Régulariser plutôt qu’enfermer
Une mobilisation était organisée samedi à Fribourg en faveur des résidents du foyer de la Poya et des exclus de l’asile
Samedi dernier, une mobilisation de solidarité avec les exclus de l’asile s’est tenue à Fribourg. Sur la place Georges-Python, les prises de parole se sont succédé en faveur de la régularisation des sans-papiers, de leur accès au travail et à la formation. Limité en raison de la situation sanitaire, le rassemblement a trouvé de l’écho sur les réseaux sociaux.
A l’origine de cette manifestation, Poya Solidaire. Constitué par des résidents de la Poya, un foyer destiné aux déboutés de l’asile, ainsi que des personnes solidaires, ce collectif tente d’alerter autorités et opinion publique sur la situation dans laquelle se retrouvent les occupants du centre. «Il s’agit d’un lieu où règne le désespoir et la violence», explique Marie-Christine Ukelo-Mbolo de Poya Solidaire. «Depuis deux ans, nous organisons actions et mobilisations avec les principaux concernés et envoyons des courriers et des demandes d’audition au Conseil d’Etat et notamment à sa présidente, Anne-Claude Demierre, mais nous n’avons jamais pu jusqu’ici obtenir une rencontre», déplore cette professeure à la Haute Ecole de travail social de Fribourg.
L’année dernière, le collectif Droit de rester et solidaritéS ont publié un document sur la gestion des foyers par l’entreprise ORS et les conditions d’accueil, qui a notamment mis en lumière les difficultés vécues au quotidien par les femmes et l’entassement dans les chambres. «Contesté par ORS, ce rapport a néanmoins permis quelques améliorations, les femmes déboutées de l’asile n’habitent en effet plus à la Poya, mais les conditions restent cependant très précaires.»
Gaspillage humain
Déjà difficiles en temps normal, les conditions de vie dans le foyer se sont encore dégradées depuis le début de la pandémie. «Fin octobre, les habitants du foyer ont été confinés durant plusieurs jours après que l’un d’eux a été testé positif. Selon trois personnes que nous avons interrogées, les usagers ne disposaient ni de masques ni de désinfectant et les locaux communs, comme la cuisine et les sanitaires, continuaient à être partagés. Il n’y avait pas non plus une organisation centralisée pour la distribution de nourriture. Ce sont les surveillants du foyer qui ont fait les commissions pour chacun, avec les montants que les résidents leur remettaient sur les 10 francs quotidiens qu’ils reçoivent. Cette situation scandaleuse illustre le manque de considération des autorités fribourgeoises pour la santé et la dignité des requérants d’asile déboutés.»
Selon Marie-Christine Ukelo-Mbolo, «ces exilés ne demandent pas tant de meilleurs lits qu’une ligne d’horizon. Ils sont venus en Suisse chercher protection, se retrouvent privés de statut légal sans pouvoir être renvoyés ailleurs, certains sont là depuis huit, neuf ans, il y a des jeunes, des qualifiés, c’est un gaspillage humain considérable. Nous revendiquons des conditions d’accueil dignes, la régularisation de leur statut, le droit au travail et à la formation. Si Genève a fait Papyrus, le Canton de Fribourg nous semble aussi capable de mettre à profit la marge de manœuvre dont il dispose.»