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«Un syndicat, ça doit fonctionner du bas vers le haut, pas l’inverse»

Carlos Dos Santos assis à une table
© Olivier Vogelsang

Président d'Unia Fribourg, Carlos Dos Santos défend le pouvoir plus grand donné à la base.

Pause café militante avec Carlos Dos Santos, président d'Unia Fribourg.

C’est un peu le nouvel homme fort de la section fribourgeoise d’Unia. Depuis que l’assemblée cantonale des délégués a décidé, fin avril, de modifier son règlement pour renforcer le fonctionnement démocratique du syndicat et donner avant tout la parole aux membres, leur président, Carlos Dos Santos, a en effet gagné en influence. 
Aux yeux de cet ouvrier portugais de 59 ans, installé dans la Broye depuis près de quatre décennies, il est logique que les décisions importantes soient prises par la base: «Un syndicat, ça doit fonctionner du bas vers le haut, pas l’inverse.» Militant engagé depuis plus de vingt ans, ce n’est pas la soif du pouvoir qui l’a amené à prendre ces responsabilités. «Je n’avais pas vocation à devenir président, mais il fallait un volontaire, alors je me suis lancé. Et finalement, ça me plaît.» Il ne compte pas pour autant s’accrocher à son pouvoir. «J’aimerais bien qu’une femme me succède. Ça a toujours été des mecs jusque-là, mais j’estime que les femmes peuvent apporter une autre sensibilité.» 
Pour lui, être syndiqué est essentiel. «Quand on voit les dégâts qu’il y a dans le monde du travail, ça devrait presque être obligatoire! plaisante-t-il. Certains patrons sont excellents, mais il y a beaucoup de pourritures. On nous demande toujours plus de flexibilité et de disponibilité, jusqu’au jour où on se fait remercier parce qu’un actionnaire au fin fond de la Chine exige une plus grande rentabilité.»

Un caractère bien trempé

Le monde du travail, Carlos Dos Santos s’y plonge très tôt. Agé d’à peine 17 ans, il exerce le métier d’ébéniste au Portugal. D’emblée, il montre qu’il n’est pas du genre à se laisser tondre la laine sur le dos. «J’ai toujours eu un caractère assez trempé et j’avais déjà ma petite veine syndicale, confie-t-il. Comme tous mes collègues gagnaient plus que moi, je suis allé voir le patron pour lui demander une augmentation. Il a refusé, alors le lendemain, à la fin de ma journée de travail, j’ai pris mes affaires et je suis parti.»
Un jour, un parent lui parle de la Suisse. Carlos Dos Santos y débarque en 1986. Il a 21 ans et ne parle pas un mot de français. «On pensait que la Suisse était l’Eldorado, mais je me suis retrouvé à travailler comme ouvrier agricole, six jours sur sept et douze heures par jour, pour un salaire de mille francs par mois, nourri et logé.»
Après cinq ans à ce régime, il trouve un emploi dans la tôlerie industrielle, un domaine où il finira, avec beaucoup de volonté et un peu de culot, par être responsable d’une équipe spécialisée dans la découpe au laser. «J’ai appris la technique sur le tas, en côtoyant un collègue qui m’a enseigné les bases du métier. Quand il est parti, j’ai dit au patron: “Je sais utiliser cette machine.” C’était gonflé, mais ça a marché.» 
En tout, il restera 19 ans dans cette entreprise. Mais des restructurations successives auront raison de son enthousiasme. «J’en étais réduit à ne faire plus qu’appuyer sur des boutons. Là, je me suis dit qu’il fallait que je cherche autre chose. Quand on se lève le matin et qu’on n’a plus de plaisir à aller travailler, c’est qu’il y a un problème.» Cette démotivation, il ne s’en cache pas auprès de son employeur et ils finissent par rompre leurs rapports de travail «d’un commun accord»…

«J’ai ma fierté»

Carlos Dos Santos décroche une place dans une autre entreprise de tôlerie fribourgeoise, mais au bout de treize ans, des désaccords avec un nouveau directeur lui font encore une fois prendre la porte. «Il fallait que je sois au service de l’entreprise 24 heures sur 24, et peu importe que j’aie une famille. J’avais un excellent salaire, mais il y a des choses que je n’accepte pas.»
Depuis avril dernier, Carlos Dos Santos, arrivé en fin de droit, ne perçoit plus le chômage. Pourtant, il se refuse catégoriquement à demander l’aide sociale. «J’ai travaillé toute ma vie et je devrais m’agenouiller pour toucher l’aide sociale? J'ai ma fierté. Je suis trop jeune pour prendre ma retraite, mais trop vieux pour être embauché. Ce n’est pas normal pour un pays riche comme la Suisse. Si je ne trouve pas de travail, je retournerai au Portugal.» 
 

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