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Les inégalités de genre passées sous la loupe

feu au patriarcat
© Thierry Porchet

Les inégalités de genre demeurent criantes, même s’il y a eu des progrès ces dernières décennies (photo: manifestation du 8 mars à Genève).

 

L'Etat de Genève vient de lancer un outil statistique en libre accès pour mesurer en détail les inégalités entre les femmes et les hommes. Instructif.

Les inégalités de genre demeurent criantes, même s’il y a eu des progrès ces dernières décennies. Un nouveau portail récemment mis en ligne par l’Etat de Genève permet d’avoir un bon aperçu de la situation. Ce site, qui s’inspire de modules développés par la Confédération et le Canton de Vaud, regroupe toutes les données statistiques cantonales en lien avec cette problématique.
Sept domaines sont couverts: la démographie, la formation, la santé, les revenus, la famille et le travail, les violences et la criminalité, et enfin la politique. Le tout présenté de manière interactive et synthétique, avec de nombreux graphiques, sans pour autant noyer les usagères et les usagers sous une masse de chiffres indigeste. De brèves analyses contextuelles, rédigées par le Bureau genevois de promotion de l'égalité et de prévention des violences (BPEV), mettent en lumière les défis à relever ainsi que les mesures mises en place par les autorités cantonales. 

Inégalités persistantes
Il n’y a pas de grandes surprises dans ces données, mais cette vue d’ensemble permet de mesurer le chemin qui reste à parcourir. Par exemple, en ce qui concerne le niveau de formation, l’écart se réduit. Entre 2012 et 2022, la part des femmes âgées de 25 ans ou plus ayant achevé une formation de niveau tertiaire est passée de 37% à 45%. Puisque chez les hommes, cette proportion n’a que peu évolué (passant de 44% à 46%), il n’y a presque plus de différence entre les sexes sur ce plan.
En revanche, les filles restent proportionnellement moins nombreuses (24%) que les garçons (38%) à choisir une formation professionnelle initiale (débouchant sur un CFC ou sur une attestation fédérale de formation professionnelle). Et même si la part de filles a notablement augmenté entre 2013 et 2023 dans certaines filières traditionnellement masculines, elles y sont toujours minoritaires. C'est par l’exemple le cas pour le domaine de l'architecture et de l'urbanisme (42% de filles en 2023, contre 27% en 2013), de l'horticulture (22%, contre 15%) ou de la mécanique (17%, contre 11%). 
Un autre écart s’est beaucoup rétréci: depuis 1970, les femmes sont davantage présentes sur le marché du travail. A l’époque, seules 45% d’entre elles travaillaient, contre 55% aujourd’hui, alors que la part d’hommes actifs n’a cessé de diminuer, passant de 83% à 65%. Cependant, près de la moitié des femmes (45%) travaillent à temps partiel, alors que c’est seulement le cas de 17% des hommes, des chiffres qui n’ont pas beaucoup évolué en dix ans. Ainsi, on compte encore 14% de couples où l’homme travaille à plein temps et la femme est au foyer.

Stéréotypes de genre
En termes de tâches domestiques, les inégalités ont aussi la vie dure, puisque dans 56% des couples, ce sont principalement les femmes qui s'en occupent, alors que l’inverse n’est vrai que dans 7% des cas. Ce déséquilibre est encore plus marqué chez les baby-boomers, mais reste important chez les plus jeunes générations. Il est aussi souvent lié au fait d’avoir des enfants. 
Tout cela «pèse particulièrement sur les trajectoires professionnelles des femmes, tout comme sur leurs perspectives de retraite», souligne le BPEV, puisqu’il en découle de fortes disparités salariales tout au long de la vie des femmes, qui placent celles-ci dans un état de dépendance économique vis-à-vis de leur conjoint.
Au niveau des salaires, une des principales revendications féministes, l’inégalité est flagrante, et s’explique en partie – mais pas seulement – par le fait que les femmes travaillent moins souvent dans les branches les mieux rémunérées, et qu'elles sont moins nombreuses à occuper un poste de cadre. Mais même à caractéristiques égales, elles ne reçoivent pas le même traitement que les hommes, et leur salaire moyen brut est de 15,6% inférieur pour un taux d’occupation équivalent. Une inégalité qui s’accentue en l'absence de qualifications et d'expérience professionnelles et qui a, plus tard, des conséquences sur le montant des rentes vieillesse.
Impossible de faire le tour de tous les indicateurs ici, mais mentionnons encore le problème de la violence domestique, dont les auteurs sont majoritairement des hommes. En 2023, 80% des femmes en ont subi, contre seulement 20% des hommes. Quant aux violences sexualisées, près de neuf victimes sur dix sont des femmes. Des chiffres qui parlent, hélas, d’eux-mêmes et qui sont probablement encore en-dessous du compte, puisqu'une part importante des violences passe sous les radars.

Objectiver le problème
Compiler cette masse de données n’a pas été une mince affaire: «Certains indicateurs étaient disponibles sur notre site Statistique Genève, mais d'autres ont dû être développés, confie Elvita Alvarez, directrice de l’Office cantonal de la statistique. Le projet s'est déployé sur un peu plus d’une année, ce qui constitue un délai relativement court compte tenu de la nature innovante du module et de sa dimension pleinement transversale.» Une mise à jour des données est prévue tous les semestres, et de nouveaux indicateurs devraient faire leur apparition peu à peu.
«Avoir regroupé toutes ces données dans un même portail permet de facilement trouver des chiffres. C’est précieux pour nous quand on doit argumenter, mais aussi pour le public et les médias, estime Emilie Flamand, directrice du BPEV. A notre époque où beaucoup de fake news circulent, il est important de pouvoir objectiver cette problématique remise en question par certains, afin de montrer que les inégalités de genre sont une réalité et pas une invention des féministes. Et pour la population, voir tous ces éléments réunis, ça peut provoquer une prise de conscience. Au niveau politique, c’est aussi intéressant de pouvoir mesurer l’évolution de la situation.» 

Cliquez ici pour consulter le portail sur l'égalité.

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