Une vidéo de Olivier Vogelsang.
Tristesse et colère à Genève après la mort d’un électricien sur un chantier

Les syndicalistes d'Unia Genève et les travailleurs délégués de toutes les branches de la construction ont observé une minute de silence en hommage à l'électricien décédé après être tombé d'un échafaudage, sur le chantier du Portail des Nations.
A la suite du décès d’un ouvrier, tombé d’un échafaudage lors de travaux à l’ONU, Unia réclame des chantiers plus sûrs et moins de pression sur les délais.
Ils sont une douzaine, syndicalistes et travailleurs délégués de toutes les branches de la construction, à se recueillir, le regard sombre. Ce 6 mars, le point presse organisé par Unia Genève devant le chantier du Portail des Nations, à côté du siège genevois de l’ONU, commence par une minute de silence. Le syndicat tient ainsi à rendre hommage à l’électricien de 55 ans décédé le 21 février, après être tombé d’un échafaudage.
«Nous avons hésité à organiser ce rassemblement, car nous ne voulions pas exploiter le malheur de cet homme et de sa famille, confie, à la fin de cet instant de recueillement, José Sebastiao, responsable des secteurs de la construction et de l’artisanat à Unia Genève. Mais ne rien faire aurait signifié que nous acceptons ce qu’il s’est passé. Or, c’est intolérable! Il n’est pas possible qu’en 2025, des gens meurent encore sur des chantiers.»
Trop de pression sur les délais
Les circonstances exactes de cet accident mortel ne sont pas encore connues. Une enquête a été ouverte. «Nous avons essayé à plusieurs reprises de venir sur ce chantier pour rencontrer les travailleurs, que ce soit avant ou après le drame, mais on nous a barré l’entrée à chaque fois», déplore le syndicaliste. Cependant, sans pouvoir donner un avis sur ce cas précis, il ne se dit qu’à moitié étonné par ce qu’il s’est passé. «A Genève, et en Suisse, il y a depuis longtemps un problème général dans le bâtiment, c’est le stress, comme l’avait montré une enquête d’Unia en 2020. On dit toujours que c’est le seul pays où, avant même d’avoir démarré, les chantiers sont déjà en retard. Il y a une pression continue sur les délais et du coup, les règles de sécurité ne sont pas toujours appliquées correctement. Il faudrait davantage de contrôles.»
José Sebastiao affirme que des discussions ont été entreprises avec les politiques et le patronat pour allonger les délais de réalisation des chantiers. «Depuis 10 ans, c'est la folie!, dénonce pour sa part un membre du comité de la métallurgie d’Unia Genève. Il faut aller toujours plus vite, sinon le patron se plaint de perdre de l'argent. Ça devient dramatique.»
Un autre problème est l’explosion du travail temporaire. En l’occurrence, la victime était un employé intérimaire. «Selon les chiffres de l’Ocirt (ndlr: Office cantonal de l'inspection et des relations du travail), en 2023, il y a eu à Genève environ mille postes fixes en moins dans la branche de l’électricité, et à peu près autant de temporaires en plus, souligne Joan Gesti Franquesa, secrétaire syndical d’Unia Genève. Ces travailleurs précaires, jetables, sont encore plus stressés que les autres, car ils veulent plaire à leur employeur dans l’espoir d’obtenir un contrat fixe.»
Mieux former les temporaires
De plus, les employés temporaires ne seraient pas toujours assez bien formés. Le syndicat exige qu’ils suivent obligatoirement une formation sur la sécurité sur les chantiers avant de commencer une mission. José Sebastiao note que si, en général, le nombre d’accidents diminue, ils sont en revanche plus graves. Les chutes sont d’ailleurs parmi les causes d’accidents du travail les plus fréquentes, selon les statistiques nationales.
Enfin, la fatigue pouvant aussi causer des accidents, Unia revendique une réduction du temps de travail. «Ce sera une de nos principales revendications dans le cadre du renouvellement de la Convention nationale du gros œuvre qui aura lieu cette année, explique José Sebastiao. Une grande manifestation aura lieu le 17 mai à Lausanne pour demander des journées de travail plus courtes, alors que de leur côté, les patrons veulent flexibiliser au maximum le temps de travail.»