La détresse pour cadeau...
Une trentaine de travailleurs licenciés de l’établissement genevois rattaché au groupe Boas sont privés de revenu depuis près de deux mois
A Genève, la fermeture de l’Atrium Airport Hotel laisse 33 employés sur le carreau. Ils ont manifesté lundi devant l’établissement et témoigné de leurs difficultés face à la presse.
Début novembre, Bernard Russi, le fondateur du groupe Boas auquel appartient l’hôtel, avait annoncé au personnel être obligé de tirer le rideau et de procéder à un licenciement collectif en raison de la situation économique et sanitaire. Mais l’homme d’affaires vaudois se voulait rassurant: le paiement des salaires serait effectué jusqu’à la fin du délai de congé. «Le 30 novembre, jour de paie, on consultait notre compte en banque et rien ne venait. A 17h, nous avons reçu un courriel disant que notre salaire ne serait pas versé dans les délais», raconte l’un des travailleurs. Les jours suivants, les salariés tentent d’obtenir des informations, mais ne reçoivent aucune réponse à leurs messages. Déjà amputés de 20% de leurs revenus depuis plusieurs mois en raison de la Réduction de l’horaire de travail (RHT), ils se retrouvent dans une situation financière très compliquée. Un employé évoque un «drame humain»: «Nous ne pouvions pas nous inscrire au chômage, certains collègues ont dû remettre leur appartement et quitter la région.» Plutôt moche de la part du groupe Boas, inscrit au palmarès 2020 des «meilleurs employeurs romands» par le magazine Bilan…
Exigence morale
Les travailleurs se sont alors tournés vers Unia. «Nous avons négocié un licenciement immédiat pour que les travailleurs puissent toucher le chômage en décembre déjà», indique Camila Aros, secrétaire syndicale d’Unia Genève. Si tout va bien, les premières indemnités devraient tomber en janvier. «Les caisses de chômage sont débordées», prévient toutefois Camila Aros. Reste le salaire impayé de novembre ainsi que le treizième salaire. La procédure d’insolvabilité d’Atrium Airport Hotel SA commencera lorsque la faillite aura été prononcée, une requête a été déposée en ce sens. «Si les différentes entités du groupe sont séparées juridiquement, il existe une exigence morale de Boas envers ses collaborateurs. Certes l’hôtellerie-restauration traverse une mauvaise passe, mais d’autres activités du groupe, la construction ou l’exploitation d’EMS, se portent, elles, très bien. A notre avis, Boas dispose des moyens d’assumer ses responsabilités et de verser les deux mois de salaire dus à ses employés», estime la secrétaire syndicale.
«Le groupe va s’en sortir, mais nous, nous sommes sacrifiés, nous nous retrouvons sans revenu et sans perspective d’emploi. J’ai deux enfants, je dois faire un crédit pour acheter à manger», explique l’un des travailleurs. «Mes parents m’aident un peu, mais je n’ai pas de quoi payer mon loyer, heureusement ma propriétaire m’a laissé un délai, j’ai une fille de deux ans et je ne peux pas lui acheter des cadeaux de Noël», témoigne, de son côté, une jeune femme. «Le groupe se porte bien, alors que la situation est critique pour nous. Il n’y a aucune humanité.»