Retraite des femmes à nouveau en danger
La droite profite de la torpeur estivale pour affûter ses armes contre l’AVS, notre assurance sociale conquise de haute lutte et qui, à l’inverse du 2e pilier, offre une égalité imparable en matière de rentes.
La presse alémanique a dévoilé la semaine dernière la création d’un pacte entre les partis bourgeois au sujet de la réforme à venir de l’AVS. Unis, ils souhaitent faire passer en force au Parlement la hausse de l’âge de la retraite des femmes de 64 à 65 ans. Des femmes qui, comme dans le projet Prévoyance vieillesse 2020 (PV2020), seraient censées renflouer presqu’à elles seules les caisses de l’AVS pour garantir à terme sa santé financière. Elles qui, déjà, perdent chaque année quelque 10 milliards de francs de salaire en raison d’une inégalité qui flirte toujours avec les 20%. Elles dont les rentes du 2e pilier sont aussi deux à trois fois plus basses que celles des hommes en raison de temps partiels ou de parcours professionnels interrompus.
Le cinglant refus de l’augmentation de l’âge de la retraite féminine lors de la votation du 24 septembre 2017 sur PV2020 n’a pas refroidi les ardeurs des partis de droite, ni celles du Conseil fédéral qui propose à nouveau, dans son Projet de stabilisation de l’AVS (AVS21), un tel relèvement. La puissante grève des femmes du 14 juin 2019, mettant à jour les discriminations salariales et sociales toujours aussi criantes, n’a pas non plus eu raison de la volonté de leur faire payer à nouveau le prix d’une politique financée par les moins bien lotis et non par ceux qui s’enrichissent sur le dos des salariés.
De l’argent, il y en a en Suisse. Or le gouvernement ne compte pas aller le chercher là où il se trouve. Et sa réforme de l’AVS risque bien de frapper à nouveau, outre les femmes, les plus précaires, avec par exemple cette incitation à travailler jusqu’à 70 ans pour combler les lacunes de cotisations.
Derrière les partis bourgeois, les milieux économiques sont à la manœuvre. Comme Economiesuisse qui appuie leur démarche, en alertant sur la santé de notre assurance vieillesse. Sa solution: réduire les charges financières en portant, en particulier, l’âge de la retraite des femmes à 65 ans. La faîtière des entreprises refuse en outre toute élévation des cotisations de l’AVS qui permettrait d’assurer son financement de manière équitable. Pourtant, la hausse de celles du 2e pilier ne semble déranger personne... Economiesuisse se profile encore en soutenant l’initiative des jeunes PLR pour la retraite à 66 ans pour tous.
Lundi dernier, le projet AVS21 débutait son chemin parlementaire devant la Commission de la sécurité sociale du Conseil des Etats. La rentrée risque d’être chaude. Ce projet déboule dans une période où il sera aisé pour les partis bourgeois de crier famine et de surfer sur les craintes, bien réelles, que fait porter la crise sanitaire en matière de salaires, d’emplois ou de rentes. Il faudra être vigilants pour résister aux attaques contre les travailleuses et les travailleurs qui vont redoubler. La Suisse a les moyens de surmonter cette crise. Jusqu’à aujourd’hui, c’est aux plus pauvres qu’il a été demandé de faire des sacrifices. Il est temps que ça change!