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L’augmentation des salaires est vitale pour le monde du travail

C’est du jamais-vu en Suisse depuis la Seconde Guerre mondiale: les salaires réels, soit les salaires après déduction du renchérissement, sont en baisse depuis trois années consécutives. La perte cumulée entre 2021 et 2023 est en moyenne de 3%, ramenant les salaires réels au niveau de 2018. Si l’on y ajoute l’augmentation de la productivité, les rémunérations accusent un retard de plus de 5%. Soit 300 à 500 francs qui manquent chaque mois aux bas et moyens salaires. Et pour 2024 et 2025, les maigres revalorisations annoncées et estimées ne devraient qu’à peine compenser le renchérissement prévu.

Rappelons de surcroît que l’indice des prix à la consommation ne prend pas en compte certaines dépenses incompressibles, telles que les primes maladie, qui ont progressé de 15% en moyenne nationale depuis 2022. Il est donc à craindre que les salariés et les salariées ne doivent continuer à se serrer la ceinture.
Or, les rémunérations de certaines branches ne permettent plus de vivre d’un seul salaire. Dans les services à la personne, par exemple, le salaire médian n’est que de 4384 francs. «Soit on vit chez ses parents, soit en colocation ou avec son chéri», témoignait une jeune coiffeuse vaudoise dans notre dernière édition. «Une fois que j’ai payé toutes les factures, il me reste 400 francs pour tenir le mois. Je ne fais plus rien, je reste chez moi», confiait, pour sa part, une vendeuse valaisanne. Augmenter les salaires devient vital pour une partie du monde du travail.

Unia revendique une augmentation des salaires effectifs et minimums de l’ordre de 5% pour tous. Des augmentations générales sont préférables aux revalorisations individuelles, qui favorisent les hauts salaires, l’arbitraire et le pouvoir discrétionnaire des chefs. Le syndicat ne veut plus de salaires inférieurs à 4500 francs ni à moins de 5000 francs pour les personnes au bénéfice d’une formation.

Les entreprises peuvent se le permettre. Il est vrai que certaines sociétés souffrent de difficultés d’accès au marché européen, du franc fort et de l’absence de politique industrielle, mais la conjoncture reste au beau fixe et les carnets de commandes sont généralement bien garnis. Le PIB devrait continuer à croître de 2,6% en 2024 et de 2,8% en 2025. De nombreuses branches, comme la construction, le commerce de détail ou l’industrie alimentaire, réalisent de confortables marges. Les entrepreneurs, les managers et les actionnaires en profitent bien. L’étude 2024 d’Unia sur les écarts salariaux révèle que les rémunérations des dirigeants s’envolent. L’écart moyen entre le salaire le plus bas et le plus élevé au sein des 36 grandes entreprises suisses examinées est de 1:143, cela signifie que la personne la moins bien payée doit travailler 143 ans pour toucher un an du traitement de son CEO!... Quant aux actionnaires, ils n’ont jamais été autant gavés, empochant, pour les seules entreprises cotées à la Bourse suisse, 64 milliards de francs cette année.

En Allemagne, l’économie se porte moins bien et pourtant les salaires réels ont progressé de 3,8% en début d’année. Il faut dire que les salariés allemands multiplient les conflits sociaux depuis l’année dernière avec de nombreuses grèves qui ont débouché sur les plus fortes augmentations salariales obtenues depuis une quinzaine d’années.

Il n’y a donc pas de secret. Comme l’explique la présidente d’Unia, Vania Alleva, «nous ne pourrons négocier avec succès des augmentations salariales que s’il y a une véritable pression en unissant nos forces dans les entreprises et dans la rue». C’est par notre capacité à nous organiser au sein des entreprises et dans les branches que nous pourrons imposer un rapport de force aux employeurs. Dit autrement, il faut tordre le bras des patrons. La manifestation salariale à Berne de ce samedi 21 septembre doit servir de catalyseur à cette mobilisation. Il faut augmenter les salaires, maintenant!

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