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Romance interdite entre larmes et sang

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Dans une Inde conservatrice, deux femmes se vouent un amour interdit. Une histoire féministe, forte et bouleversante sur fond de thriller racontée dans The Shameless.

Renuka (jouée par Anasuya Sengupta, prix d’interprétation féminine Un certain regard à Cannes) incarne une prostituée musulmane qui a changé son nom pour celui d’une déesse hindoue. La raison? Elle espère échapper à la police après avoir poignardé un client abuseur. Et s’enfuit d’un bordel de Delhi pour se réfugier dans une communauté de travailleuses du sexe au nord du pays, à Chhatrapur, une ville où elle fait la connaissance de Devika, une femme d’une dizaine d’années sa cadette. Cette dernière souhaite devenir rappeuse, mais ne peut accéder à ce rêve. Consacrée «devasavi», la courtisane sacrée sera contrainte de perpétuer la tradition de sa caste en se prostituant. Une pratique prohibée par le gouvernement, mais qui perdure. Renuka et Devika tombent amoureuses. Leur histoire se heurte à l’interdit d’une telle liaison dans une société qui reste très traditionnelle. L’affection qu’elles se portent est aussi ballottée par des vécus douloureux. 

La liberté comme phare
Après avoir échappé à son frère et à son père, Renuka, mariée à un homme pire encore que les précédents, devient la proie d’une maquerelle. La trentenaire, affranchie du mode de pensée patriarcale, développe une certaine dureté qui lui sert de carapace, une violence défensive vitale, et s’échappe ponctuellement de sa vie dans l’héroïne et l’alcool. Devika, elle, est une fille fragile, écorchée, qui bande ses seins pour reculer le moment où elle devra passer sa première nuit avec un homme. Un viol monnayé par sa famille. Dans les moments charnières du récit, Devika craque souvent une allumette. Une sorte de rituel divinatoire: la persistance de la flamme alimente l’espoir. Dans le cas contraire, quand elle s’éteint tout de suite, elle semble le consumer... Pour tenter d’accéder à une liberté toute aléatoire, le duo féminin, marqué émotionnellement au fer rouge, confronté à de nombreux obstacles, devra consentir à d’énormes sacrifices. Jusqu’à la tragédie...

Qualité esthétique et suspense
Réalisé par l’autodidacte bulgare Konstantin Bojanov, The Shameless lève un pan de voile sur la situation de personnes marginalisées dans une société construite sur un système de hiérarchies professionnelles, sociales et d’appartenances religieuses toujours très vivace. Ce drame met l’accent sur la force et le courage de ses deux protagonistes tentant d’échapper à leur terrible condition. Et aborde différentes thématiques telles que l’amour, la sexualité, le libre arbitre, les croyances et superstitions, les conventions et les castes. Malgré une certaine lenteur favorisant néanmoins une immersion en profondeur dans cette Inde contemporaine et traditionnelle à la fois, la réalisation ne manque ni de tensions ni de suspens. Et sa qualité esthétique, portée par des couleurs chaudes, l’harmonie des compositions et l’atmosphère qui s’en dégage, donne à voir des tableaux intenses marquants.
Konstantin Bojanov espère aujourd’hui que son film puisse «transcender les frontières culturelles et révéler l’humanité commune qui se cache derrière nos différences sociales». Attente comblée... 

Information sur les projections:
movies.ch: movies.ch/de/kinoprogramm/f/shameless/

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