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La santé en danger

Nombreux ballons sur la place Fédérale.
© Thierry Porchet

Les organisateurs ont lâché 300 ballons symbolisant le nombre de soignants qui abandonnent leur métier chaque mois.

Plus de 700 membres du personnel soignant se sont rassemblés le 26 novembre à Berne pour exiger, enfin, la mise en œuvre de l’initiative sur les soins. Témoignages

Un an après l’acceptation de l’initiative sur les soins, rien n’a changé, ou presque. Les soignants sont à bout de souffle et la qualité des soins est en péril. C’est dans ce contexte que plus de 700 soignants des quatre coins de la Suisse se sont réunis sur la place Fédérale à Berne le 26 novembre dernier. Suivant l’appel de l’Association suisse des infirmières et infirmiers (ASI) et des syndicats Unia, SSP et Syna, ils ont prié la Confédération, les cantons et les employeurs d’agir afin que l’initiative en question soit mise en application. Pour attirer l’attention de la population sur la situation dangereuse que vit le secteur, à la fois pour les employés et pour les patients, ils ont lâché 300 ballons dans un nuage de fumée, symbolisant les 300 soignants qui abandonnent leur métier chaque mois. «Une réalité qui mènera tôt ou tard à l’effondrement du personnel soignant et de l’ensemble du système de santé», alertent l’ASI et les syndicats.

Revendications urgentes

Sous-effectifs, fermetures de lits, voire de services entiers, personnel surchargé, erreurs dans le travail: la situation dans la santé est de plus en plus précaire, selon l’enquête de Swiss Nurse Leaders à laquelle ont répondu 150 cadres de différentes institutions de soins.

Afin de stopper l’exode des salariés et d’assurer une prise en charge de qualité des patients, les soignants ont réitéré leurs cinq mesures à adopter d’urgence: une augmentation de salaire pour le même taux d’occupation ou une réduction du temps de travail pour le même salaire; le paiement additionnel ou la compensation en temps pour les heures supplémentaires, les horaires irréguliers et les changements de planning; au moins 5 semaines de vacances jusqu’à 49 ans, 6 semaines dès 50 ans et 7 semaines dès 60 ans; l’enregistrement et la rémunération du temps de travail effectif (temps pour se changer et se déplacer); et, enfin, l’organisation de crèches ou la prise en charge de frais liés à la garde des enfants.

Après les applaudissements, place à l’action!

Témoignages

Amandine, infirmière dans un EMS genevois et déléguée syndicale

«J’ai été très active lors de la campagne pour l’initiative sur les soins et, un an après, on en est toujours au stade des pourparlers. Cela me tenait à cœur d’être à Berne pour montrer qu’on est toujours là, que ça ne va pas mieux, et que tant que les choses ne bougeront pas au niveau politique, ça n’ira pas mieux!

Notre système de santé va vraiment mal, cela fait des années qu’on le dénonce, mais aujourd’hui, toute la population en a conscience mais rien ne se passe. Les conditions ne cessent de se détériorer, on n’arrive même plus à freiner la dégradation.

Après une dizaine d’années passées en EMS, je remarque que la population qu’on accueille est beaucoup plus atteinte, physiquement et/ou psychologiquement, donc la prise en charge est de plus en plus lourde, alors que la dotation, elle, n’a pas changé. La charge administrative a, quant à elle, doublé, voire triplé, et le niveau de formation et d’expérience du personnel est souvent très bas, et c’est un réel problème au quotidien. On est surchargés. Je n’ai pas une belle vision d’avenir pour mon métier et, personnellement, je ne tiendrai pas encore dix ans dans ces conditions.

Il y a aussi beaucoup de turn-over, d’absentéisme et d’accidents. C’est un milieu qui devient dur et la qualité des soins en prend un coup. Les choses doivent changer: il faut arrêter de penser et passer à l’action. La solution est entre les mains des autorités et des décisions carrées doivent être prises, sans faire de compromis. Plutôt que d’acheter des avions de combat, on pourrait investir ces milliards dans notre santé et notre enseignement…»


Marie (prénom d’emprunt), infirmière à Delémont

«Je suis venue travailler en Suisse il y a vingt ans, car les conditions de travail en France ne me convenaient plus. Hélas, les choses ne sont plus si différentes. La qualité de la prise en charge s’est détériorée, car nous avons de moins en moins de temps pour les patients: je suis passée de 4 à 1 infirmière pour 50 patients. Les absences n’étant pas remplacées, nous sommes tous les jours en sous-effectif et le stress est au summum. C’est la première fois de ma vie où je me dis qu’on régresse, alors qu’on est censé optimiser le temps avec des outils de travail toujours plus performants: le métier ne permet plus l’empathie et l’écoute. J’ai récemment osé alerter ma direction en pointant des dérives et en proposant des solutions, et j’ai été licenciée pour “propos inacceptables et insubordination”. Concernant mon avenir, je suis très sceptique. On ne nous donne plus les moyens de mener à bien nos projets. Je me pose sérieusement la question d’aller travailler à l’usine: la rigueur du travail sera aussi intense mais je ne risque pas de mettre quelqu’un en danger. De plus, j’aurai moins de contraintes et je pourrai profiter de mes week-ends en famille.»

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«Dans le domaine hospitalier et dans les soins de longue durée, les cantons vont se désinvestir et reporter les charges sur les caisses maladie. Ainsi, au lieu de favoriser le développement d’un système de santé efficient et de qualité, nous allons au contraire accélérer l’explosion des coûts pour les payeurs de primes, tout en mettant en danger la couverture de base en matière de soins», souligne Véronique Polito, vice-présidente d’Unia, inquiète face à ce report de charge.

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