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Les sous-effectifs, la maladie chronique de l’hôpital public

Grève de la fonction publique en 2004. Sur une pancarte on peut lire: La santé n'est pas à vendre.
© Valdemar Verissimo/Archives

A Genève comme ailleurs en Suisse, le personnel de santé se bat depuis des années contre les mesures d’austérité et le manque d’effectifs. Ici, le 4 mai 2004, le personnel de toute la fonction publique genevoise s’était mis en grève contre de nouvelles restrictions budgétaires.

Le personnel de santé est soumis à rude épreuve par une crise qui met en lumière l’austérité imposée aux services publics

En première ligne à affronter l’épidémie, le personnel de santé est soumis à rude épreuve ces jours. Malgré l’urgence de la crise sanitaire, le Syndicat des services publics (SSP), qui organise le secteur, exige toutefois que la Loi sur le travail soit respectée. Comme l’explique Sabine Furrer, secrétaire syndicale du SSP Genève, «le personnel ne servira à rien s’il se retrouve complètement épuisé», cela aggraverait le taux d’absentéisme et finalement la prise en charge des malades. «Il y a l’idée que le coronavirus passe avant tout et permet tout», constate David Andenmatten, le représentant du SSP aux Hôpitaux universitaires de Genève (HUG). Sans consulter le personnel, l’hôpital public a ainsi imposé aux soins intensifs et aux urgences adultes un horaire de douze heures d’affilée. En outre, les employés des soins intensifs doivent travailler cinq jours de suite, ils n’ont que deux journées pour se remettre avant de recommencer une semaine marathon. Les congés étant annulés, on imagine bien qu’il va être de plus en plus difficile pour ces salariés de maintenir le rythme. «Il faut tenir dans la durée dans de bonnes conditions, car la crise risque de durer», estime David Andenmatten.

Le syndicat a envoyé divers courriers sur ces problèmes et d’autres qui n’avaient vendredi dernier reçu aucune réponse. «Nous avons un esprit constructif et sommes prêts à collaborer si les droits du personnel sont respectés. Malheureusement, toutes les réunions prévues avec la direction ont été annulées, il n’y a plus aucun dialogue, tout est mis entre parenthèses.»

Sous-effectif chronique

Le personnel est d’autant plus sous pression aujourd’hui que les hôpitaux publics subissent des cures d’austérité depuis des années, touchant aussi bien les infrastructures, comme le nombre de lits disponibles, que les effectifs. En cause, pêle-mêle, la mise en concurrence des hôpitaux depuis 2012, celle des cliniques privées financées par les cantons et l’assurance obligatoire au détriment des services publics, les efforts contre l’augmentation des coûts, mais encore, comme le souligne un communiqué du SSP Vaud, les «logiques de rendements et de profits» installés dans les établissements et dans les esprits. Du coup, «le personnel soignant est en sous-effectif chronique», indique Sabine Furrer. En fin d’année dernière, le SSP avait déposé une pétition au Grand Conseil genevois pour la création d’un demi-millier de postes supplémentaires aux HUG.

«Les sous-dotations, les burn-out, les démissions: nous ne cessons de vous alerter, mais vous ne cessez de réduire les moyens à notre disposition. Nous crions dans le désert. Nos demandes restent lettre morte», écrit de son côté le personnel du Chuv dans une lettre envoyée le 13 mars au Conseil d’Etat vaudois, dans laquelle il réclame notamment «un plan d’investissements massifs dans l’hôpital public» permettant de «travailler dans des conditions correctes à l’avenir». Le syndicat espère que le Conseil d’Etat ouvrira des négociations à l’issue d’une crise qui aura montré avec acuité la nécessité pour l’hôpital de disposer de moyens financiers supplémentaires.

Personnel des EMS aussi sous pression

La pression sur les conditions de travail n’épargne pas les EMS. A Genève, les deux secrétaires syndicaux d’Unia en charge du secteur sont en train de contacter un par un tous les membres du syndicat. Résultat: «Si, dans certains EMS, le personnel se sent bien informé et protégé, dans d’autres, le matériel de protection manque et les informations ne sont pas données ou se révèlent fausses», explique Anna Gabriel. «Ce qui est clair, c’est le manque d’effectif, qui a un impact plus important aujourd’hui. Les résidents ne reçoivent plus de visites, les soignants sont obligés de les accompagner encore plus alors qu’ils n’ont pas le temps et sont épuisés», ajoute la secrétaire syndicale, qui espère que l’Etat reconnaîtra l’effort accompli et accordera les subventions nécessaires.

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