 7000 membres dans les années 1980.
Le lien avec les militants
En 1985, il monte à Berne en tant que secrétaire central. Responsable de La Lutte syndicale, il utilise l’organe du syndicat pour créer des ponts avec les militants. Chaque semaine est publié le portrait d’un adhérent dans ce but. «Pierre, c’était le lien avec les membres. Il défendait les droits des militants et leur donnait la parole. Il avait à cœur de connaître les personnes avec qui il travaillait», explique Fabienne Kühn. Cette ancienne responsable du secteur industrie et membre du comité directeur d’Unia a mené avec lui des entretiens en 2001, qui ont été retranscrits dans l’ouvrage Pierre Schmid, souvenirs d’un syndicaliste FTMH, édité par le Collège du Travail (disponible sur collegedutravail.ch).
«Pierre a énormément développé les structures syndicales. A Genève, il a organisé la métallurgie du bâtiment, cela a permis aux travailleurs de militer ensemble et d’avoir des revendications communes. Il arrivait à rassembler dans une réunion 120 métallos venus de toute la Suisse romande. Ça s’est perdu aujourd’hui malheureusement, regrette Fabienne Kühn. Il a aussi joué un rôle important dans la mise en place de plusieurs plateformes tripartites, notamment en ce qui concerne la formation professionnelle. Il n’était pas tout seul, bien sûr, mais il a porté avec acharnement ces projets.» Pierre Schmid s’est également engagé en faveur des travailleurs immigrés et frontaliers. «Dans les années 1960 et 1970, il y a eu beaucoup de résistance dans le syndicat à l’intégration des étrangers, rappelle la syndicaliste. Pierre avait le courage de dire ce qu’il pensait, il ne s’est pas fait que des copains, il s’est parfois retrouvé seul, mais c’était un homme de parole, qui faisait ce qu’il disait.»
Parallèlement à son action syndicale, Pierre Schmid siègera au Grand Conseil genevois de 1966 à 1988 sur les bancs socialistes et occupera même le perchoir en 1981. Il mènera le combat pour la sauvegarde de l’industrie genevoise, dont le point d’orgue sera la montée de près de 5000 métallos à l’Hôtel de Ville en 1982. «Pierre pensait à l’avenir, avec d’autres, il avait compris qu’on devait avancer dans le secteur tertiaire et il a travaillé à faire d’Unia ce qu’il est aujourd’hui.»