S’en griller une, ou le cerveau?
La mention «non-fumeur» dans les offres d’emploi fait son apparition depuis quelque temps. Une pratique clairement discriminatoire, dénonce le syndicat Unia, la cigarette relevant de la sphère privée, du moment que l’employé ne fume pas à son poste de travail. S’il ne fait plus aucun doute pour personne que le tabac est mauvais pour la santé (rappelons toutefois qu’originellement les peuples du continent américain l’utilisaient à dose homéopathique comme médicament et outil spirituel), il semble que le «deux poids deux mesures» soit en vigueur en termes de santé publique. Pour ne donner qu’un exemple parmi d’autres: les CFF viennent de renforcer leur politique anti-clopes en délimitant des zones fumeurs de deux mètres autour du cendrier sur les quais (à l’air libre, il va sans dire). Par contre, aucun wagon n’est encore consacré à celles et à ceux qui souhaiteraient ne pas être bombardés d’ondes de téléphones portables.
Une question d’autant plus d’actualité que la 5G commence à coloniser le territoire suisse, malgré les débats et les oppositions. Aucune votation, aucun véritable moratoire, ni cantonal ni communal ne semble légalement possible. Or, de nombreuses personnes électro-sensibles ne supportent déjà plus les rayonnements électromagnétiques présents à haute dose dans notre environnement. Et, déjà, d’autres commencent à témoigner de nouveaux maux, notamment à Genève, dont l’apparition semble coïncider avec la mise en fonction de ces nouvelles antennes. Ces dernières années, un nombre important de médecins et de spécialistes n’ont cessé d’appeler au principe de précaution. Mais qu’importe, les opérateurs semblent avoir les coudées franches, le Conseil fédéral leur ayant octroyé les concessions avant même de publier son étude, toujours en cours, sur la question.
Cela rappelle le temps où la cigarette était sur tous les écrans et les affiches publicitaires. Un symbole d’émancipation et de séduction. Et pourtant des politiques de santé publique ont permis de supprimer la fumée sur les lieux de travail et jusqu’aux boîtes de nuit. Preuve que la volonté politique peut faire des miracles. Même si l’industrie du tabac a su créer, dans la foulée, de nouveaux marchés dans les pays en développement et proposer cigarettes électroniques et autres alternatives chimiques. Triste écho au business des pesticides qui polluent nos terres et nos eaux. Avec le blanc-seing des politiques à la botte des pharmas? Avec la 5G, ce sont de nouveaux appareils – impliquant l’exploitation d’êtres humains et la pollution de terres – que de nombreux consommateurs vont acheter pour recevoir, quelques millionièmes de secondes plus vite, la réponse à leur curiosité machinale: «T’es où?» La question ne serait-elle pas plutôt: Où allons-nous? Interdit de s’en griller une, mais se cramer le cerveau, pas de problème? Quant aux dégâts sur la capacité d’attention, sur la richesse des relations humaines et la conscience du moment présent, c’est encore un autre débat, vertigineux.